NADJA – ANDRE BRETON
Publié le 15/10/2019
Extrait du document
Lorsqu'à la p.23 Breton déclare écrire je cite : \" sans ordre préétabli, et selon le caprice de l'heure\" on peut
se permettre d'essayer de le contredire grâce à son \"avant-dire\" qui apparaît dans la réedition de 1962. En
effet, il déclare obéir à je cite : \" deux principaux impératifs anti-littéraires \". Le premier est l'élimination de
toute description au profit d'iconographies dont nous avons un exemple à la p.65 avec l'image du gant. Les
iconographies aide à inscrire le caractère réel des événements ;
l'image du gant vient prouver en quelque sorte l'existence de celui-ci qui se donne à voir. L'image marque
également le côté discontinu du récit car elle représente une sorte de coupure et en même temps en
incorporant les images dans son oeuvre Breton montre son côté contestataire des codes classiques
romanesques puisqu'il prend la liberté d'éliminer la description.
c) La
«
Nadja, c’est l’histoire d’une rencontre.
Rencontre entre l’auteur, André Breton, et une jeune fille répondant au nom
de Nadja.
Nous pouvons dire que cette jeune fille incarne à elle seule le surréalisme, on peut avoir l’impression
qu’il s’agit de la rencontre d’un auteur appartenant au courant surréaliste, et du surréalisme incarné.
On ne peut
pas affirmer qu’il s’agit là d’une histoire inventée du début à la fin, ou tout du moins nous n’en connaissons pas la
part de vérité.
Breton et les surréalistes rejettent la description, pour eux ce sont les cartes postales qui n’expliquent rien.
Breton
explique dans sa préface, rédigée en 1962, soit plus de 30 ans après la première édition du roman, que dans les
romans où se trouvent des photos, il ne devrait pas y avoir trop de description.
Dans Nadja, il décrit peu les
paysages où ils se trouvent, il en met des photos, ce qui en un sens est antilittéraire.
La photo rendrait donc inutile la description, or ce n’est pas le cas ici.
Barthes parle de studium et de punctum :
dans Nadja, nous sommes la majorité du temps, dans le punctum.
Les photos accompagnées du texte (sans parler
de leur légende qui, à mon sens, n’est là que pour nous indiquer à quelle partie du texte la photo s’ajoute), sont
poignantes, elles peuvent même aller jusqu’à parler d’avantage que le texte (sans les images des peintures
présentes chez Breton, nous ne saurions pas ce qui frappe Nadja lorsqu’elle les voit), ou le
complète.
Pour Barthes, et on le voit bien dans Nadja, une photo témoigne de ce qui « a été », d’une réalité passée, la photo
saisissant un instant qui après la prise, a été.
La photo dans Nadja peut être qualifiée de « certificat de présence ».
En effet, pour l’essentiel, les photos du roman sont des déserts humains, nous ne voyons de présence humaine ni
dans les rues ni dans les terrasses ni même dans les reflets des vitrines.
Ce qui se dégage principalement de ces
photos, c’est la présence quasi fantomatique de Nadja et Breton parmi d’autres âmes, on pourrait même aller
jusqu'à dire parmi « les morts ».
C’est à cette présence fantomatique que nous nous attacherons principalement,
ce surréalisme omniprésent.
Breton, dans son intro, considère le fantôme comme une « image finie d’un tourment qui peut être éternel.
».
Ce
qui pourrait expliquer, et c’est ce qui sera démontrer ensuite, pourquoi lorsqu’il est avec Nadja et que cette
dernière le captive, il n’y a aucune présence humaine dans les photographies, mais que l’on voit, ou sinon que l’on
sent des présences, quasi fantomatiques, et qui permettent de voir que les photos font bien office de certificat de
présence.
Je procèderai de manière chronologique, suivant le fil de l’histoire pour montrer la chute de Nadja, passant du
surréalisme, à l’irrationnel, tout en m’attachant donc aux photos, témoins de sa réalité passée, mais aussi de son
imaginaire.
La première image du récit,
p.70 montre une certaine disproportion entre l’homme et le bâtiment.
Breton, à ce moment -là, n’a pas encore
rencontré Nadja, les lieux ne sont encore pas complètement désertés de toute vie humaine, tout comme lorsque
Breton s’ennuie aux cotés de Nadja, moment durant lesquels dit-il « il est mal disposé » (p.122), moments durant
lesquels il n’y a pas de place pour le surréel, où il n’y a pas de surprise possible, pas de punctum : nous voyons
des gens, nous n’y sentons pas de présence dans le sens spirituel ou fantomatique du terme, Nadja et Breton se
trouve peut -être parmi la foule mais ils n’ont rien de surréel.
Sinon, la plupart du temps, lorsqu’ils sont ensemble, lorsque Nadja fascine Breton, ou lorsque, simplement, l’un.
»
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