« René » de Chateaubriand (fiche de lecture)
Publié le 24/05/2011
Extrait du document
« Un épisode du Génie du Christianisme, qui fit moins de bruit alors qu' Atala, écrit Chateaubriand, a déterminé un des caractères de la littérature moderne ; mais, au surplus, si René n'existait pas, je ne l'écrirais plus. « Ce petit roman de René (1804), fragment des Natchez et d'abord destiné à servir d'exemple au chapitre du Génie intitulé Du vague dans les passions, est un des chefs-d'oeuvre du roman d'analyse. C'est l'étude d'une disposition de l'esprit qu'il allait en effet contribuer à répandre : la mélancolie. Cette mélancolie a pour signe distinctif d'être sans cause. René désespère de la vie avant de lui avoir rien demandé et d'en avoir éprouvé aucune déception : c'est un lutteur vaincu avant la lutte. « Combien vous aurez pitié de moi !... dit-il à Chactas. Que mes éternelles inquiétudes vous paraîtront misérables !... Vous qui avez épuisé tous les chagrins de la vie, que penserez-vous d'un jeune homme sans force et sans vertu qui trouve en lui-même son tourment et ne peut guère se plaindre que des maux qu'il se fait à lui-même ? «
«
bonheur et périra dans le massacre des Français et des Natchez en Louisiane : « On montre encore un rocher où ilallait s'asseoir au soleil couchant » (p.
174).
Ce dernier épisode est le sujet des Natchez.• Une confidence autobiographique : René est une transposition des années que Chateaubriand passa en Bretagneprès de sa soeur Lucile.• Du vague des passions : l'être, dévoré par ses fantasmes, s'abandonne à la contemplation de la nature et àl'univers morbide de ses chimères.
Cette maladie de la personnalité, ce « mal du siècle », est un état d'âmeentretenu par l'environnement : les vents, les orages, la nuit.
Les rumeurs du coeur trouvent leur écho dans lanature.• Le style : Chateaubriand excelle par son style à suggérer cette torpeur passionnée : « Le jour, je m'égarais sur degrandes bruyères terminées par des forêts.
Qu'il fallait peu de chose à ma rêverie !» (p.
152).
En écrivant René, Chateaubriand n'imagine pas à quel point son personnage influencera la jeunesse et la littérature.Selon Théophile Gautier, Chateaubriand « invente la mélancolie et la passion moderne ».
Le mal de René devient « lemal du siècle ».
On le retrouve chez les poètes romantiques et chez Baudelaire.
René, perpétuellement en quête de l'infini, émigré en Amérique, où il livre les secrets de son âme à un prêtremissionnaire et à un vieil Indien Natchez.
A la poursuite des chimères
René, qui a fui l'Europe, trouve refuge en Amérique dans une tribu d'Indiens Natchez.
Son père adoptif, Chactas, etle père missionnaire Souël invitent le jeune homme à ouvrir son cœur.
Tout au long du roman, René raconte sa vie.Sa naissance coûta la vie à sa mère.
Il fut élevé dans le château paternel avec sa sœur Amélie, la seule femme qu'ileût jamais aimée.
A la mort de son père, René, dérouté, fut attiré par la vie monastique.
Puis il décida de voyageren Italie, en Grèce, en Angleterre, mais ces péripéties n'apaisèrent pas les douleurs de son âme.
De retour enFrance, il s'installa dans un faubourg de Paris, où il fut confronté à l'ennui, puis à la campagne, où la nature et lessaisons le plongèrent dans des rêveries exaltées.
Sa sœur le quitta pour la vie religieuse et mourut peu de tempsaprès.
René décida alors de fuir l'Europe et embarqua à Saint-Malo pour l'Amérique.
Le roman s'achève sur unjugement sévère du père Souël, qui tire la morale de cette histoire.
Du « vécu » à la fiction
En 1802, Chateaubriand publie Le dénie du christianisme.
L'illustration d'un chapitre sur le « vague des passions » en sera détaché, en 1805, pour devenir René et être réuni à Atala.
François-René de Chateaubriand fut un adolescent rêveur et mélancolique.
Les longues journées tristes et mornes passées entre son père, sa mère et sa sœur Lucileau château de Combourg amenèrent l'écrivain à se replier dans une orgueilleuse solitude, où il se laissa aller à sesrêveries.
Chateaubriand écrivit René en 1793, lors de son exil à Londres.
Il semblerait qu'il s'y remémore les états d'âme de sa jeunesse.
On y retrouve la nature, la mort, l'exaltation du moi comme dans les Mémoires d'outre- tombe, qui est un récit autobiographique.
Cependant, si René prend ses racines dans le « vécu », on ne peut nier le caractère fictif du roman, et c'est sans doute grâce à ce lien entre le réel et l'imaginaire que Chateaubriand sutadmirablement retranscrire les sentiments d'un jeune homme tourmenté..
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