POÈMES SATURNIENS. Recueil poétique de Paul Verlaine (résumé et analyse de l'oeuvre)
Publié le 27/10/2018
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POÈMES SATURNIENS. Recueil poétique de Paul Verlaine (1844-1896), publié à Paris chez Alphonse Lemerre en 1866. Onze poèmes avaient auparavant paru en revue : en 1863, \"Monsieur Prudhomme\" dans la Revue du progrès moral; en 1865, \"Dans les bois\"
et \"Nevermore\" dans l'Art, \"Il Bacio\", \"Cauchemar\", \"Sub urbe\", \"Marine\", \"Mon rêve familier\", \"Angoisse\" dans le Parnasse contemporain, \"Nuit du Wal-purgis classique\" et \"Grotesque\" dans la Revue du xixe siècle.
Les Poèmes saturniens constituent le premier recueil publié par l'auteur, qui avait tout d'abord songé à l'intituler Poèmes et Sonnets. Les traits dominants de l'esthétique verlainienne - qui culminera dans les Romances sans paroles (1874) avant le retour, avec Sagesse, à des formes poétiques plus conventionnelles - y sont déjà très affirmés. L'ouvrage parut cependant dans l'indifférence générale. Les rares critiques dont il fit l'objet furent dans l'ensemble malveillantes et les Poèmes saturniens restèrent ignorés pendant une vingtaine d'années.
Après un poème liminaire qui explique le titre, le recueil s'ouvre sur un long “Prologue\" en alexandrins consacré au poète, à la permanence de son art et au caractère sacré de sa mission : « Le Poëte, l'amour du Beau, voilà sa foi, / L'Azur son étendard, et l'Idéal, sa loi ! » Vient ensuite une première partie, intitulée « Melancholia », que Verlaine avait sans doute songé un moment à isoler pour la publier en plaquette. Elle comporte huit poèmes, dont sept sont des sonnets et figurent parmi les textes les plus fameux du poète, notamment “Nevenmore\", “Après trois ans\", “Lassitude\" et “Mon rêve familier''. La deuxième section, « Eaux fortes », comprend cinq poèmes aux fonmes variées, certains, comme “Cauchemar\" (Il) et “Marine\" (Ill), mêlant divers types de mètres, souvent impairs, confor mément à “l'Art poétique\" que le poète énoncera plus tard (Jadis et Naguère, 1884). La troi sième partie, intitulée « Paysages tristes » et formée de sept poèmes, privilégie, ainsi qu'en témoignent certains titres, les moments de déclin : celui du jour avec “Soleils couchants\" (I), “Crépuscule du soir mystique\" (Il), “l'Heure du berger\" (VI) ; ou bien celui de l'année avec “Chanson d'automne\" (V). La quatrième section, « Caprice », contient cinq poèmes, dont le ton humoristique va de la badinerie galante (“Femme et Chatte\", I) à la satire (“jésuitisme\", Il, “Mon
«
sieur
Prudhomme", V).
Vien t ensu ite une série
de douze poèmes dépourvus d'un titre commun
et non numér otés, de formes et d'inspir ations
di verses, génér alemen t en alexandrins.
Le recueil
se clôt sur un « Épilo gue ».
cons titué de trois
poèmes, dans lequel Verlaine dévoile sa concep
tion de la création poétique.
Le poème liminaire définit en ces ter
mes l'« influence maligne >> qui préside
à la destinée du poète : « Or ceux-là qui
sont nés sous le signe SATURNE, 1 Fauve
planète, chère aux nécromanciens, 1
Ont entre tous, d'après les grimoires
anciens, 1 Bonne part de malheurs et
bonne part de bile.
1 L'Imagination,
inquiète et débile, 1 Vient rendre nul
en eux l'effort de la Raison.
» Rien de
romantique, toutefois, dans cette fata
lité .
Verlaine souligne avec ironie la
distance qui 1� sépare par exemple d'un
Lamartine ( « Epilogue », III), et semble
plutôt en accord avec l'esthétique par
nass ienne : « Ce qu'il nous faut à nous
les Suprêmes Poëtes 1 [ ...
] À nous qul
ciselons les mots comme des coupes 1
Et qui faisons des vers émus très froide
ment, 1 [ ...
] C'est l'Obstination et c'est
la Volonté ! » (ibid.
).
L'ironie latente de
certains vers invite toutefois à considé
rer avec circonspection une telle allé
geance.
En réalité, cette poésie ne res
semble à aucune autre et, en dépit du
caractère composite du recueil et de la
facture encore conventionnelle de cer
tains poèmes, les Poèmes saturniens
témoi gnent de l'originalité et de la
modernité de la voix verlainienne.
Cette voix, le po ète la caractérise lui
même dans "Sérénade" : « Ma voix
aigre et fausse.
» Privilégiant le déhan
chement et la rupture, le vers se
modèle au rythme des sons plus qu'il
ne se plie à la logique du sens et engen
dre ainsi des harmonies inhabituelles,
de surprenants effets de claudication
syntaxique.
C'est sans doute "Chanson
d' auto mne" (« Paysages tristes», V) qui
va le plus loin dans cette voie.
Asso- nances
et allitérations se mêlent pour
engendrer un flux lancinant et grin
çant à la fois.
La brièveté des vers
scinde la lecture, de multiples pauses
retardant l'avènement du sens et lais
sant le poème dans un constant sus
pens : « Les sanglots longs 1 Des vio
lons 1 De l'automne 1 Blessent mon
cœur 1 D' une langueur 1 Monotone.
»
L' angoisse, jamais nommée mais mani
festée à travers diverses expressions -
«T out suffocant », «Je pleure » -est
ainsi d'autant plus efficacement
communiquée.
Univers de la sensation, de l'impres
sion et du rêve, les Poèmes saturniens
procèdent par touches successives plu
tôt qu'ils n'obéissent à une continuité
narrative ou à une logique descriptive,
à l'exception de quelques pièces telles
que "Nocturne parisien ", "Ma rco",
"C ésar Borgia" ou "la Mort de Phi
lippe Il".
Ainsi, dans "Après trois ans"
(« Melancholia », III), le paysage d'un
ja rdin se constit ue peu à peu mais
de meu re morcelé, formé d'élémen ts
auton omes que le poème se borne à
mettre côte à côte : une « humble ton
nelle », un «jet d'eau », un «vieux
tremble », des «roses », de «grands
lys », des.
»
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