PUISSANCES DE L’ABSTRACTION (Les) Frédéric Paulhan (résumé)

Essai du philosophe Frédéric Paulhan (1856-1931), publié en 1928. Il se rattache étroitement à l’ensemble des travaux de l’auteur : il en forme aussi la synthèse la plus accessible. Partons d’abord d’un état de conscience quelconque : par lui-même, il tend à se conserver. Mais des forces hostiles (perceptions du monde extérieur, poussées intérieures de nos idées et de nos désirs) l’en empêchent. Aucune expérience psychique ne survit donc intacte dans la mémoire ; certains éléments s’en détachent, subsistent en nous, mais tendent aussi à recréer l’état originel perdu : « ils forment une sorte de système préhenseur qui va happer, dans le torrent des faits psychiques, ce qui peut lui servir à reconstituer l’état disparu ». Tel est le grand fait de la dissociation mentale, dont l’abstraction, en son sens rigoureux, n’est qu’un cas particulier. De l’incessante décomposition des états d’âmes naissent sans cesse des états d’âme nouveaux. Le retour au passé est en effet difficile, impossible la reconstitution exacte d’un état de conscience perdu ; aussi le processus de reproduction tourne-t-il en un processus de substitution. « A la place des éléments disparus qui ne peuvent renaître, sous la poussée de sentiments, de tendances, d’idées qui ne pourraient s’en accommoder, de nouveaux éléments s’installent pour remplir leur fonction, et pour la remplir autrement qu’eux, et parfois de façon très différente ». C’est donc, paradoxalement, par une tentative de retour sur le passé que l’esprit s’engage vers l’avenir : « Par l’impuissance de faire durer le présent et de rappeler le passé, mais aussi par besoin de satisfactions nouvelles et encore inéprouvées,