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MOLIÈRE: L'AVARE (Fiche de lecture)

Publié le 20/11/2010

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«[...] Je ne veux pas avoir sans cesse devant moi un espion de mes affaires, un traître dont les yeux maudits assiègent toutes mes actions, dévorent ce que je possède, et furettent de tous côtés pour voir s'il n'y a rien à voler.

[...]

Je veux renfermer ce que bon me semble, et faire sentinelle comme il me plaît. Ne voilà pas de mes mouchards, qui prennent garde à ce qu'on fait? (Bas, à part.) Je tremble qu'il n'ait soupçonné quelque chose de mon argent. (Haut.) Ne serais-tu point homme à faire courir le bruit que j'ai chez moi de l'argent caché ?«

(L'Avare, I, 3)

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« fondamentale du comique de Molière.

Ce dernier, lors de son long séjour en Province, a pu observer de près lestroupes ambulantes italiennes de la commedia dell'arte, auprès desquelles il prendra des leçons. Pièce de la maturité, L'Avare n'échappe pas à cette présence de la farce, une farce remise au goût du jour par l'auteur, mais profondément affinée, ayant gagné en profondeur, en complexité et en signification.

Inspirée dePlaute, à l'image de la plupart des pièces du répertoire de la comédie italienne (qui reprennent également desoeuvres de Térence), L'Avare est construit sur le canevas traditionnel de ce théâtre : un vieux barbon maniaque et antipathique opposé à deux amoureux dont il contrarie les projets, mais qui finissent par triompher grâce aux talentsconjugués d'une entremetteuse et d'un valet astucieux et retors. e Le vieux barbon ici est Harpagon, riche bourgeois célèbre pour son avarice.

Il a deux enfants : Élise, secrètementfiancée à Valère qui parvient à s'introduire incognito chez Harpagon, et Cléante, épris de Marianne.

Harpagon veutépouser Marianne et marier Élise à Anselme, un vieux gentilhomme qui l'accepte sans dot.

Intrigues, chassés-croiséset quiproquos se succèdent jusqu'au dénouement qui marque le triomphe de l'amour : Anselme en réalité n'est autreque le père de Valère et Marianne; les amoureux se marient et Harpagon retrouve la précieuse cassette qu'on luiavait dérobée. Sur ce canevas, Molière applique les procédés de la farce.

En premier lieu le comique fondé sur la gestuelle, commedans les scènes où s'échangent des coups de bâton (I, 3 ; III, 1), où se produisent des chutes (Harpagon, bousculépar La Merluche, s'étalant par terre à l'acte III, scène 9).

La pièce abonde en lazzi, ces actions comiques fondées sur le mime : la scène 3 de l'acte I, où Valère est censé exhiber une seconde paire de mains pour satisfaireHarpagon, les changements de costume d'une réplique à l'autre de Maître Jacques qui assume à la fois les fonctionsde cocher et de cuisinier (III, 1), où encore la façon dont Harpagon explique à Brindavoine comment masquer latache d'huile qui dépare son pourpoint (III, 1). Les dialogues enfin sont porteurs de leur part de rire, car Molière fait porter sa caricature autant sur le langage quesur les gestes, n'hésitant pas à recourir à l'hyperbole pour souligner l'avarice démesurée d'Harpagon : «Au voleur ! au voleur ! à l'assassin ! au meurtrier ! Justice, juste ciel ! je suis perdu, je suis assassiné ; on m'acoupé la gorge, on m'a dérobé mon argent [...]» (L'Avare, IV, 7) L'obsession de l'avare peut également s'exprimer à travers le comique de répétition: c'est le cas à l'acte I, scène 5,où Harpagon ne peut s'empêcher de répéter à quatre reprises en guise de réplique le fameux «sans dot». Le quiproquo enfin, ingrédient traditionnel du comique, est utilisé pour susciter le rire ; c'est sur un quiproquo quecommence la scène 2 de l'acte V, c'est sur des quiproquos que sont construites la scène 5 de l'acte IV, la scène 3de l'acte V, etc. UNE COMÉDIE DE CARACTÈRES Affinant la farce, Molière fait évoluer ses personnages traditionnels vers des types variés qui, s'ils conservent leurdimension caricaturale, n'en acquièrent pas moins, à force de vérité psychologique, une véritable épaisseur humaine. La plupart des pièces de Molière sont bâties autour d'un personnage central, souvent défini par un trait decaractère saillant qui donne son nom à la pièce : le malade imaginaire, le bourgeois gentilhomme, le misanthrope.Molière a su créer de véritables types dont les noms sont passés dans le vocabulaire courant (un tartuffe, unharpagon). Sous les traits d'Harpagon, Molière a immortalisé le type de l'avare.

Les premières répliques d'Harpagon quand ilapparaît sur scène définissent déjà le personnage et dévoilent d'emblée son rapport maladif à l'argent : «[...] Je ne veux pas avoir sans cesse devant moi un espion de mes affaires, un traître dont les yeux mauditsassiègent toutes mes actions, dévorent ce que je possède, et furettent de tous côtés pour voir s'il n'y a rien àvoler. [...] Je veux renfermer ce que bon me semble, et faire sentinelle comme il me plaît.

Ne voilà pas de mes mouchards,qui prennent garde à ce qu'on fait? (Bas, à part.) Je tremble qu'il n'ait soupçonné quelque chose de mon argent.

(Haut.) Ne serais-tu point homme à faire courir le bruit que j'ai chez moi de l'argent caché ?» (L'Avare, I, 3) Pb- Le vieil avare amoureux d'une jeune fille est un rôle traditionnel de la commedia dell'arte, incarné notamment par Pantalon.

Molière enrichit le caractère, en creusant sa complexité.

Il explore la psychologie de son personnage,mettant au jour toutes ses implications.

Car, en réalité, Harpagon est bien plus qu'un avare au sens restreint duterme.

C'est un malade, monomaniaque et obsessionnel, chez qui l'amour de l'argent n'est qu'un symptôme — le plusvoyant — parmi d'autres.

Son nom même, dérivé du mot latin harpago («grappin, harpon»), désigne son obsession: il ne conçoit son rapport aux choses et aux êtres que par le biais de l'accaparement, de la possession jalouse.

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