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Mademoiselle Julie

Publié le 30/03/2013

Extrait du document

Écrite en 1888, la pièce fut interdite par la censure danoise lors de la répétition générale, à Copenhague, en 1889, retirée de l'affiche le lendemain de la première en Allemagne en 1892 et montée avec succès par Antoine à Paris en 1893. Le public de Stockholm ne verra Mademoiselle Julie qu'en 1906. 

« « Des barrières existeront entre nous, aussi longtemps que nous resterons dans cette maison.

,.

EXTRAITS -- - ----~ Le valet porte un jugement sévère sur la jeune fille de la maison JEAN.

- Mademoiselle est trop collet monté dans certains cas et pas assez fière dans d'autres, tout comme madame la comtesse de son vivant.

Elle ado­ rait être à la cuisine ou dans l'écurie, mais elle ne serait jamais sortie dans une voiture à un seul cheval ; elle portait des manchettes sales, mais elle exigeait la cou­ ronne sur les boutons .

Mademoiselle, pour en revenir à elle , ne prend non plus guère soin de sa personne.

J'irai même jusqu'à dire que ce n'est pas une fille bien.

Tout à l'heure, quand elle dan­ sait dans la grange, elle a arraché le garde­ chasse à Anna et l'a invité elle-même.

Jamais nous ne nous conduirions de cette façon.

C'est comme ça quand les maîtres veulent singer les gens du commun : ils de­ viennent communs.

Mais est-elle belle ! Superbe ! Ah ! ces épaules ! et ...

et cetera.

La minute de vérité JULIE.

- Laquais ! Domestique ! Debout quand je parle ! JEAN.

- Paillasse à domestiques, garce à laquais ,ferme-là et fiche le camp d'ici ! C'est toi qui viens me raconter que je suis grossier? Jamais personne de ma condition ne s'est conduit aussi grossièrement que toi ce soir.

Crois-tu qu'une servante ose atta­ quer un garçon comme tu l'as fait ? As-tu déjà vu une fille de ma classe se jeter à la tête d'un homme de cette façon? Jamais je n'ai vu ça que chez les bêtes ou les roulures! JULIE, anéantie.

- C'est juste ; frappe-moi, piétine-moi ! Je mérite tout ça.

Je suis ignoble, mais aide-moi ! Aide-moi à sortir de là, s'il y a un moyen d'en sortir.

JEAN, plus gentil.

-Je ne désire pas m' abais­ ser en me refusant une part de l'honneur qui revient au séducteur.

Mais vous figurez-vous qu'une personne dans ma position aurait osé vous regarder si vous ne l'y aviez pas invitée vous-même ? ...

J'en suis encore aba­ sourdi! JULIE .

- Et fier.

..

Jean prend les ordres au tube acoustique, l'ancêtre du téléphone JEAN.

- C'est Jean, monsieur le comte.

(Il écoute.

Le public n'entend pas ce que dit le comte.) Oui, monsieur le comte! Oui, mon­ sieur le comte! Dans un instant! (Il écoute.) Tout de suite, monsieur le comte.

(Il écoute.) Très bien ! Dans une demi-heure ! JULIE.

-Qu'est-ce qu'il a dit ? Mon Dieu ! Qu'est-ce qu'il a dit ? JEAN .

- Il veut ses bottes et son café dans une demi-heure.

JULIE.

-Dans une demi-heure, alors ! Oh ! je suis si fa- ~ tigu~e!Je~'ailaforce ~ ~ de rzenfazre ! Je ne C · ,:_ .• ,, .

- peux pas me repen- ,_ l! tir , je ne peux pas partir, je ne peux pas rester, je ne peux pas vivre ...

ni mourir ! Aidez-moi, mainte­ nant! Ordonnez, etje vous obéi­ rai comme un chien ! Rendez-moi ce dernier service, sauvez mon hon­ neur, sauvez son nom.

Vous savez ce que je devrais vouloir.

..

et que je ne peux pas vouloir.

..

Il faut le vouloir, vous, et m' ordon­ ner de le faire ...

Traduit IED""'-""" du suédois par Boris Vian .............

.:..._~- « Crois-tu qu'une servante ose attaquer un garçon comme tu l'as fait ? As-tu déjà vu une fille de ma classe se jeter à la tête d'un homme de cette façon ? ,.

NOTES DE L'ÉDITEUR « Quand on dit " Strindberg '', à quoi pense+ on tout d'abord? A un incessant règlement de comptes entre des êtres dressés les uns contre les autres, dans une perpétuelle revendication, une perpétuelle protestation.

Ils crient et se jettent à la figure la note de tous les actes mauvais qu'ils se reprochent, actes du passé qui salissent le présent et compromettent l'avenir.

» Arthur Adamov, Strindberg, L'Arche, 1955.

« Si l'histoire terrible que conte Mademoiselle Julie peut atteindre si fort et si juste les sensibilités aujourd'hui, ce n'est pas tant par sa dimension sociale -qui porte nettement la marque de son temps - ni même par la dimension psychanalytique que l'on a souvent voulu y découvrir.

Ce qui, je crois, parle immédiatement à notre époque, c'est le tourbillon vertigineux qui emporte Julie et Jean de la fête au désespoir, de l'amour à la mort, qui leur fait parcourir en une courte nuit toute une vie.

Nulle fatalité cependant dans ce drame, c'est de l'autre qu'ils puisent leur énergie, c'est parce que jamais ils ne peuvent demander réellement grâce, réclamer un silence, un temps de réflexion, qu'ils s'entraînent mutuellement vers un petit matin qui a le visage du désespoir et de la mort.

» Bernard Beuvelot, « De l'amour 1 coll .

Vio llet 2, 3, 4 de ssins de C.

Perrin, Edita-Servi ce/ D.R .

à la mort, Mademoiselle Julie», l'Avant­ Scène, 15 mars 1982.

STRIND BERG 02. »

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