PASCAL: Pensées sur L'esprit humain et sur le style. — Pensées sur la misère de l'homme. (Sections I et II de l'édition de M. Bruuschvicg.)
Publié le 19/10/2018
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Toute autre est l'intention de Pascal. Pascal a bien vu que ce n’est pas, le plus souvent, par raisonnement qu’on s’éloigne de la religion, ni, par conséquent, qu’on y revient. Il y a eu au xvie siècle, abondamment, des athées ou des déistes raisonneurs, des incrédules par système qui composaient et lisaient de méthodiques in-folio hérissés d'arguments. Les libertins que connaît ou peut connaître Pascal sont presque tous bien différents de ces discuteurs. Sans doute Desbarreaux, Cyrano, Lhuillier, Chapelle, une Ninon de Lenclos, ceux même qui le sont avec plus de discrétion, Mme de la Sablière, Miton ou Méré, savent encore \"philosopher\". Mais ils obéissent tout autant à leur intérêt. La religion gêne moins leur raison que leur plaisir ; une voix secrète s’élève en eux qui plaide pour la vie large, joyeuse, pour la liberté de la « débauche ». Déjà ces libertins, au sens intellectuel du xviie siècle (incrédules), le so t au sens actuel du mot. Bien d’autres n’ont jamais raiso é et se contentent de suivre cette « bonne loi aturelle » qui les mène tout droit à la liberté du vice. Une princesse Palatine, un prince de Conti, une demoiselle de Lionne, une dame de Villedieu, n'ont pas besoin qu’on leur démontre le mensonge de la religion ; ils le sentent ou croient le sentir. Or, ce sont ces libertins ou ces mondains-là que Pascal veut convertir. Il faut donc chercher une autre méthode.
L'esprit de géométrie et l'esprit de finesse. — Cette méthode, Pascal l’a découverte en cessant d’être un pur mathématicien. Longtemps il n’a été qu’un «géomètre » habile à tirer d'un principe mathématique des conséquences ingénieuses et profondes. Il a vécu pour la raison pure. Ce goût du raisonnement mathématique persistera d’ailleurs en lui invinciblement. Il tentera de nous démontrer (section II) qu'on peut trouver un ciron un univers semblable au nôtre et infiniment plus petit, avec son firmament, ses planètes, sa terre, ses animaux, avec ses cirons, dans ces cirons un nouvel univers, avec ses cirons, et ainsi de suite, jusqu'à l’infini. Nous n’avons plus la même conception de l’infini de petitesse physique. Pascal raisonne en géomètre, pour qui, théoriquement, on peut inscrire dans une figure une figure semblable, mais plus petite, et ainsi de suite jusqu’à l’infini. Mais, de géomètre, il est devenu physicien. Il a rencontré des faits que l’on n’adapte pas au raisonnement, auxquels le raisonnement doit s’adapter. Pour expliquer la suspe sion du mercure dans le tube barométrique de Torricelli, Descartes veut raisonner d’après ses principes, et il se trompe. Pascal, au contraire, observe, se soumet aux faits, et il comprend.
Surtout Pascal a été mondain. Entendons non pas qu’il a vécu une vie de plaisirs, mais qu’il a connu ceux qui la menaient ; non pas peut-être qu’il a vraiment aimé, mais qu’il a compris qu 'on pouvait aimer, et suivi curieusement le manège des amants. Le Discours sur les passions de l’amour est bien décidément de lui. G. Lanson a montré qu’il n’avait pu être écrit que par un homme connaissant le texte authentique, manuscrit et inconnu, des Pensées, c’est-à-dire par Pascal. Quand on aime on ne démontre pas par théorèmes ni par syllogismes qu'on aime et qu’on doit être aimé. Les preuves qui touchent les cœurs ne sont pas celles qui convainquent les philosophes ou les savants. Or ce n’est pas seulement l’amour, c’est la vie tout entière qui est menée par ces raisons fort indifférentes à la raison.
Pascal en fit évidemment l’expérience. Il y fut aidé par des amis, par Miton qu’on connaît assez mal, par le chevalier de Méré que M. Boudhors a étudié avec précision. On a exagéré l’influence de Méré parce qu’il l’a lui-même exagérée, et parce que dans une lettre très connue sur l’esprit de finesse, adressée à Pascal en 1654, il y traite Pascal en petit garçon, fort novice dans la science du monde. A regarder les textes de près, on s’aperçoit que c’est Méré, esprit brouillon et changeant, qui a pris souvent ses leçons dans Pascal.
Les Pensées sont les fragments d’une apologie de la religion catholique. Le dessein de Pascal n'était pas nouveau. Tout le monde lisait, vers 1660, des apologies du christianisme. Mais sa méthode était profondément neuve. Et cette originalité apparaît nettement dans les pensées sur l’esprit, sur le style et sur la misère de l’homme.
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une
voix secrète s'élève en eux qui plaide pour la vie large,
joyeuse, pour la liberté de la « débauche ».
Déjà ces libertins,
au sens intellectuel du xvne siècle (incrédules), le sont au sens
actuel du mot.
Bien d'autres n'ont jamais raisonn
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et se con
tentent de suivre cette « bonne loi
naturelle '' qui les mène tout
droit à la liberté du vice.
Une princesse Palatine, un prince de
Conti, une demoiselle de Lionne, une dame de Villedieu, n'ont
P.as besoin qu'on leur démontre le mensonge de la religion ;
lis le sentent ou croient le sentir.
Or, ce sont ces libertins ou
ces mondains-là que Pascal veut convertir.
Il faut donc chercher
une autre .
méthode.
L'esprit de géomé trie et l'esprit de finesse.
-Cette méthode,
Pascal l'a découverte en cessant d'être un pur mathématicien.
Longtemps il n'a été qu'un «géomètre " habile à tirer d'un prin
ci pe mathématique des conséquences ingénieuses et profondes.
Il a vécu pour la raison pure.
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matique persistera d'ailleurs en lut invincib
le ment.
Il tentera de
nous démontrer (section II) qu'on
peut trouver dans un ciron
un univers semblable au nôtre ct infiniment plus petit, avec son
firmament, ses planètes, sa terre, ses animaux, avec ses cirons,
dans ces cirons un nouvel univers, avec ses cirons, et ainsi de
suite, jusqu'à l'infini.
Nous n'avons plus la même conception
de l'infini de petitesse physique.
Pascal raisonne en géomètre,
pour qui,
théoriquement, on peut inscrire dans une figure une
figu re
semblable, mais plus petite, et ainsi de suite jusqu'à
l'infini.
Mais, de géomètre, il est devenu physicien.
Il a ren
contré des faits que l'on n'adapte pas au raisonnement, auxquels
le raisonnement doit s'adapter.
Pour expliquer la suspe
nsion
du mercure dans le tube barométrique de Torricelli, Descart es
veut raisonner d'après ses pri
ncipes, et il se trompe.
Pascal,
au contraire, observe, se soumet aux faits, et il comprend.
Surtout Pascal a été mondai
n.
Entendons non pas qu'il a
vécu u ne vie de plaisirs, mais qu'il a connu ceux qui la menaient ;
non pas peut-être qu'il a vraiment aimé, mais qu'il a compri s
qu 'on pouvait aimer, et suivi curieusement le manège des amants.
Le Discours sur les passions de l'amour est bien décidément de
lui.
G.
Lanson a montré qu'il n'avait pu être écrit que par un
homme connaissant le texte authentique, manuscrit et inconnu,
des Pensées, c'est-à-dire par Pascal.
Quand on aime on ne
démontre pas par théorèmes ni par syllogismes qu'on aime et
qu'on doit être aimé.
Les preuves qui touchent les cœurs ne.
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