Propos d'Alain
Publié le 30/03/2013
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C'est à l'occasion de l'a ffaire Dreyfus - dont il fut un des partisans - qu 'Alain fit ses débuts dans le journalisme ; agrégé de philosophie depuis 1892, il était un homme de gauche, radical, sans être pourtant un homme de parti. Être radical , pour Alain , c'éta it se méfier de tous les maîtres et lutter contre toutes les censures et les tyranniqes.

«
Alain donnant son
cours au Lycée
Henri IV, en 1932
EXTRAITS
Il faut se méfier des jugements trop
hâtifs.
Et pour cela, il faut savoir
observer la réalité.
Alain se
sert ici de
l'exemple
du peintre pour montrer
qu'il faut savoir observer les hommes
afin de ne pas les classifier
et les
étiqueter en des catégories rigides
Un vrai peintre ne voit
pas un pont, une mai
son, un arbre, un livre,
une carafe, comme
vous et moi ;
il ne voit
que des couleurs qui
passent les unes dans
les autres, ou qui sont
limitées les unes
par
les autres.
Remarquez
que
nul ne voit autre
chose que cela ; mais
nous
n'en savons rien.
Nous ne remarquons
point cette première
apparence, parce que
notre affaire est de
la surmonter.
Quand
nous reconnaissons au
loin la puissante voi
ture, nous ne la voyons
point petite, comme
' elle apparaît ; nous savons que
c'est une
grosse voiture; nous croyons
la voir telle.
Au contraire le peintre dissout plus ou
moins toutes ces idées-là ; il ne demande
pas ce que
c'est; ainsi nous retrouvons sur
sa toile notre premier regard et la jeunesse
de notre œil.
Propos de littérature,
Éditions Gonthier, 1934
Reconnaître l'autre et défendre sa
personnalité,
c'est renforcer sa liberté
comme on préserve la sienne propre.
Par conséquent ...
L'esprit de révolte est tout bon.
C'est le vé
ritable esprit de société.
Et voici comment.
L'esprit de révolte est esprit, c'est-à-dire universel.
Nul ne pense
pour soi seul.
Penser librement,
c'est chercher l'accord,
et l'accord par liberté.
Il n'y a pas un esprit
libre qui
n'aime et ne cherche les esprits
libres.
C'est se mettre à la recherche du
semblable; c'est vouloir l'éveiller et
le re
connaître en toute forme humaine.
Dès que
l'on aime
la dispute de bonne foi, l'accord
est fait.
Celui qui me contredit,
je ne peux
point vouloir qu'il soit esclave, qu'il soit
flatteur,
qu'il soit vaniteux, qu'il ait peur
de tout.
Au contraire, c'est la hardiesse
d'esprit et le feu de l'invention que l'on
aime dans l'autre, comme on l'aime en soi
même.
« Le doute est le sel de l'esprit»
( ...
) Le vrai c'est qu'il ne faut jamais croire,
et
qu'ilfaut examiner toujours.( ...
) Croire
est agréable.
C'est
une ivresse dont il faut
se priver.
Ou alors
dites adieu à liberté,
à justice, à paix.
Il
est naturel et il est
délicieux de croire
que la République
nous donnera tous
ces biens ; ou , si la
République ne peut,
on veut croire que
Coopération, Socia
lisme, Communisme,
ou quelque autre
constitution nous per
mettra quelque
jour
de nous fier au juge
ment d'autrui, enfin
de dormir les yeux ou
verts comme
font les bêtes.
Mais non.
La
fonction de penser ne se délègue point.
Dès
que la tête humaine reprend son antique
mouvement de haut en bas, pour dire oui,
aussitôt les rois reviennent,
Gallimard, 1956
Dédicace d'Alain à
André Maurois, datée
du
26 novembre 1948
NOTES DE L'ÉDITEUR Après l'interruption de la guerre, les
Alain faisait confiance à son semblable ;
C'est vers 1906 qu'Alain prit l'habitude de
publier ses articles sous le titre général de
Propos, d'abord dans la Dépêche de Rouen,
puis dans une revue créée à cet effet, Libres
Propos,
et dans la Nouvelle Revue
française.
En 1914 , il avait déjà écrit plus
de trois mille
«Propos ».
Ces textes furent
ensuite publiés par divers éditeurs, en ordre
chronologique ou regroupés par
thèmes.
I, 2.
3.
4.
5 Rogc r- Viollc t
Libres Propos - environ deux mjlle textes -
couvrirent la période de 1922 à 1935 .
Ils ont
été réunis, pour la première édition, dans
des volumes thématiques tels que
Propos
sur
le bonheur, Propos sur l'éducation ou
Esquisses de l'homme.
« Les Propos sont œuvres de journaliste,
mais
d'un journaliste qui entendait relever
sa profession
au niveau de l'humanité .( ...
)
il croyait de son devoir d'écrire pour tous.
Il estimait qu'il n'y a point d'homme qu'on
ne puisse informer, qu'on ne puisse porter
à réfléchir,
qu'on ne puisse même conduire
aux idées les plus élevées, pourvu
qu'on
sache lui parler.
» A.
Bridoux, Alain, sa vie,
son œuvre, PUF, 1964.
ALA I 02.
»
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