Monsieur Bonhomme et les incendiaires
Publié le 31/03/2013
Extrait du document
Monsieur Bonhomme et les incendiaires fut créé en 1958 à Zurich. « Les Bonhomme de Zurich, commente Frisch, trouvèrent qu'on abusait de leur bonté et ne rirent pas longtemps ; ils applaudirent avec beaucoup de sérieux. « Il arriva à Frisch de transformer certains aspects de sa pièce, afin de l'adapter à une situation hi storique précise. Ainsi, lors des premières représentations en Allemagne, Monsieur Bonhomme était un bourgeois allemand qui fraternisait avec les nazis.
«
« -Mais je vous e n
pri e, mon sieur
Bonhomme, faites
comme chez
vous.
»
~------- EXTRAITS
Babette, la femme de Bonhomme,
s'enquiert auprès de son époux
de la raison pour laquelle
il a licencié
l'un de ses employés
BABETIE.
- Pourquoi as-tu licencié Valette ?
BONHOMME.
-Parce que je n'ai plus besoin
de lui.
BABETIE.
-Théodore !
BABETIE.
-Tu étais
toujours satisfait de
son travail.
BONHOMME .
-C'est
justement ce qu'il
cherche à exploiter.
Une participation
à son invention !
Quand il sait parfa i
tement ce
qu'il en
est de notre lotion
capillaire : c'est une
réussite commer
cia le, mais non pas
une invention .
C'est
ridicule! Les braves
gens qui répandent
notre lotion sur leur
crâne chauve pour
raient aussi bien
employer leur pipi.
BONHOMME.
- C' est pourtant vrai ! (Il
s'assure
d'avoir tout mis dans sa serv iette .)
Je suis trop bon, tu as raison: ce Valette , je
m'en vais lui casser les reins.
Les deux malfrats se servent
de la cave de Bonhomme pour
fabriquer des bombes incendiaires.
Bonhomme fait mine de ne rien
remarquer et essaie de s'attirer
leurs bonnes grâces
BONHOMME.
-Je ne vous dérange pas?
DURASSIER.
-Mais je vous en prie, monsieur
Bonhomme,faites comme chez vous.
BONHOMME.
-Je ne veux pas m'imposer ..
.
(O n entend roucouler les pigeons .) Et notre
ami , où est-il ?
DURASS!ER.
- Joe ? Au travail, sacré
flemmard.
Il ne voulait pas y aller sans petit
déjeuner! Je l'ai envoyé ch erc her de la
paille de bois.
BONHOMME.
-De la paille de bois ?
DURASSIER.
-La paille de bois , c'est ce qui
prend le mieux.
(Bon homme rit poliment , comme d'une
médiocre plaisanterie.)
BONHOMME.
-Je vou lais vous dire, Mon
sieur Durassier.
DURASSIER.
- Vous voulez encore nous
mettre
à la port e ?
BONHOMME.
-J'y ai pen sé au milieu de la
nuit (je n'ai plus de somnifères) : ici en haut ,
Messieurs, vous n'avez pas de toilettes.
DURASSIER.
-Il y a la goutt ière.
BONHOMME.
- Comme vous voulez,
Messieurs, comme vous voulez .
Cela
m'a
simplement passé par la tête.
To ut e la
nuit.
Vous aimeriez peut-être vous la ve r ou
prendre une douche.
Vous n'avez qu 'à
utiliser ma salle de bain s ! J'ai dit à
Anna
d'y mettre des serv iettes.
(Durassier
seco ue
la tête.) Pou rquoi secouez-vous
la tête ?
DURASSIER.
-Qu'est-ce qu'il a bien pu en
faire ?
BO HOMME.
- De quoi ?
DURASSIER.
-Vous n'auriez pas une amorce
quelque part ?
(Il cherche par-ci par-là.
) Ne
vous
enfaites pas , M onsie ur Bon hom me,
pour la salle de bains.
Sérieusement.
En
prison, voyez-vo us, il
n'y avait pas de salle
de bains non plu
s.
BONHOMME.
-En prison ?
DURASSIER.
- J oe ne vous a donc pas
raconté que je sortais de prison ?
Traduit de l 'allemand
par Philippe Pilliod,
Gallimard , 1961
NOTES DE L'ÉDITEUR quand Monsieur Bonhomme paraît s ur scène
pour la premi ère fois et que son di sco
urs
révèle en lui l'expl oite ur de moyenne
envergure, usant d'une phraséo logie
hum aniste et chrétienne -le bourgeois par
exce
lle nce -, un chœur l'accom pagne, tout
comme dan s la tragédie antiqu
e.
» Max
Frisch,
« Que signifi e la Parabole », in
Pari s, en 1976: «Comme le dit Frisch , une
parabole ne trouve sa signification que dans
l a confrontation avec les problème s le s plu s
brûl ant s de l'ac tualité
à l'endroit où elle est
jouée.
Elle
fustige allègrement, à
"l 'allem ande '', la lâcheté de la plupart des
po ssé dant
s, la complaisance d'une certaine
cla sse moyenne et d'intellectuels
idéologues en chambre que les barricade s
de 1968 , qu
'ils appelaient de leurs cris,
firent trembler.
» Philippe Huguet, article
paru dans
R éforme, le 13 mars 1976.
Max
Frisch no us donne lui-même quelques
indications sur la genèse de
Monsieur
Bonhomme :
« Bonhomme lie amitié avec
deux incendiaires -par peur d'être leur
victi me.
P our la première fois dans mon
journal de 1948 ,
une not e, à la date du jour,
précède la petite farce en pro se :
" Révo lution en Tchécoslovaquie .
Ça va
vite .
Comme toujo urs quand s'effondre
un
château de cartes" .
Dix ans plus tard,
L' Avant -scène Théâtre ,
n° 587, 1976.
Voici maintenant
un extrai t d'une critique
parue apr ès la représentation de la pièce à
1 Len Sirman 2.
3 pein ture s de Varlin: 2 Arc he Verlag.
Zurich.
1 969: 3 Mallhie sen Fine An Ltd ..
London.
New York.
1985 FRIS CH 03.
»
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