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Mur (le) de Jean-Paul Sartre (résumé de l'oeuvre & analyse détaillée)

Publié le 24/10/2018

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Mur (le). Recueil de nouvelles de Jean-Paul Sartre (1905-1980), publié à Paris chez Gallimard en 1939. Le volume comprend cinq nouvelles dont trois avaient paru en revue : « le Mur » (la Nouvelle Revue Française, juillet 1937), « la Chambre » (Mesures, janvier 1938) et « Intimité » (la Nouvelle Revue Française, août 1938), tandis que « Érostrate », Inédit jusque-là, est écrit en 1936. Quant à la plus développée, « l'Enfance d'un chef », Sartre en a terminé la rédaction en juillet 1938.

 

Sartre bénéficie de la célébrité toute récente de la *Nausée lorsque paraît ce recueil qui, tout en contribuant à fonder la légende de l'écrivain obscène, obtient à son tour un succès certain et vaut à son auteur le prix du Roman populiste (avril 1940). Rétrospectivement, « Érostrate » ou « l'Enfance d'un chef » permettent de mieux comprendre la Nausée, le portrait de Lucien Fleurier venant compléter celui des

« salauds » de Bouville, l'antihumanisme d'« Érostrate » radicalisant le procès instruit par l'Autodidacte interposé. Toutefois on ne saurait réduire le Mur à un simple développement du roman fondateur. En effet, si dans la Nausée Sartre répondait à la question « Qu'est-ce qu'exister ? », avec le Mur il montre comment « fuir l'existence, c'est encore exister ».

 

Le Mur a pour cadre la guerre civile d’Espagne. Prisonniers des franquistes. Pablo Ibietta. le narrateur, anarchiste, Tom, des Brigades internationales. et Juan, le jeune frère d’un militant anarchiste, apprennent leur condamnation à mort Un médecin belge est introduit dans leur cellule, qui prétend leur apporter réconfort durant cette dernière nuit Venu en fait observer « des corps qui agonisent tout vifs », son attitude n’a pour effet que de les placer devant la terreur de leur propre mort Juan se recroqueville ; Tom se lève et se met « à guetter le jour». Au matin, Tom et Juan sont fusillés. Pablo sera épargné s’il indique où s’est caché son ami Ramon Gris. Il refuse de parler, quoique le sort de Gris comme celui de la cause anarchiste lui soient indifférents. Par moquerie, il finit par indiquer une fausse cachette. Un moment passe, les franquistes reviennent Pablo s'étonne de ce qu'on ne l'exécute pas : Ramon Gris qui avait changé de refuge a été trouvé et tué là où Pablo l'avait dit

 

La Chambre. M. et Mme Dardébat en « gens normaux ». voudraient bien que leur fille, Eve. consente à l'internement de son mari, Pierre, dans une clinique psychiatrique. Ils se heurtent à son attachement obstiné pour cet « être malsain » qui vit cloîtré dans sa chambre obscurcie, dans l’obsession d’une conspiration. Ève se demande toutefois si Pierre n’éprouve pas une certaine complaisance pour ses hallucinations. Mais ne pouvant plus vivre dans le monde des « bien-portants » ni rejoindre, malgré ses efforts, celui, tragique, où Pierre entend des statues voler, elle souffre de n’avoir plus sa place nulle part Elle sait que l’état de Pierre ira s’aggravant mais sa résolution est prise : avant qu’il ne sombre dans l'imbécillité, elle le tuera.

 

Érostrate. Les rares fréquentations de Paul Hilbert sont des prostituées à qui il demande seulement de se déshabiller. À la suite d’une de

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« ces séa nces lui vient l'idée de « tirer sur des hom­ mes » ..

Encouragé par l'histoire d'Érostrate qu'on lu i rapporte, il se fortifie dans l'idée que son des­ tin, tel celui de l'incendiaire du temple d'~hèse, « illuminerfa] le monde d'une flamme violente et brève ».

Ayant abandonné son emplo~ il envoie à cent deux écrivains une lettre dans laque.lle il dame son dégoût de l'homme et son mépris de l'humanisme.

Il y affinme également son intention de tuer une demi-douzaine de personnes au hasard.

Il abat en effet un passant.

tire dans la fou le et se réfugie dans les lavabos d'un café.

La dernière balle.

qu'il se réservait, il ne parvient pas à la tirer : « Érostrate » se laissera arrêter.

Intimité.

Lulu va quitter Hen ri, son mari, dont la cha ir molle l'indispose et l'attendrit à la fois : Lulu rêve d'u n « bea u jeune homme, pur comme une fille », qui ne la toucherait pas ( 1 ).

Son amie Rirette la persuade de vivre avec Pierre et apprend de Lulu sa rupture avec Henri.

Dans la rue, elles rencontrent Henri : Rirette s'entremet pour le repousser.

Dans la solitude de sa cham­ bre elle songe, en pleurant sur elle-même.

qu'elle aura fait le bonheur de Lulu mais que personne ne fait rien pour elle (2).

Dans une chambre d'hôtel, Pierre vient de partir et Lulu évoque avec dégoOt ces types «qui vous étouffe[ nt] à moitié et qui vous mouill e[ nt] le ventre pour finir» : « Il ne faudrait pas avoir de corps » (3).

Le len­ demain, Pierre apprend, sans grands regrets, que Lulu a décidé finalement de rester avec Henri (4).

L'Enfance d'un chef.

Lucien Fleurier, un fils de fami lle dont le père dirige une usine, est un enfant indolent Certes il aura sa place : il succé­ dera à son père, il sera un chef.

Mais la plupart du temps, il sent que sa tête est pleine de brouillard.

Lorsqu'il sort de sa torpeur, vers dix-huit ans.

c'est pour tomber dans «une perplexité bien réveillée» : a-t-on l'étoffe d'un chef quand on est persuadé qu'on n'existe pas? Lucien, qui prépare Centrale, se lie avec Berliac, un jeune élégant qui lui fait lire Freud.

Tous deux communient alors dans la révél ation de leurs comp lexes respect ifs.

Toujours en quête de conseils.

il est présenté par Berliac à Bergère, un poète de tendance surréa­ liste qui diagnostique chez lui un état qu'il appelle « le Désarroi ».

Au cours d'un voyage en pro ­ vince, Bergère sédu it L ucie n.

Plus inqu iet que cho qué, Lucien cesse de fréquenter Berliac et Bergère, pren d une maîtresse ma is la méprise.

Att iré par Lemordant, «un type qui a des convie- tiens », il fréquente des militants d'extrême droite dont Lemordant est le chef.

D'abord indi f­ férent à leurs idées.

puis seulement réticent, Lucien, séduit par la « fraternité virile » des ligueu rs.

finit par rosser avec eux un juif .

Un soir, chez des amis, il refuse de serrer la main d'un invit é juif.

Dès lors, on lui reconna?t une « convic­ tion ».

Cette révélation viendra dissiper défin iti­ vement la troublante incons istance de sa vie : son existence est désonma is j ustifiée parce qu'il a « des droits ».

Par-delà l'un icité de chaque nou­ velle, tant du point de vue de la tech­ nigue narrative (fait divers dans « Éros trate ,., méditation philo so phi ­ que dans «le Mur ,., mono logue inté­ rieur dans " Intimité ,., parodie du roman d'apprentissage dans « l'E n­ fance d 'un chef ») qu e des th èmes développés (la mort, l'impuis sance, la folie, le désir, etc .), l'unité interpré­ tative du recueil est assurém ent four­ nie par le titre lui-même.

Ce mu r, à la fois matériel, philos op hiqu e et m oral, Sartre e n avait déjà fait, dans la Nausée, l' im age emblématique de la consc ience et d e l'exi stence : « La conscience est posée entre des mu rs,., disait Roquen ­ tin.

Et l'exi stence ce sont ces mur s qui , interminables , vont se perdre dans le n éant.

Mais ce qui fait que le Mur n'est pas un sim ple déve l oppement de la Nausée, c'est que là où Roq uentin admettait qu'exis ter c'es t être l à, les prota gonistes du Mur essaient de tran­ siger avec l'irréfutable.

Aussi, dans le recueil, le mur repr é­ sen te-t-il ce qui fait obstacle : chaq ue protagoniste des cinq n ouve lles se trouve dans une de ces " situ ations limites " c h ères à Sartre (vo ir les ,.Mai ns sales), le plaçant devant le mur qui sépare l'existence de ce qui pou rra it êtr e : mur mat ériel contre le qu e l seront fusillés les camar ades de Pablo, mur symbolique de la folie qui ento ure Pier r e, mur en co r e, ma is comme vapo­ risé en une brume troublante, devant Lucien Fleurier qui cherche le sens de. »

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