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MOLIÈRE: Le Malade imaginaire

Publié le 22/02/2012

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Soit dit en passant, un imbécile stupide comme Thomas Diafoirus, le fils de Monsieur Purgon, étudiant en médecine et futur médecin, représente un double « cas » de maladie grave. D'une part, il est beaucoup plus atteint qu'Argan, qui, même crédule, sait encore se jouer la comédie ; lui, il est simplement idiot, totalement, sans recul. Il y a plus grave que les malades imaginaires, ce sont les médecins qui sont assez idiots pour se croire médecins, les médecins de bonne foi: entre Monsieur Purgon et Thomas Diafoirus, le plus à craindre des deux n'est pas Monsieur Purgon, parce que celui-ci joue : il joue en somme en duo avec Argan la comédie de la médecine. Ainsi, plus ou moins cousin des comédiens, il représente encore un moindre mal. Diafoirus, d'autre part, est plus dangereux qu'un médecin malgré lui (qui ne se costume en médecin que parce que les événements l'y forcent, donc pour monter une stratégie défensive afin de se sortir d'un mauvais pas), et 'àussi que le médecin grâce au crédule, qu'est monsieur Purgon. Il est médecin malgré sa stupidité de bourrique, et grâce à elle. Diafoirus ne joue pas, et c'est en somme le personnage le plus dangereux de toute la pièce (peut-être même avant Bélise, qui elle non plus ne se joue pas la comédie, mais se joue des autres, dissimule, et manipule). Avec la manipulatrice, le plus dangereux est le manipulé, Diafoirus, manipulé par son père, et à travers lui, par ce que la médecine tout entière s'imagine être. Ne manquons pas de savourer, si l'on peut dire, son nom, dont le ridicule explose moins directement aujourd'hui que jadis. Outre sa terminaison en -us, visant la manie qu'on avait alors de latiniser son nom quand on se voulait docteur, Diafoirus est tout de même fait du début de diarrhée et de foireux. Exercice : essayer de trouver un nom comique moderne équivalant (Thomas Foulachias, ou Merdanget, par exemple).

« Le premier intermède fait intervenir Polichinelle, personnage de la comédie italienne.

Le prétexte de cettearrivée est bien mince puisqu'il s'agit d'un prétendu amour de Polichinelle pour la servante Toinette.Polichinelle raisonne et chante sur le thème de l'amour, puis il est rossé par des archers. A la fin du prologue, on passait de la campagne à la chambre d'Argan.

Au début du premier intermède, onpasse de la chambre d'Argan à la ville.

On revient dans une chambre à la fin de cet intermède. Le second intermède est plus ou moins justifié.

C'est Béralde qui, pour distraire son frère Argan, a amené desmusiciens et des danseurs.

Nous sommes cette fois en pleine fantaisie orientale.

Le spectacle est assuré par« plusieurs Égyptiens et Égyptiennes vêtus en Mores, qui dont des danses entremêlées de chansons ».

Ils fontaussi danser des singes qu'ils ont amenés avec eux. Le troisième intermède est en fait un épilogue burlesque de la pièce.

A la différence des deux précédents, ilest vraiment en relation avec l'action.

Il s'agit, en effet, de la cérémonie d'intronisation, qui va permettre àArgan de devenir médecin.

Le texte est en latin de comédie par allusion au charabia de certains charlatans.

Ilconstitue une vive satire du monde médical de l'époque. Un testament Le Malade imaginaire est l'une des pièces les plus célèbres et les plus populaires de Molière et de tout le théâtre classique français, sinon même la plus célèbre.

Elle a été jouée plus de 700 fois par la Comédie-Française depuis sa création.

Elle est aussi la dernière, et l'une de ses plus subtiles, sous les évidences dudivertissement.

D'une part son thème, celui des ridicules de la médecine et des médecins, traditionnel au théâtre avant Molière, et déjà abordé par lui trois fois, est portéici à un niveau de profondeur, vers une réflexion sur le risque de faire semblant, qui dépasse le simple folkloremédical. Mais, d'autre part, c'est, du point de vue techniquement dramaturgique et théâtral, une sorte de testament deMolière sur sa façon de concevoir la scène, la comédie, le théâtre et même la vie en général dans ses rapports avecsa représentation.

D'abord parce que la pièce est la première à aborder, vu son titre, le sujet depuis le malade, et ensuite, parce qu'elle traite moins des malheurs d'un malade envers ses médecins que, bien plus finement, dequelqu'un qui d'une part joue avec l'idée de maladie et de santé, avec les costumes et les jargons de la médecine, et qui d'autre part est joué, soit par les médecins, soit par ses proches, pour lui nuire ou lui rendre service. C'est donc peut-être d'abord une pièce sur le jeu — où, sur la scène, on nous montre pour ainsi dire un deuxièmethéâtre dans le premier , une pièce sur la comédie dans une comédie. Le titre rappelle nettement qu'il s'agit d'un malade imaginaire, mais, à cause de son succès, on s'est malgré cela trop souvent contenté de n'y voir que le malade, le crédule, et les charlatans, en oubliant que son principalpersonnage est aussi acteur volontaire.

Cette pièce sur l'illusion consentie est le véritable testament d'un hommequi consacra toute sa vie au jeu de faire croire, et sous tous ses aspects possibles, comme auteur, comme metteuren scène et comme acteur, jusqu'à sa mort sur les planches dans le rôle même de cet homme qui s'amusait à joueravec l'idée d'être malade rôle qu'il avait vécu, écrit et joué. Le malade qui meurt en jouant la comédie Le 17 février 1673, un homme qui joue sur une scène de théâtre quelqu'un qui joue à faire semblant d'être malade,cet homme est en train de faire semblant d'être sacré médecin.

Et c'est au moment de son serment pour rire (quiest aussi la der- nière parole qu'il ait à dire sur scène) qu'il commence son agonie, son agonie réelle.

Peu de temps après la fin de laquatrième représentation du Malade imaginaire, Molière, auteur de la pièce, metteur en scène et acteur du rôle principal, est mort.

D'une maladie réelle que les médecins réels n'ont su ni guérir ni soigner.

Mais mort en jouant aumalade, mort en se moquant des médecins. Il est peu de coïncidences aussi fortes et aussi émouvantes dans l'histoire du théâtre.

Celle-ci a pris la force d'unelégende et d'une tradition.

Elle le mérite.

Chaque année, la Comédie-Française éclaire d'un projecteur unique, sur lascène, le fauteuil où Molière est mort en jouant.

Cet événement semble fermer une vie consacrée au théâtre sur uncoup de théâtre, jusqu'à sembler prolonger l'illusion du théâtre par la réalité, la vie ou, à l'inverse, réduire la vie d'uncréateur à l'accessoire d'une de ses oeuvres. ARGAN, UN CAS DE MALADIE SOCIALE Argan joue à être malade, mais ne l'est pas, et ne veut pas le savoir, même quand il oublie le rôle qu'il veut sedonner.

Être malade est même sa façon de bien se porter.

Il n'est pas malade malgré lui, à son esprit défendant, ilne l'est pas non plus inconsciemment, comme on voudrait le dire aujourd'hui.

Il l'est imaginairement, c'est-à-dire qu'il se le figure parce qu'il le veut bien et quand il le veut.

Et au début de la pièce, Molière le montre de façoncatégorique, il ne le veut pas.. »

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