Paris vécu de Daudet
Publié le 06/04/2013
Extrait du document
Fils du romancier Alphonse Daudet, Léon hérita du caractère brillant et de la forte personnalité de son père. Il connut très jeune toute l'intelligentsia de son temps, de Zola à Maurras, et épousa la petite-fille de Victor Hugo.
«
« Je ne conn ais rie n d e
p lu s bea u que les no m s
des rues de la Ha
lle au x
Vins, permetta n t de se
gu i der à travers cette
v ille de tonn eaux.
»
'
EXTRAITS
C' est apr ès un e c on ve rsation
av ec sa femme s
ur la beaut é de Pari s
que Daudet écrit Pari s véc u
Paris est beau comme une eau-forte, où il y
a des noirs et des blancs, des noirs du passé
et des blancs
del' heure .
Méryon l'a buriné
à merveille, Baudelaire aussi,
Alphonse Daudet également,
et, après ces trois graveurs de
Paris, il y a quelques bonnes
lithographies de Victor Hugo
dans
Les Miséra bles.
Ensuite
au loin, on peut citer honora
blement la Bièvre d'Huys
mans, le quartier de la Goutte
d'Or de Zola et le Belleville
de Geffroy .
C'est à peu près
tout.
Daud et truff e son réci t
de de scription s d'un sty le
très color é qui fait appel à
de nombreu se s ré fé re nce s
a rti stique s
Le tronçon de la rue de la
Chaussée d'
Antin , qui va du boulevard
H
aussmann à la Trinité, fut un de mes
parcours préférés : d'abord parce qu
'il y a
là une charcuterie remarquable, la maison
Yvoré , où l'on reçoit régulièrement l'exquise
brandade du seigneur Chabasse d'Avignon;
ensuite parce qu'elle offre un va-et-vient de
minois à la Greuze et à la Fragonard , aux
deux sorties des ateliers : celle de midi et
celle de six heures.
Apr ès avoir déc rit plu sie ur s hôpit au x,
Lé on Daudet laisse perc er dan s un
vé ritable cri, sa ré pul sion vis -à -v is
d e
ces in stitu tio n s
L'hôpital , l'hospice , le sanatorium sont de
grandes écoles de la vie .
On y apprend
à compatir
et à chercher le bien de son
semblable.
On y comprend mieux les
Évangiles, qui ouvrent l'esprit scientifique, e
n même temps que celui de la charité .
La
réflexion est de Laennec et profondément
vraie .
La contemplation -
je dis bien la
contemplation -
d'une salle d'hôpital,
avec ces draps, déjà linceuls, ces visages
c reusés , cette odeur fade, postule assez vite
à
l'effusion mystique.
Ces crucifix, qu'a
enlevés un régime dégoûtant et imbécile ,
apparaissent en ombre portée de la souf
france sur les murs ternes et désolés.
Déambulant s ur les quai s de la ri ve
ga uche , Daudet se d échaî ne c ontr e
l
'A c a d émi e fran çai se
L'Académie française , en sa qualité de
cor ps constitué, a toujours été remarqua
blement aplatie, suceuse et léchante, vis-à
vis des gens en place .
Ellen' a eu ni Balzac,
ni Baudelaire , ni Proudhon , ni Michelet , ni
Alphonse Daudet, ni Flaubert , ni Goncourt,
ni Mistral, pour ne citer que ces huit-là.
Elle
a eu Aicard, Emile Ollivier ,
Poin caré, Barthou, Hanotaux,
ces lavasses, ces rinçures de
bidet, toute une séque lle de
fau x poètes, de larves d 'en
c rier, de politiciens imbéciles,
bavochants
ou vaseux.
(.
.
.)
Elle ne représente
plus rien
que le pon cif, la courbette, le
salamalec.
Les quelques hom
mes de valeur et d'esprit , qui
gise nt encore dans ses fau
teuils , ne sauraient compenser
le néant, le faquinisme des
autres, épaves de salons, d'as
semblées, de sacristies, de
co nseils d'administration , de
prétoires , solennels, guindés
-
ou remplis de petites manières
et dont un Doumi c, un Goyau, un Brémond ,
un Hermant , un Lavedan , poussièr e d' écri
t oire, de paillassons et d'antichambre, sont,
à mes yeux, les types risibles.
Gallimard, 1931
« Je sui s en tré, pou r la
p remi ère fois, à la
C ha m bre des dép utés le
jou r o ù le cabi n et Ferry ( ..
.
) fu t renversé par C leme ncea u.
»
NOTES DE L'É DIT EUR conciséme nt rendus dans l'à-pic du titre.
N'était le sens péjoratif du mot , on y verrait
l'empreinte
d'un viveur reconnaissant qui
se souvient et prend encore quelques
min utes contre le sablier.
Ce
Paris vécu est
le royaume
du petit fait révélateur, de
l'anecdote authentique où Daudet évolue,
simple et enjoué, sur le pavé parisien.
Il se
raco nte ici à la première personne dans les
dé tai ls de la vie ordinaire, lâchant le bridon
à ses marottes, faiblesses et envies qui
s'entrechoquent.» Eric Vatré ,
Léon Daudet ou
le libr e réactionnaire,
Éd.
France
Empire, 1987.
Député de
Paris en 1920, Daudet lança de
violentes attaques contre la po lice après
l'assassinat présumé de son fils Phil ippe,
retrouvé mort dans un taxi en 1923.
Emprisonné pendant quelques mois,
il s'évada et gagna la Belgiq u
e.
«Aux deux volumes du P aris vécu
(Rive Droite, 1929 -Rive Ga uche, 1930)
s'attachent un charme, une fébrilité
1 Roge r-Violl et 2, 3, 4, 5 gravures de P.J.
Poitevin , éditions du Capitole, 1 930 / B.N.
« Médiocre romancier, Daudet est un
pamph létaire de la grande race.
Il reconnaît
pour maîtres Rabelais, Hugo, Léon Bloy.
Admirab lement doué pour l'injure lyrique ,
le grossisseme nt caricatural, il s'ébroue
dans les contradictions et la démesure ,
l oin de toute préoccupatio n logique.
»
J.
Robichez , Préc is de littérature ji·ançaise
du xx e siècle , PUF, 1985.
LÉON DAUDET 02.
»
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