RABELAIS: Le Quart Livre (Fiche de lecture)
Publié le 20/11/2010
Extrait du document
«À propos, dans tous les champs où ils pissent, le blé croît comme si Dieu y eût pissé. Il n'y faut d'autre marne ni fumier. Il y a bien plus. De leur urine les alchimistes tirent le meilleur salpêtre du monde. Avec leurs crottes (sauf votre respect) les médecins de nos pays guérissent soixante-dix-huit espèces de maladies dont la moindre est le mal de Saint-Eutrope de Saintes ; puisse Dieu vous en garantir et préserver ! Qu'en pensez-vous, vous, notre voisin, mon ami ?« (Ch. 7)
«
grande gueule infernale, nous ne serons pas plus qu'un grain de dragée musquée dans la gueule d'un âne.Voyez-le ici.
Fuyons, regagnons la terre.
Je crois que c'est le monstre marin même qui fut jadis destiné àdévorer Andromède.
Nous sommes tous perdus.
Oh! si seulement quelque vaillant Persée se trouvait ici pour letuer immédiatement.
— Percé de part en part, il le sera par moi, répondit Pantagruel.
N'ayez crainte.»
(Ch.
33)
L'EXPLORATION IMAGINAIRE
- Les récits de voyages faits par les explorateurs de terres nouvelles connaissaient une grande vogue àl'époque de Rabelais ; ainsi par exemple, le récit de Jacques Cartier, explorateur du Canada, paraît en 1545.Rabelais s'en inspire, en transposant dans une géographie imaginaire les itinéraires des explorateurscontemporains.
La première escale de la Thalamège manifeste d'emblée ce caractère fictif des lieux traversés puisqu'elle se nomme l'île de Medamothi, qui signifie «nul lieu» en grec.
Genre issu des épopées antiques comme l'Odyssée (viiie siècle avant J.-C.) ou L'Énéide (Ier siècle avant J.-C.), le récit de voyages imaginaires abonde en descriptions de lieux fabuleux et de coutumes étonnantes.
Lescompagnons de Pantagruel abordent ainsi l'île des Alliances ou île Ennasin dont les habitants ont la doubleparticularité d'avoir «le nez en as de trèfle» et de se marier selon des parentés linguistiques.
Aussi lesvoyageurs assistent-ils au mariage de la poire et du fromage :
«Après avoir considéré avec curiosité le site de l'île et les mœurs du peuple Ennasé, nous sommes entrés dansun cabaret pour nous rafraîchir un peu.
On faisait là les noces à la mode du pays.
Du reste, on y faisaitbombance.
En notre présence eut lieu le joyeux mariage d'une poire, femme bien gaillarde, à ce qu'il noussemblait (toutefois ceux qui en avaient tâté la disaient mollasse), avec un jeune fromage au poil follet, un peurougeaud.»
(Ch.
9)
Dans les îles de Tohu et Bohu, les voyageurs découvrent Bringuenarille, un avaleur de moulins à vent (ch.
17).Le vieux Macrobe, qui vient les accueillir dans l'île des Macréons (c'est-à-dire des vieillards), leur montre lesruines antiques du pays dans une forêt où séjournent les Héros après leur mort (ch.
25-26).
Quant auxhabitants de l'île de Ruach, ils subsistent en se nourrissant exclusivement de vent (ch.
43).
Mais la description ethnographique de moeurs étranges n'est pas toujours gratuite.
À maintes reprises, ellemêle au plaisir du dépaysement celui de la satire.
2.
L'ALLÉGORIE SATIRIQUE 3.
Le navire de Pantagruel passe au large de l'île de Tapinois, où règne Carêmeprenant, «grand avaleur de pois secs»(ch.
29).
Cet homme «d'une grande dévotion [qui] pleure les trois quarts de la journée» n'est autre que lapersonnification du Carême, période de jeûne et de pénitence de quarante jours qui commence au lendemain duCarnaval (ou Mardi-Gras) et s'achève avec Pâques.
Depuis le Moyen Âge, des Jeux de carnaval mettent en scène lecombat de Carnaval et de Carême, puis la défaite de Carême, banni de la terre sauf pendant quarante jours.
Rabelais s'inscrit donc dans cette tradition carnavalesque, lorsqu'il figure «l'anatomie et la description deCarêmeprenant» (ch.
30-32) et raconte la guerre qui oppose les Andouilles à Carêmeprenant (ch.
35).
La tonalité satirique est également sensible dans l'épisode des Papefigues (ch.
45-47) et des Papimanes (ch.
48-54).
Les Papimanes (c'est-à-dire, ceux qui ont la manie du pape) s'agenouillent devant les voyageurs, qui leurremontrent que de tels honneurs ne sont dus qu'à Dieu.
Feraient-ils la même chose au Pape ?
«Si, nous ferions davantage, si, répondirent-ils.
Cela est déjà calculé entre nous.
Nous lui baiserions le cul sansfeuille, et les couilles pareillement.
En effet, il a des couilles le Saint-Père, nous le savons par nos belles Décrétales,sans cela, il ne serait pas Pape.» (Ch.
48)
À travers cette présentation ironique de l'idolâtrie pontificale, qui fait suite à une description non moins railleuse del'austérité des Papefigues (ceux qui ont fait la figue au pape, c'est-à-dire les protestants) on reconnaît bien sûr lestensions qui déchirent l'époque.
En 1548-1552, date où Rabelais écrit son Quart Livre, l'heure n'est plus aux projets sereins des humanistes conquis aux idées évangélistes d'Érasme ou de Marguerite de Navarre et rêvant de modifierde l'intérieur les pratiques et les moeurs de l'Église.
Ce sont désormais des positions extrêmes qui sont aux prises, etla plume de Rabelais n'épargne ni les uns ni les autres, sans se départir du masque protecteur — quoiquetransparent — de l'allégorie..
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- RABELAIS: Le Tiers Livre (Fiche de lecture)
- Méthode : Faire une fiche de lecture
- Fiche lecture Fables de La Fontaine, livre 7, résumé
- Fiche de lecture: Les Fables de La Fontaine (livre par livre)
- Le Premier Livre des Antiquitez de Rome... plus un Songe... : Fiche de lecture