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Paul et Virginie

Publié le 10/04/2013

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Paul et Virginie fut un livre phare pour beaucoup d'auteurs de la première moitié du xixe siècle, et pourtant l'amour des deux héros exclut tout ce que le romantisme met dans les relations amoureuses : la jalousie, la rivalité, l'infidélité, le dédoublement de l'érotisme (ange et démon, chair et esprit) ou l'adultère. Leur innocence, malgré la pudeur de Virginie, donne à leurs relations une dimension qui ne serait pas crédible si le cadre de l'histoire n'avait été une île encore à l'abri des moeurs de l'Europe. Ayant connu un énorme succès jusqu'en 1850 environ, le livre de Bernardin de Saint-Pierre fut très discrédité après cette date et particulièrement par certains auteurs du xxe siècle. Malgré cela, tout le monde connaît l'histoire de Paul et Virginie, ce qui montre que l'oeuvre, appréciée ou non, tient une place importante dans l'histoire de la littérature.

« « Votre case est vers le soleil du milieu du jour ; il faut que nous passions, comme ce matin, par-dessus cette montagne que tu vois là-bas ( ...

).

Allons, marchons, mon amie.

» ~-------EXTRAITS Paul apprend que Virginie doit partir Il répéta en tremblant ces mots : « Mon fils ...

mon fils ...

Vous ma mère, lui dit-il, vous qui séparez le frère d'avec la sœur ! Tous deux nous avons sucé votre lait ; tous deux, élevés sur vos genoux, nous avons appris de vous à nous aimer ; tous deux, nous nous le sommes dit mille fois.

Et mainte­ nant vous l'éloignez de moi ! Vous l'envoyez en Europe dans ce pays bar­ bare qui vous a refusé un asile, et chez des parents cruels qui vous ont vous­ même abandonnée ..

Vous me direz : Vous n'avez plus de droits sur elle., elle n'est pas votre sœur.

Elle est tout pour moi, ma richesse, ma famille, ma naissance, tout mon bien.

Je n'en connais plus d'autre.

Nous n'avons eu qu'un toit, qu'un ber­ ceau; nous n'aurons qu'un tombeau.

Si elle part, il faut que je la suive.

Le gouverneur m'en em­ pêchera ? M'empêchera-t-il de me jeter à la mer? Je la suivrai à la nage.

La mer ne sau­ rait m'être plus funeste que la terre.

Ne pou­ vant vivre ici près d'elle, au moins je mourrai sous ses yeux, loin de vous.

Mère barbare ! femme sans pitié ! puisse cet océan où vous l'exposez ne jamais vous la rendre ! puissent les flots vous rapporter mon corps, et, le roulant avec le sien parmi les cailloux de ces rivages, vous donner, par la perte de vos deux enfants, un sujet éter­ nel de douleur ! » A ces mots je le saisis dans mes bras ; car le désespoir lui ôtait la raison.

Ses yeux étin­ celaient ; la sueur coulait à grosses gouttes sur son visage en feu ; ses genoux trem- blaient, et je sentais dans sa poitrine brû­ lante son cœur battre à coups redoublés.

Virginie vont la mort s'approcher On vit alors un objet digne d'une éternelle pitié : une jeune demoiselle parut dans la galerie de la poupe du« Saint-Géran », ten­ dant les bras vers celui qui faisait tant d'ef­ forts pour la joindre.

C'était Virginie.

Elle avait reconnu son amant à son intrépidité.

La vue de cette aimable personne, exposée à un si terrible danger, nous remplit de dou­ leur et dè désespoir.

Pour Virginie, d'un port noble et assuré, elle nous faisait signe de la main, comme nous disant un éternel adieu.

Tous les matelots s'étaient jetés à la mer.

Il n'en restait plus qu'un sur le pont, qui était tout nu et nerveux comme Hercule.

Il s'ap­ procha de Virginie avec respect : nous le vîmes se jeter à ses genoux, et s'efforcer même de lui ôter ses habits; mais elle, le re­ poussant avec dignité, détourna de lui sa vue.

On entendit aussitôt ces cris redoublés des spectateurs : «Sauvez-la, sauvez-la ; ne la quittez pas!» Mais dans ce moment une montagne d'eau d'une effroyable grandeur s'engouffra entre l'île d'Ambre et la côte, et s'avança en rugissant vers le vaisseau, qu'elle menaçait de ses flancs noirs et de ses sommets écumants.

A cette terrible vue le matelot s'élança seul à la mer; et Virginie, voyant la mort inévitable, posa une main sur ses habits, l'autre sur son cœur, et levant en haut des yeux sereins, parut un ange qui prend son vol vers les cieux.

« Ils aperçurent là une maison bien bâtie, des plantations considérables, et un grand nombre d'esclaves ( ...

).

Leur maître se promenait au milieu d'eux, une pipe à la bouche, et un rotin à la main.» NOTES DE L'ÉDITEUR religion, a dû nourrir son génie de la beauté des livres saints.

» Chateaubriand, Le Génie du christianisme, 1802.

de l'ensemble.» Sainte-Beuve, Les Causeries du lundi.

« Il est certain que le charme de Paul et Virginie consiste en une certaine morale mélancolique qui brille dans l'ouvrage, et qu'on pourrait comparer à cet éclat uniforme que la lune répand sur une solitude parée de fleurs.

Or, quiconque a médité l'Évangile doit convenir que ces préceptes divins ont précisément ce caractère triste et tendre.

Bernardin de Saint-Pierre qui, dans ses Études de la nature, cherche à justifier les voies de Dieu, et à prouver la beauté de la 1 coll.

Viollet 2, 3 , 4 dessins d'Émile Bayard, Hachette, 1871 « Bernardin a l'image légère.

Toutes ces harmonies, tous ces contrastes, ces réverbérations morales dont il a tant parlé dans les Études et dont il traçait une poétique un peu vague, il les a ici réalisés dans un cadre heureux, où, dès l'abord, le site, les noms des lieux, les aspects divers du paysage sont faits pour éveiller les pressentiments et pour concourir à l'émotion «Après Rousseau, dont La Nouvelle Héloïse avait connu un engouement du même ordre, Bernardin avait touché la corde sensible en s'adressant au cœur.

Son roman marque le point d'aboutissement littéraire, il est le résultat fatal d'une évolution qui, depuis l'abbé Prévost, s'efforce de substituer à l'esthétique classique une esthétique dont la sensibilité est l'élément ~ssentiel.

» P.

Trahard, éditions Garnier, 1958.

BERNARDIN DE SAINT-PIERRE 02. »

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