POÉSIE POPULAIRE RUSSE.

POÉSIE POPULAIRE RUSSE. Les

chansons russes sont justement célèbres : elles étonnent par leur richesse déconcertante, leur exquise qualité, elles sont, avec les Proverbes ( Proverbes russes), un des plus sûrs moyens à notre disposition pour pénétrer l’âme nationale. Leur harmonie avec cette âme est assez prouvée par le fait qu’elles subsistent encore dans les campagnes, malgré la disparition des rhapsodes au siècle dernier. Pourtant les chansons populaires ne sont point sorties spontanément de quelque inconscient collectif ; elles ne sont pas nées au village. Si l’on y parle de palais, si l’on y trouve des traits de mœurs ou des détails domestiques que des moujiks n’auraient jamais pu imaginer de leurs isbas, c’est qu’elles furent d’abord la création de milieux aristocratiques. Le peuple reçut, assimila le folklore, il n’en est pas l’auteur. Mais les communications furent souvent très rapides, encore facilitées par la communion étroite qui existait en Russie jusqu’au xviiie siècle, entre les classes nobles et le reste de la société, les serfs vivant dans la familiarité des maîtres, participant à toutes les distractions de ces derniers. Au cours des siècles, du fait des transmissions orales, les chansons furent sans doute mutilées, mais guère modifiées, car le texte est lié organiquement à la création musicale, qui ne variait pas. La notation des chansons populaires n’eut lieu que fort tard, à la fin du xviiie et au début du xixe siècle, ce qui rend vaine toute tentative pour fixer, même approximativement, la date de ces pièces. Le xve et le xvie siècles furent riches de nombreux fragments lyriques et épiques, mais un très petit nombre fut noté à l’époque (par exemple, une chanson sur la prise de Kazan, qui inspira plus tard la chanson populaire de la bataille de Poltava).