RENÉ. Récit de François-René, vicomte de Chateaubriand (résumé et analyse de l'oeuvre)
Publié le 27/10/2018
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RENÉ. Récit de François-René, vicomte de Chateaubriand (1768-1848), publié dans le Génie du christianisme à Paris chez Migneret en 1802. La cinquième édition, parue à Paris chez Le Normant en 1805, et qui réunit en un seul volume Atala et René, corrige le texte sur plusieurs points et constitue l'édition définitive.
Ce bref récit, n'excédant pas une quarantaine de pages dans la plupart des éditions, a été composé à Londres, dans les dernières années du xviiie siècle, comme un épisode de la grande épopée des Natchez (1826), mais détaché de celle-ci et inséré comme histoire-exemple dans le Génie, pour illustrer le \"vague des passions\". Par ce
premier mal du siècle, Chateaubriand entend un état où d'\"inutiles rêveries\" sans objet font du jeune homme, dès lors qu'il n'a pas l'appui de la religion, un être solitaire, un exclu. Le ton rappelle parfois celui de MacPherson dans les poésies d'Ossian, la plainte celle du Werther de Goethe, le genre celui des Rêveries du promeneur solitaire de J.-J. Rousseau. Chateaubriand, avec le Senancour d'Oberman et le Nodier du Peintre de Salzbourg, instaure ici un Sturm und Drang français, un premier romantisme fondé sur des expériences très précises de l'auteur, enfant solitaire au château de Combourg, voyageur en Amérique et émigré en Angleterre. René a un côté autobiographique évident ; nombre de pages du récit trouveront un écho dans divers passages des Mémoires d'outre-tombe, bien que Chateaubriand y semble désavouer l'histoire de son héros : \"Si René n'existait pas, je ne l'écrirais plus\" (livre XIII).
Quoi qu'il en soit, René est un des textes fondateurs du romantisme français ; il établit le mythe du héros romantique, son désir d'infini et sa frustration de voir se fermer, l'une après l'autre, les issues vers un bonheur terrestre. Nombreux sont ceux qui s'y référeront : Alfred de Musset, dans la Confession d'un enfant du siècle (I, 2) parlera de la << désespérance » que Chateaubriand \"avait placée sur un autel de marbre\". Nombreux sont ceux, également, qui se passionneront pour le style poétique de René, pour ses métaphores et ses comparaisons (\"Les sourdes clameurs qu'on entendait au dehors [d'une église] semblaient être les flots des passions et les orages du monde qui venaient expirer au pied du temple du Seigneur\" ), pour son rythme qui souvent s'organise autour d'une césure, formant un contraste ou un paradoxe (\"Inconnu, je me mêlaisà la foule : vaste désert d'hommes»), ou encore pour la musicalité de l'expression.
Vers 1725, René, qui a été adopté par les Indiens Natchez de Louisiane, raconte au vieux sachem Chactas et au père Souël de la colonie française « non les aventures de sa vie, puisqu'il n'en avait point éprouvé, mais les sentiments secrets de son âme », à l'origine de son éternelle mélancolie. Après avoir failli coûter la vie à sa mère en naissant, après une enfance « loin du toit partemel », (adolescent a vécu auprès de sa sœur Amélie des années de « rêveries enchantées », d'exaltation et de « délire ». Saisi par ce mal inexplicable qui le ronge encore, il a cherché dans les voyages un apaisement et un remède. Mais de retour dans sa patrie, il s'est senti exclu plus que partout ailleurs, d'autant que sa sœur chérie paraissait elle même fuir sa présence.
«
à la foule : vaste désert d'hommes» ),
ou encore pour la musicalité de
l'expression.
Vers 1725, René, qui a été adopté par les
Indiens Natchez de Louisiane, raconte au vieux
sachem Chactas et au père Souël de la colonie
fr ançaise « non les aventures de sa vie, puisqu' il
n'en avait point éprouvé, mais les sentim ents
secrets de son âme », à l'origine de son éternelle
mélancolie.
Après avoir failli coûter la vie à sa
mère en naissant, après une enfance « loin du
toit partemel », l'adolescent a vécu auprès de sa
sœur Amélie des années de « rêveries enchan
tées », d'exaltation et de « délire ».
Saisi par ce
mal inexplicable qui le ronge encore, il a cherché
dans les voyages un apaisement et un remède.
Mais de retour dans sa patrie, il s'est senti exclu
plus que partout ailleurs, d'autant que sa sœur
chérie paraissait elle même fuir sa présence.
Après l'échec d'un «exil champêtre » qu'il espé
rait salvateur, dégoûté de tout et décidé à en finir
avec une existence insignifiante, René, en prenant
ses dispo sitions testamentaires, retrouve pour
tant Amélie pour une brève et dem ière période
d'int imité.
Mais \.ln matin, Amélie disparaît et se
réf ugie dans un couvent pour prendre le voile.
Désespéré, le jeune homme s'embarque pour
l'Amérique où une lettre lui apprendra la mort
de sa sœur, décédée « comme une sainte ».
Le père Souël, qui a « écouté d'un air austère
l'hist oire de René », en a tiré une leçon de
morale sans complaisance : «j eune présomp
tueux ( ...
], la solitude est mauvaise à celui qui n'y
vit pas avec Dieu », à laquelle fait écho un dis
cours de Chactas : « Il n'y a de bonheur que
dans les voies communes.
» Les trois hommes
périront « peu de temps après, dans le massacre
des Français et des Natchez à la Louisiane ».
Considéré comme une autobiogra
phie déguisée, René est une confession
surprenante, non de sentiments inces
tueux entre frère et sœur (pourtant for
mulés clairement dès la première édi
tion), dont on ne sait strictement rien
sur le plan réel et qui ne forment pas
le nœud des problèmes soulevés par le
texte, mais d'un rapport du moi au
monde révélateur de la situation de
Chateaubriand vers 1800, et qu'il faut
comparer à ce qu'il en dit dans les Mémoires.
En tant que récit romanes
que, cependant, le texte donne à voir
une vérité, c'est-à-dire une expérience
et des sentiments, qui confère à René
une valeur d'un ordre plus général que
la seule perspective autobiographique :
en effet, en l'insérant dans le Gén ie, il
engage le récit, avec toute son expé
rience du monde révolutionné et hos
tile, dans une action à portée sociale et
politique.
René devient ainsi l'incarna
tion de la défaite et de l'aliénation de
toute une partie des Français à l'épo
que de Chateaubriand.
Ce n'est pas la
seule Régence, cadre de la vie sociale de
René, qui est visée, mais surtout l'épo
que révolutionnaire, qui a vu « la des
truction des monastères et les progrès
de l'incrédulité », néfastes à un esprit
tel que René.
Esquissé avant la conver
sion de Chateaubriand vers 1800, mais
publié dans l'ouvrage sorti de cette
conversion , René est donc tout à la fois
personnellement vrai comme témoi
gnage de ce qu'a ressenti l'auteur dans
son désarroi, et idéologiquement voulu
en tant que pièce à conviction dans le
procès contre l'incrédulité.
Chateau
briand assume cette ambivalence en
introduisant René, dans le chapitre.
»
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