Moderato cantabile de Marguerite Duras
Publié le 22/02/2012
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LE CONTEXTE
Les années 50 ont vu naître ce que l'on appelle le Nouveau Roman.
Bien que l'oeuvre de Marguerite Duras soit troppersonnelle pour être rattachée à quelque mouvance que ce soit, l'esthétique de Moderato Cantabile est proche decelle du Nouveau Roman : elle refuse l'approche psychologique des personnages, l'intrigue est réduite à rien, l'auteurne donne aucune « leçon »...
LE TEXTE
Anne Desbaresdes assiste à la leçon de piano que prend son petit garçon.
Soudain, on entend crier.
C'est unefemme qui a été tuée par son amant.
Anne, fascinée, voit le criminel embrasser la morte ; chaque après-midipendant une semaine, elle revient dans le café, théâtre du crime, pendant que son enfant joue sur le port.
Elleparle, tout en buvant des verres de vin, avec un homme, Chauvin, et tous deux tentent de reconstruire l'histoire decette femme assassinée, en même temps qu'ils composent la leur — histoire d'amour peut-être.
Mais l'amour est liéà la mort et après que leurs lèvres se sont jointes, pour quelques secondes seulement et pour que « ce fût fait »,l'homme dit à Anne : « Je voudrais que vous soyez morte.
— C'est fait », répond-elle.
Elle quitte le café, sans doutepour la dernière fois.
LES THÈMES MAJEURS
• La musiqueLa musique, avec la série de gammes imposée au fils d'Anne, symbolise le « dressage » social auquel on soumetl'enfant.Mais la musique donne aussi son titre au roman : « modérée et chantante » (moderato cantabile), elle offre unrempart contre la folie et les pulsions de mort.
En outre, elle révèle des émotions très fortes : la communion entreAnne et son fils, cet état où l'un est l'autre.
L'ennui bourgeoisLes invités de la réception chez Anne (chap.
7) représentent le monde bourgeois.
Les gammes de Mlle Giraud, lesconversations creuses, « neutres », la terrible voracité des convives donnent la nausée à Anne Desbaresdes.
L'amour et la mortAnne et Chauvin sont fascinés par ce qu'ils imaginent être un crime passionnel et reconstruisent l'histoire d'amour àl'issue fatale.
Ils la vivent symboliquement, y cherchent l'amour parfait, un cri après lequel « elle ne parlera plusjamais », épanouie dans la mort.
L'ÉCRITURE
• L'objectivitéLe narrateur se contente ici de rapporter des faits et des gestes, des paroles et des bribes d'émotion.
Il s'interdittout jugement, toute intrusion dans les pensées ou les sentiments des personnages.
Au lecteur de voir dans cesinformations en miettes des suggestions et des signes ; de faire le travail de les deviner, de les interpréter, de(re)construire l'histoire d'Anne Desbaresdes et Chauvin.
• Une langue désarticuléeLes dialogues au style parlé reproduisent les banalités de la conversation.
Dans ce discours désarticulé, chaquepersonnage, à la recherche de soi et de sa vérité, met en mots, péniblement, ses émotions.
Ce langage de tous lesjours n'est pas utilisé pour sa facilité.
Il se cherche, s'interrompt, hésite.
Il devrait, par là, pouvoir dire la plusgrande vérité : l'indicible.
Cette apparente difficulté est rendue avec un art consommé, qui n'est pas dénué depréciosité..
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