Splendeurs et misères des courtisanes (BALZAC).
Publié le 23/10/2012
Extrait du document
«
EXTRAITS
Dans la première scène du roman,
Lucien de Rubempré se trouve
à
l'Opéra, masqué, et devient l'objet
des convoitises : cette situation permet
à Balz ac une satire sociale
Le jeune homme intéressait :plus il allait,
plus
il réveillait de curiosités.
Tout en lui si
gnalait d'ailleurs les habitudes d'une vie
élégante.
Suivant une loi fatale de notre
époque,
il existe peu de différence , soit phy
sique, soit morale, entre le plus distingué,
le mieux élevé des fils d'un duc et pair, et
ce charmant garçon que naguère
la misère
étreignait de ses mains de fer au milieu de
Paris .
La beauté, la
jeunesse pouvaient
masquer chez lui de profonds abîmes,
comme chez beaucoup de jeunes gens qui
veulent jouer un rôle
à Paris sans posséder
l e capita l nécessaire à leurs prétentions , et
qui chaque jour risquent
le tout pour le tout
en sacrifiant au dieu le plus courtisé dans
cette cité royale,
le Hasard.
Néanmoins, sa
mise, ses manières étaient irréprochables,
il foulait
le parquet classique du foyer en
habitué de l'Opéra.
Qui
n'a pas remarqué
que là, comme dans toutes les zones de
Paris, il est une façon d'être qui révèle ce
que vous êtes, ce que vous faites, d'où vous
venez, et ce que vous voulez
?
Paris est peut-être le héros principal
de
ce roman: cette page d'anthologie
montre
l'amour de Balzac pour
la capitale et fait d'une description
réaliste un rêve fantastique
La rue de Langlade, de même que les rues
adjacentes, dépare
le Palais-Roya l et la rue
de
Ri voli.
Cette partie d'un des plus
brillants quartiers de Paris conservera
longtemps
la souillure qu'y ont laissée les
monticules produits par les immondices du
vieux Pari
s, et sur lesquels il y eut autrefois
des moulins.
Ces rues étroites, sombres et boueuses
, où s'exercent des industries peu
soigneuses de leurs dehors , prennent à
la
nuit une physionomie mystérieuse et pleine
de contrastes.
En venant des endroits lumi
neux de la rue Saint-Honoré, de la rue
Neuve-des-Petits-Champs et de
la rue de
Richelieu , où se presse une
foule inces
sante , où reluisent les chefs-d' œuvre de
l' Industrie, de la Mode
et des Arts, tout
homme à qui le Paris du soir est inconnu
serait saisi d'une terreur triste en tombant
dans le lacis de petites rues qui cercle cette
lueur reflétée
jusque sur le ciel .
Une
ombre épaisse succède à des torrents de
gaz.
De loin en loin, un pâle réverbère
jette sa lueur incertaine et fumeuse qui
n 'éclaire
plus certaines impasses
noires.
Les passants vont vite et
sont rares.
Les boutiques
sont fermées, celles qui sont
ouvertes
ont un mauvais
caractère : c'est un caba
ret malpropre et sans lu
mière, une boutique de
lingère qui vend de l'eau
de Cologne.
Un
froid
malsain pose sur vos
épaules son manteau
moite.
Il passe
peu de
voitures.
Il y a des coins
sinistres, parmi lesquels
se distingue la rue de
Langlade, le débouché
du
passage Saint
Guillaume
et quelques
tournants de rues.
Le
Conseil municipal
n'a
pu rien faire encore
pour laver cette grande
léproserie , car
la pros
titution a depuis long
temps établi là son
quartier général.
" Asie qui devait être
n ée à l'île de Java,
offrait au regard, pour
l'épouvanter ,
ce visage
cuivré particulier aux
Malais, plat comme une
planche et où
le nez
semble avoir été rentré
par un e compression
violente ( ...
) E n voyant
ce mon stre paré d'un
tablier blanc
sur une
robe de stoff , Esther eut
un
frisson."
NOTES DE L'ÉDITEUR «La nuit tombe sur une France où s'achè
vera le triomphe des carrières et des indivi
dus.
Un élément d'optimisme demeure
cependant, ( ...
) qui fonctionne avec une
sorte d'allégresse:
un récit mené tambour
battant( ...
).
Le monde n'est pas encore mé
diocre et triste.
D'où ce doré du récit et ce
texte qui so
uvent chante, monte et triomphe
contre cette rance bourgeoisie en train
d'achever la conquête
d'une France dont les
sp lend eurs vont vraiment commencer les
misères.
» -P.
Barbéris, préface de
Splendeurs et misères des courtisanes,
Folio, Gallimard, 1973.
«Voici encore une fois un titre parodique
«Dans Splendeurs et misères des courti
sanes
pub l ié de 1843 à 1847 réapparaît
Jacque s Collin, le Vautrin du
Père Goriot,
et avec lui une série de criminels profes
sionnels qui
ne se trouvent pas ailleurs ( ...
).
Ce que Balzac fait éclater ici, c'est le
complet déclin du pouvoir judiciaire et
policier à 1 'égar d de la vérité et de la mo
rale.
Seule compte l'efficacité.
La justice,
au moin s dans le domaine du meurtre,
n'exi ste pas.
»-Pierre Citron, Dan s Balzac,
Le Seuil, 1986.
(a ) portr a it de Bal zac; (b .
c) gr av.
de Bertall .
éd.
Fum e.
1844 .
cli chés B.N.
/ Edim e dia
( ...
) déjà , le sens est là.
M.
de Balzac, auteur
de romans de découverte et d'initiation
(Le Père Goriot , Les Illusions perdues),
philosophe désormais sur les apogées et
sur les catastrophes non plus au niveau de
personnages explicitement chargés de
mission philosophique mais au niveau
d'ensembles réalistes de plus en plus vastes,
de plus en plus compacts.
»
-P.
Barbéris, ibid~
BA L ZAC0 3.
»
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