Orestie, l' [Eschyle] - résumé et analyse.
Publié le 14/05/2013
Extrait du document
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Dans les Euménides, Oreste, tourmenté pour parricide par les Érinyes, a trouvé refuge sur l'autel d'Apollon à Delphes.
Pendant que dorment les Érinyes, Apollon le rassure, le purifie et l'invite à aller chercher son absolution à Athènes quand il aura usé
sa souillure en parcourant le monde.
Les Érinyes, que l'ombre de Clytemnestre est venue exciter contre Oreste, se remettent à sa poursuite.
Arrivé à Athènes, Oreste se jette en suppliant sur la statue d'Athéna et lui demande assistance.
La déesse
institue alors sur l'Aréopage un tribunal humain qui, après les plaidoyers contradictoires des Érinyes et d'Apollon, acquitte Oreste.
Et pour apaiser les Érinyes qui se disent lésées par ce verdict, Athéna leur offre de se fixer à Athènes où les honneurs
leur seront rendus sous le nom d'Euménides (« les Bienveillantes »).
5 LA THÉMATIQUE DANS L’ORESTIE
L’Orestie traite d'une crise familiale et de sa résolution progressive, depuis l'assassinat jusqu'au rétablissement de la justice.
Cette trame, sur laquelle est construite l'intrigue de la trilogie, développe des thèmes divers tels que la vengeance, le crime
« lemnien », la malédiction familiale atavique, la responsabilité individuelle, la justice privée et la justice d'État, etc.
La vengeance est un devoir sacré qu'Apollon impose à Oreste, mais aussi un moyen pour les enfants d'Agamemnon de retrouver leur
rang social et leur dignité.
Clytemnestre présente l'assassinat de son mari comme une vengeance contre cet homme qui a osé sacrifier leur fille Iphigénie pour venger le rapt d'une femme indécente, Hélène.
Elle serait tout à fait crédible si son
adultère ne venait réduire sa justification en prétexte.
Le meurtre de l'époux (crime lemnien) se complique ainsi de mauvaise foi, de jalousie (la présence de Cassandre) et de tentatives adultères.
L'appartenance de l'amant et complice Égisthe à la
famille d'Agamemnon, celle des Pélopides, inscrit l'assassinat dans la longue liste des meurtres atroces de la famille.
Agamemnon paie les fautes des pères et Oreste n'est pas épargné par ce mal en devenant meurtrier de sa mère et d'Égisthe.
Ce
thème, récurrent dans l’Orestie, de la malédiction atavique dont les dieux ont frappé la famille inscrit au cœur de la trilogie la fatalité que l'auteur rend crédible par le poids donné aux motifs religieux (présages, prières, rites… ).
Pourtant les
personnages ont une responsabilité individuelle dans les malheurs qui les frappent.
Ainsi Agamemnon paie ses propres erreurs : le sacrifice d'Iphigénie, le sac des sanctuaires troyens, la marche sur la pourpre réservée aux dieux… La vengeance de
Clytemnestre, d'Égisthe ou d'Oreste pose le thème de la justice privée.
Ainsi Oreste s'appuie sur un droit (cautionné par Apollon) qui légitime que le plus proche parent d'une victime puisse punir l'auteur du crime.
Un autre droit, défendu par les
Érinyes, interdit de tuer un parent (Clytemnestre-Oreste).
D'où un conflit de droits, représenté dans les Euménides selon le modèle d'une théomachie, qui menace la stabilité sociale.
6 L'UNITÉ DE LA TRILOGIE.
L’Orestie est une trilogie liée, c'est-à-dire dont les trois étapes de l'histoire sont enchaînées par des liens clairement soulignés de cause à effet.
Mais l'unité de l’Orestie ne tient pas seulement au lien consécutif marqué dans la trame de l'histoire.
Elle
vient aussi d'un réseau d'échos entre les trois pièces : annonces, épisodes ou microstructures similaires, images récurrentes… Ainsi le retour d'un vengeur (les Choéphores) est plusieurs fois annoncé dans Agamemnon (prophétie de Cassandre,
exodos), tandis que la poursuite d'Oreste par les Érinyes justicières (les Euménides) commence déjà à la fin des Choéphores. Dans les Choéphores, le voile que déploie Oreste pour se justifier après le meurtre de sa mère et d'Égisthe sert non
seulement à suggérer que les nouveaux meurtres sont la conséquence des anciens (ceux d’ Agamemnon ), mais anticipe le procès des Euménides : le voile lui sert ici de témoin.
Les prologues des trois pièces ont des caractères similaires.
Ce sont des
monologues, interrompus chacun par un spectacle inattendu : signal de feu, procession de femmes en deuil, vision des Érinyes ensommeillées.
Dans Agamemnon et les Choéphores, il est question de deux retours, celui du père et celui du fils, de
séquences similaires dans le meurtre : dans le meurtre d'Agamemnon et de Cassandre, puis d'Égisthe et de Clytemnestre, la mort du mâle précède celui de la femme ; elle est entendue et commentée de l'extérieur, et chaque fois l'homme entre dans
le palais, trompé par une ruse de femme, sans savoir ce qui l'attend, alors que la femme y entre tout en sachant qu'elle va à la mort… Certaines images sont récurrentes, se modifiant parfois au fur et à mesure de l'action.
Ainsi l'image du filet ou
réseau de lin ou voile ; l'image du serpent ou vipère ; l'image des vautours qui ont perdu leurs petits ou des aiglons qui ont perdu leur père ; la couleur rouge pourpre, d'abord sinistre, du tapis, du voile, puis positivement connotée du costume final
des Érinyes…
7 L'OPTIMISME DANS L’ORESTIE
L’Orestie est particulièrement tragique.
Pourtant, dans l'ensemble, Eschyle y fait preuve d'optimisme.
Cet optimisme tient en deux points : possibilité de comprendre le monde, possibilité d'améliorer le monde.
Eschyle a une vision optimiste du temps
puisqu'avec le temps s'acquiert la compréhension du monde.
D'où le choix d'une large perspective qui déploie l'histoire d'une famille sur plusieurs générations, permettant de dégager des comportements constants, des lois, une morale.
Toutefois,
cette compréhension se gagne sur la souffrance.
« Au coupable le châtiment » écrit avec d'autant plus de conviction ce poète qui croit à l'ordre et à la justice des dieux que, selon lui, « la souffrance fait comprendre ».
L'optimisme fondé sur la
compréhension possible du monde se traduit par l'emploi fréquent de pensées gnomiques, somme de l'expérience du passé.
Il se traduit au niveau de l'écriture par un usage efficace des présages comme moyen à la fois dramatique et dramaturgique.
Le présage permet d'anticiper les événements futurs, mais aussi de revenir plus tard sur tel événement prophétisé pour le méditer, le comprendre.
Il permet aussi d'annoncer la suite d'une pièce et de créer une tension dramatique : les personnages
(et le public) attendent de savoir comment se réalisera le présage (le présage des aigles dévorant la hase pleine au grand déplaisir d'Artémis, les prophéties de Cassandre).
La possibilité de comprendre débouche sur celle d'améliorer le monde.
Le
procès d'Oreste dans les Euménides est l'emblème de cette conception.
Pour régler le conflit des justices privées, représenté par l'opposition Érinyes-Apollon et menaçant la société par une série infinie de vengeances et de représailles, Athéna institue
le tribunal de l'Aréopage à qui revient le droit exclusif d'appliquer la vengeance.
Cet abandon de la loi du talion au profit d'une justice d'État traduit l'optimisme d'Eschyle quant à la marche de l'Histoire : cette Histoire est celle d'une transformation et
d'une évolution de la société et des dieux vers le bien.
Peut-être cet optimisme n'est-il que la réflexion du climat social d'Athènes à la date de l’Orestie.
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