Pierre et Jean, Maupassant (résumé & analyse)
Publié le 25/11/2018
Extrait du document
Pierre et Jean
Dans la Préface de Pierre et Jean au titre simple et ambitieux, Maupassant pose quelques jalons esthétiques, énonce avec sa force habituelle son propos — « Je veux m’occuper du Roman en général » — et tente de cerner tout un genre littéraire : « Existe-t-il des règles pour faire un roman? » Enfermés dans leurs conceptions trop étroites, les critiques seront jugés incompétents pour en décider et la notion d’école se trouvera supplantée par la liberté totale des écrivains qui ont « le droit absolu, indispensable de composer, c’est-à-dire d’imaginer ou d’observer suivant leur conception personnelle de l’art ». C’est là mettre en avant l’originalité — Maupassant dit aussi « le tempérament » ou la « manière nouvelle » — issue de l’enseignement du maître, Flaubert, longuement remercié ici et dont un des conseils aurait été : « La moindre chose contient un peu d’inconnu. Trouvons-le ». Mais, parce que le regard de chaque créateur doit être personnel, le pessimisme pointe; l’écriture sépare des autres et du monde : « l’objectivité (quel vilain mot) » n’existe pas; « quel enfantillage, d’ailleurs, de croire à la réalité ». N’est-ce pas là déboucher sur le solipsisme et se séparer du réalisme?
Même s’il témoigne d’une absence complète de dogmatisme, même s’il dévoile une attitude mitigée envers le symbolisme (en 1887, Verlaine, Mallarmé et Laforgue sont connus), jugé « respectable » et intéressant par sa proclamation de « l’extrême difficulté de l’art », égratigné implicitement pourtant au niveau stylistique à côté de l'écriture artiste pour son manque de clarté, Maupassant ne s’en réfère pas moins au réalisme, cette école qui veut « faire vrai ». Est-ce renoncer à la vision personnelle de l’écrivain?
Maupassant répond, cultivant le paradoxe, que « les Réalistes de talent devraient plutôt s’appeler des Illusionnistes » qui dissimulent la structure de leur œuvre et même, à l’inverse des romanciers « d’analyse pure », « la psychologie, au lieu de l’étaler ». Tout en sachant donner l’illusion du réel, « les grands artistes sont ceux qui imposent à l’humanité leur illusion particulière ». On ne saurait rêver meilleure conciliation de l’objectif et du subjectif, plus claire définition de cet écrivain idéal auquel se réfère Maupassant, et qu’il tente d’être : un artiste réaliste
«
Powered by TCPDF (www.tcpdf.org)Maupassant : Pierre et Jean
INTRODUCTIONL'édition comporte, outre la célèbre Préface de Maupassant (voir les notes qui nous éclairent sur les conditions d'écriture du texte), desCommentaires et une bio-bibliographie.
On trouvera également un cahier d'illustrations (photographies des documents de l'époque ainsique des tableaux) qui devrait nourrir les débats sur le prétendu réalisme du texte, sur les références historiques possibles, sur les liensentre les images et le texte.
EXPLORATION
Cette fiche propose un travail en trois temps :1.
Une première découverte du texte : les élèves sont invités à relever des indices matériels qui fixent la lecture et en permettent lecontrôle.2.
L'utilisation de ces premières notes sur des sujets d'étude assez classiques pour des travaux d'exposés oraux ou écrits, individuels oupar groupes.3.
Une troisième recherche, plus sophistiquée (et sans doute réservée aux grandes classes) peut utiliser les Commentaires érudits et trèsélaborés afin d'approfondir les premières analyses.
Il s'agira alors de chercher à discuter de la validité des conclusions proposées parMarie-Claire Ropars-Wuillemier : c'est, en effet, seulement après avoir travaillé eux-mêmes le texte que les élèves pourront utiliser sescommentaires, pour apprendre à mener plus loin une interprétation et aborder certaines démarches des sciences humaines (comme lalecture psychanalytique, p.
202).
Pierre et Jean se prête particulièrement bien à ces allers-retours entre une première lectureapparemment naïve, un travail d'élaboration, et des études plus savantes qui font jouer le texte dans tous les sens possibles.Noter sans interprétation mais en relevant avec précision les pages et les termes employés :
1.
Chapitre par chapitre, les scènes qui constituent la trame du roman.
Leur donner des titres, ce qui permet de discuter le sens que l'ondonne à la scène et de repérer les personnages présents, les points de vue, etc.
; noter également les indications de temps et de lieu.2.
Relever les passages :— dans lesquels on voit les deux frères en position de rivalité (ex.
: p.
48), dans lesquels un seul des deux est représenté (ex.
: Pierre,p.
58 ou au début du chap.
II) ;— suggérant un parallèle entre deux personnages, sur quelque plan que ce soit ;— privilégiant d'une façon quelconque k point de vue d'un des personnages, ses pensées, etc.
;— traçant un portrait, esquissant la biographie d'un personnage;— où se marque une intervention de l'auteur.3.
Les éléments d'un thème à étudier :Sont intéressants, a priori, parce que très riches et permettant de travailler l'ensemble du roman : la mer et l'univers maritime ; bateauxet paquebots (décrits de façon réaliste ou utilisés symboliquement) ; la brume, le brouillard (pp.
92, 179, 193) ; la description sociale ;l'argent ; le rôle et la place des femmes (p.
115); les rapports sociaux.
En relevant avec précision les pages et les passages, nousdistinguerons le thème lui-même lorsqu'il est traité directement, ou les termes du lexique, les connotations et métaphores à traverslesquels il peut apparaître.
Ainsi, le thème de l'argent est souvent présent (ex.
: lorsqu'il s'agit de l'héritage), mais il apparaît aussi parallusion (lorsque, p.
37, il est question de « l'âme tendre de caissière » de Mine Roland ou même, p.
47, lorsque les personnages setrouvent « Place de la Bourse »).
EXPOSÉ
« Les procédés littéraires »
1.
Le traitement du tempsÀ reconstituer à partir du texte par le texte — voir le chap.
I, « Mardi » au début du mois d'août, puis avec quelques débordements sur leslimites des chapitres (ex.
: note p.
124) : chap.
II, la nuit de mardi à mercredi; chap.
III, mercredi; chap.
iv, jeudi; chap.
V, vendredi.Puis, chap.
VI, ellipse d'« une semaine ou deux ».
Chap.
VI, un jour; chap VII, la nuit; chap.
VIII, le lendemain.
Entre les chap.
viii et ix,ellipse implicite de quelques jours.
Chap.
IX, le jour du départ de Pierre, soit deux mois après le début.Âge des personnages.
Précisé pour : Pierre (30 ans) ; Jean (25 ans), Mme Roland (48 ans), Mme Rosémilly (23 ans, veuve à 21 ans) ; labonne Joséphine (19 ans).— Le roman se passe en 1885.
La rencontre de Mme Roland et de Maréchal a dû se situer en 1858.
Pierre avait trois ans.Le mariage de Jean et de Mme Rosémilly aura lieu dans six semaines.
Il est question que Pierre revienne dans un mois.Opposer la linéarité du récit et l'utilisation des retours en arrière puisqu'il s'agit de remonter dans l'histoire de la naissance de Jean : onpeut faire construire aux élèves un tableau conjuguant ces deux mouvements.
2.
La représentation de l'espace (à partir des indications de lieu relevées)— Étudier les oppositions : dedans / dehors ; paysages marins / paysages terrestres ; lieux occupés par toute la famille / lieux liés à unseul personnage.
Observer les déplacements des personnages, leurs rythmes, leurs buts, leurs résultats (Commentaires, p.
207).— Les descriptions : particulièrement intéressantes et faciles à analyser : (p.
34) la corbeille de poissons (voir Commentaires, p.
206) ;(p.
45) les navires sur la mer ; (p.
61) les deux phares ; (p.
115) la plage comme « une immense floraison de la perversité féminine» ;(pp.
129-130) la campagne normande.
Voir leur rapport avec l'intrigue; l'« effet de réel » et la valeur symbolique des détails ; l'usage desmétaphores qui transforment la peinture de la réalité en une suggestion fantastique ; le mélange de poésie et d'ironie.
3.
Le traitement dans l'écriture de la parole et des pensées— des personnages : problèmes posés par la transcription de la langue parlée ; narration à la troisième personne et vision intérieure aupersonnage.
L'usage très particulier du style indirect libre.
Suivre la multiplication et l'évolution des points de vue au cours du récit.— de l'auteur : pas de narrateur ; des points de vue très variés qui sont souvent ceux des personnages ; mais aussi un auteur omniscientou affirmant un point de vue général..
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