Paradoxe sur le comédien
Publié le 12/03/2019
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Paradoxe sur le comédien, ouvrage posthume de Diderot, révélé en 1830, et dont la rédaction s'étale entre 1769 et la fin de la vie de l'auteur. Ce texte, inspiré de conversations avec l'acteur anglais Garrick, doit sa célébrité à une thèse qui peut paraître encore scandaleuse aujourd'hui : le grand comédien doit jouer de « jugement » et non de « sensibilité ». De grands artistes du théâtre, Sarah Bemhardt, Copeau, Dul-lin ou Jouvet, s'en démarquèrent avec plus ou moins de vigueur. Leurs lectures, souvent anhistoriques, reposent sur un réel malentendu : Diderot n'assimile nullement talent dramatique et hypocrisie morale. Il a au contraire le souci de rendre au théâtre une dignité morale conforme aux exigences du drame bourgeois, et aux comédiens celle de « prédicateurs laïques ». Le propos du Paradoxe dépasse la seule question de l'art dramatique. Diderot y élabore une théorie esthétique qui transforme profondément la doctrine classique de l'imitation de la « nature » ; l'artiste, selon lui, imite un modèle idéal formé par l'ensemble des observations qu'il a faites de la nature. Quant à l'idée de la nécessaire insensibilité du comédien et, en général, de l'homme de génie, elle repose sur une théorie générale (physiologique et matérialiste) de la sensibilité (développée dans le Rêve de d'Alembert), qui oppose le cerveau au « diaphragme ». Le Paradoxe témoigne d'une réflexion complexe et riche, dont la force novatrice ne cesse d'étonner, sur les rapports entre la nature, le corps, la société et l'art.
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Paradoxe sur le comédien
Le Parado xe sur le comédien fut rédigé par
Diderot vers 1769, puis remanié à plusieurs
reprises
jusqu'en 1777.
Ces années furent
les plus fertiles dans
la carrière de
l' écrivain.
Le 1er octobre 1770, il fit paraître dans la
Correspondan ce littérai re un article -
intitulé « Garrick ou les acteurs anglais » -
qui était en fait une ébauche du Paradoxe.
L'ouvrage terminé ne fut publié qu'en 1830 ,
donc bien après la mort de son auteur.
Observer et imiter
D
iderot venait d'écrire une première mouture de
Jacques le Fataliste, il se passionnait pour tout
ce qui touchait à l'esthétique,
il avait notamment écrit
l'article sur le
Beau pour l' Encyclopédie, dont il fut
rappelons-le, le directeur.
Il fréquentait les peintres,
donnait des comptes rendus d'expositions, notam
ment dans la
Correspondance littéraire de Grimm.
C'est d'ailleurs dans cette revue qu'il faut chercher
l'origine du
Paradoxe sur le comédien ; Diderot y
avait en effet parlé du célèbre comédien et auteur
dramatique anglais David Garrick, qui fondait son jeu
sur l'observation et l'imitation des comportements
humains et de la nature.
Le
Paradoxe sur le comédien
se présente sous la forme d'un dialogue, spirituel
et plein de verve, dont le
« premier interlocuteur »
exprime les opinions de l'auteur.
La lucidité contre l'instinct
P
our émouvoir le spectateur, le comédien doit-il
jouer d'instinct ou, au contraire, faire preuve
d'
«insensibilité», c'est-à-dire dominer le person
nage qu'il interprète
? Telle est la question posée par
Diderot à propos du comédien, mais aussi de l'artiste
en général et de
l'homme dans sa conduite.
A
l'époque, on estimait que le bon comédien (ou
tragédien) ne pouvait toucher le public que
s'il
vivait les émotions, les sentiments et les passions
qu'il exprimait.
Opposé à cette opinion, Diderot
s'explique ainsi : dans la réalité, nous pouvons
très bien être insensibles à la douleur d'une per
sonne, quel que
soit son degré de sincérité
; cela
signifie donc que ce n'est pas sa sincérité qui
exprime et transmet ses émotions.
Pour cela, elle
devrait avoir les talents et les outils
du comédien.
D 'où l'avis de Diderot selon lequel le comédien
doit opérer une sorte de dédoublement pour
donner l'illusion de la vérité.
Il doit s'inventer un
«archétype» et faire preuve de qualités de bon
sens, de jugement et de lucidité.
Il doit acquérir
une technique et un métier sûrs, pour pouvoir à
tout moment dominer la situation.
Au contraire,
sa sensibilité et son instinct peuvent le tromper, et
tromper le spectateur
; le comédien risque d'être
inégal, sublime un jour, médiocre un autre jour.
Il
en va de même pour le poète et pour l'artiste, qui ne
peuvent créer sous le choc d'une grande douleur.
Pour être
convaincant et crédible,
le comédien doit être « insensible » ;
tel est le paradoxe que Diderot
explique dans un dialogue
spirituel et étincelant.
Mlle Dumesnil, actrice dont le jeu, selon Diderot, repose sur l' « instinct ».
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