Résumé de L'Ile des esclaves - MARIVAUX
Publié le 22/02/2012
Extrait du document
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celui du magicien de L'Illusion comique, mais aussi bien à celui du Prospero de La Tempête.L'action dramatique repose sur une série d'oppositions et de renversements des rapports entre les quatrepersonnages qui entourent Trivelin.
C'est pourquoi la dramaturgie est entière-ment régie par des parallélismes quiimbriquent étroitement les différents niveaux de l'oeuvre, les fluctuations de l'anecdote répondant aux nécessités dela parabole et aux besoins de la démonstration.Il convient, d'ailleurs, de préciser que ces parallélismes ne concernent pas seulement le jeu relationnel ou le conflitimmédiat entre les maîtres et les esclaves, mais embrassent l'ordre des temps.
Tout le débat provoqué parl'expérience de Trivelin repose sur la confrontation du présent et du passé, mais est essentiellement tourné versl'avenir, ce qui donne toute sa valeur à la dimension utopique de l'oeuvre.On observe des parallélismes dans la succession des scènes régie par un rythme binaire, à l'exception de la scèned'exposition et de celle du dénouement qui, à première vue, paraissent isolées mais dont le couple résume lastructure et le sens de toute la pièce.
La conclusion vient tout naturellement apporter la réponse au défi exprimépar Arlequin à son maître dans 1 ' introduction :« Quand tu auras souffert, tu seras plus raisonnable, tu sauras mieux ce qu'il est permis de faire souffrir aux autres.Tout en irait mieux dans le monde, si ceux qui te ressemblent recevaient la même leçon que toi.
»La scène 2 et la scène 3 se correspondent.
Dans l'une est exposé le changement de situation dans les rapportsentre les hommes ; dans l'autre, c'est au tour de la dame, Euphrosine, de connaître le même sort qu'Iphicrate etd'être contrainte de servir son ancienne esclave.Mais, dans la scène qui met aux prises les deux femmes, Trivelin introduit un élément nouveau qui corse la situationavec le jeu du portrait.
Il demande à Cléanthis de faire le portrait d'Euphrosine, puis il éloigne l'ancienne esclave afind'avoir, dans la scène 4, un entretien particulier avec la dame pour l'amener à reconnaître ses défauts et sesfautes.Trivelin procède de même avec Iphicrate et Arlequin, mais on constate un resserrement, le processus conduisant àl'aveu qui s'étend sur deux scènes pour Euphrosine n'occupe ici qu'une scène, la scène 5.On observe une césure entre la scène 5 et la scène 6 qui confirme le changement survenu dans les relations entreles maîtres et les valets grâce à l'intervention de Trivelin.
La scène 6 réunit les deux couples mais les anciensesclaves, devenus les nouveaux maîtres, sont les seuls à prendre la parole, concrétisant ainsi leur prise de pouvoir.Ce renversement culmine dans l'accord passé entre Arlequin et Cléanthis pour user de ce pouvoir à des fins deséduction.
Il est significatif que cette inversion de la hiérarchie s'accompagne d'une transgression du parallélismehabituel.
Les deux anciens valets singent d'abord leurs maîtres en mimant les manières galantes du grand monde.Puis ils conviennent qu'ils ne sont pas amoureux l'un de l'autre et ils procèdent à un chassé-croisé, Arlequinconvoitant Euphrosine et Cléanthis souhaitant faire la conquête d'Iphicrate.Finalement, Arlequin sera vaincu par la détresse d'Euphrosine et, dans la scène suivante, au lieu de continuer àtyranniser son ancien maître, il se réconcilie avec lui.
L'avant-dernière scène, celle qui précède l'épilogue, réunitnaturellement les deux couples pour le retour à l'ordre.
La boucle se referme.On observe donc un triple parallélisme, entre les esclaves et les maîtres, entre les hommes et les femmes et aussientre le passé (conservation de la hiérarchie) et l'avenir (renversement de la hiérarchie).Il est intéressant de remarquer que l'entrecroisement qui se produit entre les sexes à la scène 8, entre Euphrosineet Arlequin, provoque le rétablissement de l'état antérieur.
La transgression des conventions sociales est neutraliséepar la relation sentimentale.Le rapport entre les sexes vient déterminer le rapport entre les classes.
Le nouveau maître renonce à son pouvoirpar compassion pour la dame déchue.
De toute évidence, il a été touché en tant qu'homme.
Dans la scène suivante,c'est Iphicrate, l'ancien maître, qui sera le bénéficiaire de ce revirement.
L'interférence entre les séries est doncimmédiate, puisque l'effet que la femme produit sur l'homme se concrétise par la restitution des anciens liensd'allégeance entre le maître et le serviteur.On retrouve dans cette permutation l'un des thèmes constants du théâtre de Marivaux.
On est donc amené às'interroger sur l'emploi présent de ce cas de figure et sur la signification qu'il convient de lui attribuer dans unepièce centrée davantage sur la question politique et sociale que sur l'analyse des sentiments amoureux.
Une esthétique du travestissementCertes, nous sommes loin, dans L'Ile des esclaves, des surprises de l'amour.
Ici, les échanges de fonctions sontsoigneusement programmés et, si le coup de théâtre grâce auquel tout rentre dans l'ordre est la conséquencedirecte d'un coup de cœur, on n'en saura pas plus sur les sentiments qu'Euphrosine a pu inspirer à Arlequin.
Seule lacompassion, seul un sentiment d'humanité semblent le faire agir.
Il n'est pas question ici de marivaudage.Pourtant cette fable philosophique se rapporte elle aussi à l'esthétique marivaudesque du travestissement.La principale différence avec les autres comédies réside dans l'intention démonstrative qui perce sous l'allégorie.
Ladistanciation temporelle est évidemment un premier indice de cette volonté didactique qui conduit l'auteur às'écarter de l'illusion réaliste.Le propos est avant tout, de manière assez exceptionnelle chez Marivaux, d'instruire le spectateur, de l'amener àréfléchir sur des problèmes de société par le biais d'une comédie qui, pour n'être pas une pièce à thèse au sens oùon l'entend aujourd'hui, n'en est pas moins une pièce à idées, une pièce « sociale ».Cependant, le jeu théâtral ne perd pas ses droits.
UNE REVENDICATION
Même si, selon les données de la fable, les serviteurs prennent réellement le pouvoir, le retour final à la norme.
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