PRINTEMPS (le). Recueil poétique de Théodore Agrippa d'Aubigné (résumé & analyse)
Publié le 07/11/2018
Extrait du document
Témoignant d'une nette influence pétrarquiste, les sonnets empruntent largement à la thématique précieuse des poètes italiens de la fin du xve siècle et du début du xvie - Tebaldeo, Serafino et Sasso. Les stances illustrent un autre aspect de l'influence italienne : d'Aubigné, en inscrivant le désespoir amoureux dans une mise en scène fantastique, obsessionnelle et macabre, pratique la disperata, genre largement cultivé par Serafino et Tebal-deo, et introduit en France par les Des-perades (1568) de François d'Amboise. Quant aux odes, elles se distinguent moins des stances par leurs caractéristiques formelles que par leur inspiration générale : le ton y est nettement moins dramatique, et les pièces légères abondent où d'Aubigné imite le Ronsard du Livret de fo lastries (1553).
PRINTEMPS (le). Recueil poétique de Théodore Agrippa d'Aubigné (15521630), composé vraisemblablement entre 1571 et 1573, et publié dans l'édition des. Œuvres complètes par Réaume et Caussade à Paris, chez Lemerre en 1874.
La plus grande partie de ces poèmes furent inspirés par la passion malheureuse de l'auteur pour Diane Salviati, nièce de la Cassandre de Ronsard. C'est en 1571, après la fin de la troisième guerre de Religion, que le jeune d'Aubi-gné, installé dans sa propriété des Lan-des-Guinemer, rencontra la jeune fille ; une promesse de mariage fut conclue, mais les Mémoires du poète nous apprennent que le père de Diane « rompit le mariage sur le différend de la religion » (voir Sa vie à ses enfants, publiée seulement en 1729). Appelé comme écuyer auprès d'Henri de Navarre, d'Aubigné ne devait revoir qu'une fois Diane, qui mourut quelque temps après. Les sonnets, les odes et les stances qui composent le Printemps ont donc vraisemblablement été écrits à cette époque.
«
Témoignant
d'une nette influence
pétrarquiste, les sonnets empruntent
largement à la théma tique précieuse
des poètes italiens de la fin du
xve siècle et du début du xvie -Tebal
deo, Serafino et Sasso.
Les stances illus
trent un autre aspect de l'influence ita
lienne : d'A ubigné, en inscr ivant le
dése spoir amoureux dans une mise en
scène fantastique, obsessionnelle et
maca bre, pratique la disperata, genre
largement cultivé par Serafino et Tebal
deo, et introduit en France par les Des
perades (1568) de François d'Amboise.
Quant aux odes, elles se distinguent
moins des stances par leurs caractéristi
ques formelles que par leur inspiration
générale : le ton y est nettement moins
dramatique, et les pièces légères abon
dent où d'Aubigné imite le Ronsard du
Livret de folastries (1553).
Les 1 00 sonne ts fonnan t « l'Hécatombe à
Diane » -«je brusle avecq'mon ame et mon
sang rougissant 1 Cent amour eux sonne tz don
nez pour mon marti re» (XCVI) -n'évoq uent
qu 'except ionnelle ment des momen ts d'in timité
heur euse entre les amants (XXIII, XXVI, XXXI).
Le plus souvent, le poète reproche à Dia ne ·sa
sévérité et son injus tice (LXXX IX, XCIV) , et
gémit sur l'imp ossibilité de leur union : « Mais
quel malheur , pour quoy, 1 À mon vouloir
br uslan t ton vouloir ne resse mble ? » (XLI II).
Ce
désespo ir amour eux, constam ment avivé par les
pe rfec tions de la jeune fille (VI, XXXII), condui t
tantôt à l'idée du suicide (LXI), tantôt à un maso
chisme obsessionnel et vo lup tueux : « Mais mou
ri r c'es t trop peu, je veux languir tousjours, 1
Bo ire et succer le fiel, rire d'impatience, 1
M'endonnir sur les pleur s de ta meurtriere
absence » (XLVI II).
Les stances évoqu ent l'errance de l'amant, sa
recherche solitaire d'un décor sauvage et sinis tre.
Au fond de sa retraite, il pla ce le portrait de
Diane dans un squele tte, pour manif ester symbo
liqu emen t la puis sance meurtrière de l'amour (1).
La douleur qu'il éprouve gagne par contagion la
nature tout entière : « L'air a serré mes pleurs en
noir s et gros nuages 1 Pour crever à mi snuic t de
gr esles et d'or ages » (IV).
Les malédictions et
impr écations contre Diane s'accumulen t (V, XIV) , jusqu'à
l'évocation douloureuse de la mort de la
jeune fille (XIX) .
La section des odes est la plus hétéroclite : si
elle perpétue l'inspira tion dram ati que des deux
li vres précédents (Xli, XV I, XVI I, XVI II), les pièces
lé gères l'emport ent largem ent - épithalames
(XV, XXX), adresse à une « maquer elle » (X XI),
à une calomnia trice qui l'a desservi auprès de
Dia ne (XX IV), et même chanson à boir e très
obscène (XL VI).
Dans Sa vie à ses enfants, d'Aubigné
évoque en ces termes la genèse et la
tonalité générale du Prin temps : « Cet
amour luy mist en la teste la poesie
fr ançoise >>, et lors il com posa ce que
nous appelons son Printemps, où il y a
plusieurs choses moins polies, mais
quelque « fureur » qui sera au gré de
plusie urs.
La déclaration est d'impor
tance, illu strant le double rapport
d'él oignement et de proximité que
l' auteur, dans ses vieux jours, entre
tient avec cette œuvre d'extrême jeu
nesse.
Pour le combattant huguenot, le
Prin temps ne peut guère constituer
qu 'une coupable d iversion aux nécessi
tés de l'ach arnement militant : «L e
luth que j'accordais avec mes chanson
nettes, 1 Est ores estouf fé de l'esclat des
trompettes » (*Tragi ques, "Misères",
v.
73-74 ).
Le recueil brasse en effet les
lieux communs d'une érotique pré
cieuse, et n'en évite pas toujours les
écueils amphigouriques : l'imitation
des épigones les plus tardifs du pétrar
quisme condamne plus d'une fois le
poète à des raffinements et des suren
chères d'une irritante verbosité.
Mais le Prin temps ne se réduit pas à
une orchestration de figures et de ter
mes convenus : enveloppant la rhétori
que pétrarquiste dans l'expérience
toute récente de la guerre, la « fureur »
du poète exacerbe ou distord les clichés
selon la loi d'une fantasmatique toute
person nelle.
Soucieux de réactiver le
lexique galvaudé de la poésie amou
reuse, d'Aubigné l'inscrit dans une.
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- AVENTURES DU BARON DE FAENESTE (Les) de Théodore Agrippa d’Aubigné (résumé & analyse)
- POÈMES SATURNIENS. Recueil poétique de Paul Verlaine (résumé et analyse de l'oeuvre)
- Fleurs DU mal (les). Recueil poétique de Charles Baudelaire (résumé de l'oeuvre & analyse détaillée)
- Champs magnétiques (les). Recueil poétique en prose d'André Breton (résumé de l'oeuvre & analyse détaillée)
- CORNET À DÉS (le). Recueil poétique de Max Jacob (résumé de l'oeuvre & analyse détaillée)