Mort à crédit de Céline (résumé & analyse)

Mort à crédit

C’est une œuvre de la maturité, plus complexe que Voyage. On retrouve la même partition du récit : dans la première partie, qui s’achève sur le meurtre symbolique du père, nous suivons le narrateur dans les premières phases de son apprentissage; dans la seconde, le temps romanesque se ralentit, et nous assistons à son initiation par Courtial (ce qui apparente ce texte aux romans d’initiation du XIXe siècle). On retrouve aussi le même goût de la provocation : l’édition originale remplace les passages obscènes par des « blancs » qui font jaser; les sentiments du narrateur pour sa mère font crier au scandale... Mais la technique narrative s’est nuancée; ce récit de vie quotidienne est émietté en chapitres brefs où se succèdent des portraits, des scènes choisies pour leur valeur de symbole et des anecdotes dont Ferdinand n’est pas toujours le personnage principal. Une distance est ménagée du fait de l’âge du narrateur : Céline donne la parole à un enfant, avec tous les effets comiques ou amers que cette distanciation avait permis à Vallès dans l’Enfant et à Darien dans Bas les cœurs! La lecture est de plus polarisée par un prologue qui expose les thèmes qui seront développés dans la narration présentée comme un retour en arrière; le livre est écrit au moment où sa liaison avec Lucienne Delforge engage Céline à réfléchir sur ce que peut être la « musique » d’une œuvre littéraire.

Synopsis. — Suivant le conseil qu'on lui donne d'écrire des choses agréables, le narrateur se réintéresse à son ancienne Légende du roi Krogold. Un jour, il est saisi par un délire. Il reçoit la visite de sa mère et ne supporte pas ses mensonges sur leur passé; il est assailli par les souvenirs (i-ix). L'enfance au Passage des Bérésinas, entre le père Auguste, employé de bureau, la mère Clémence, qui fait commerce de dentelles et de bibelots, la grand-mère Caroline, affectueuse envers Ferdinand, l'oncle Édouard, qui les emmène en parties de campagne, et les voisins, malveillants et malheureux. On met Ferdinand à l'école, mais cela le rend malade : il délire. Sa grand-mère meurt (x-xxx). Sur les marchés, où il accompagne sa mère, il se lie avec un voyou : on le remet à l'école. Un été, la famille va en vacances à Dieppe et fait une excursion en Angleterre. Ferdinand obtient son certificat d'études (xxxi-xli). Placé en apprentissage dans une maison de tissus, il est renvoyé quand on le surprend racontant la Légende du roi Krogold à un collègue (xlii-il). Édouard le fait embaucher par un ciseleur; sa patronne lui vole un bijou dont il avait la garde et le fait renvoyer comme voleur (l-lxv). Sur les instances d'Édouard, il est envoyé apprendre l'anglais au Meanwell College de Chatham. Arrivant à Chatham,