Livre II : « L'ordre est rétabli » (choix de poèmes)
Publié le 16/03/2015
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Livre II : « L'ordre est rétabli «
(choix de poèmes)
RÉSUMÉ
PIÈCE II, « Au PEUPLE «. Le poète s'adresse au peuple, dont une partie a réagi contre le coup d'État du 2 décembre pour défendre sa liberté, mais qui est maintenant anéanti. Le poète-Christ tente de ressusciter ce peuple (« Lazare !/Lève-toi ! «) qui incarne les valeurs de la Révolution et de la « Géante République «, lesquelles se trouvent assaillies par « tous les sabres de Lilliput «. C'est en fait l'Europe qui apparaît menacée par la « vieille louve Tyrannie «, qu'alimentent l'évêque ou le pape : on entend les pleurs des veuves et des mères. Mais à la dernière strophe, on pressent le réveil du peuple, sa résurrection et le renversement des tyrans.
PIÈCE III, « SOUVENIR DE LA NUIT DU 4 «. Le poète se souvient dans ce poème de cette nuit du 4 décembre lors de laquelle il assista à la veillée mor-tuaire d'un enfant de sept ans tué par les soldats du gouvernement. Le poète concentre le poème sur l'aïeule qui reste et qui ne comprend pas la mort de son petit-fils « Pourquoi l'a-t-on tué? je veux qu'on me l'explique ? « Le poète tente de lui faire comprendre par le biais d'une ironie insoutenable que c'est dans la mesure où Napoléon III veut sauver « La famille, l'Église et la Société « que les vieilles grands-mères « cousent dans le linceul des enfants de sept ans «.
PIÈCE V, « PUISQUE LE JUSTE EST DANS L'ABIME... «. Le poète fait d'abord le constat douloureux que la République a baissé la tête face à l'Empire, et avec elle ont disparu toutes les grandes vertus et valeurs (« L'honneur, la loi, le droit, la gloire/Et ceux qui sont dans le tombeau «) ; devant cet état de fait, le poète a choisi alors l'exil (« J'aime cette île solitaire, Jersey «) à l'instar de toutes ces qualités qui ont déserté la France. Il adopte une attitude de résis¬tance, semblable à celle de « la roche solennelle « battue par les vagues.
PIÈCE VII, « À L'OBÉISSANCE PASSIVE «. Ce long poème débute par une opposition entre la gloire des soldats de la Révolution (1) et ceux qui, lors du coup d'État, tuent des enfants et vont « foulant aux pieds vieillards sanglants, femme mourantes, /Droit au crime « (2). Puis le poète nous dévoile le contrat passé entre Napoléon III (dont le nom est « Guet-Apens «), et les généraux achetés. Les soldats sont alors présentés au cours de leurs orgies satisfaites tandis que le poète rappelle la grandeur des soldats héroïques, les vétérans (4) ; de même les drapeaux sublimes du passé sont opposés aux piètres dra¬peaux du 2 décembre (5) ; mais pour l'instant « cinq bandits «, « cinq galé¬riens « (« Maupas, Morny, Magnan, Saint-Arnaud, Bonaparte «) ont eu rai¬son de Paris et de la France (6) ; par eux le soldat a été manipulé (« ô légion trompée «) puisque, étant issu du peuple, on l'utilise pour tirer sur le peuple (7), ce qui explique le titre du poème. Finalement il ne reste plus au poète bel¬luaire qu'à réclamer de Dieu toute la force nécessaire pour aller seul écraser « l'empire et l'empereur « (8).
«
..
1 -L'ÉVOCATION DE LA MORT
Ce thème de la mort revient de manière obsessionnelle dans ce Livre Il, ironi
quement intitulé« L'ordre est rétabli» (par le massacre précisément).
Dès le pre
mier poème on entend le ton de la lamentation ( « Miserere ! ») qui s'entrelace aux
bruits de la fête(« Des pétards aux Champs-Élysées!»).
Tandis que la pièce Il fait
appel aux paroles christiques pour ressusciter le Peuple-Lazare, le poème intitulé
«Souvenir de la nuit du 4 »livre, avec un pathétique contenu, le récit d'un jeune
enfant tué par balle.
Ce motif de !'enfant mort se rencontre
à nouveau au dernier
vers de la pièce
V ainsi que dans le dernier poème du Livre II ( « Ils ont tué, carre
four Tiquetonne,/
Un enfant de sept ans»).
Le motif de l'enfant tué dépasse le
simple fait divers, car repris ainsi en écho,
à travers une poétique du ressasse
ment,
il a pour fonction de souligner l'absurdité d'un tel régime politique.
Il -LES MÉTAMORPHOSES DE L'ANTITHÈSE
La figure de l'antithèse apparaît de manière frappante dans la pièce VIII,« À
!'obéissance passive » : on y découvre deux types de soldats, ceux de « !'An deux » (qui ont sauvé la patrie) et ceux de décembre qui ont participé au coup d'État; les
premiers sont présentés glorieusement dans une geste épique
(à l'aide d'intensifs,
d'images d'ordre mythologique et sur un rythme alerte et soutenu) : contre l'Eu
rope
« Toute entière debout comme une hydre vivante,/ Ils chantaient, ils allaient,
l'âme sans
épouvante»; les autres tirent sans pâlir« sur les passants tremblants».
L'antithèse que l'on relèvera
dans« Idylles» s'exprime à travers l'alternance des
tons.
La pièce VI,« L'autre président», présente une antithèse plus trouble dans
laquelle Dupin, président de !'Assemblée législative qui aurait
dû se dresser contre
Napoléon, a préféré
plonger« dans l'égout».
Enfin on peut signaler que la struc
ture de la pièce IV repose elle aussi sur une figure antithétique dans la mesure où la
pureté et la sainteté du cosmos, exprimées sur le mode de l'invocation affective
(« Ô soleil...
Monts sacrés ...
Ô vierge forêt...
»),sont brusquement sommées de
répondre, à la chute du poème, à une interrogation qui, en bonne rhétorique, joue
sur le caractère implicite de la réponse : « Que pensez-vous de ce bandit?».
Ill -LE STATUT DU POÈTE
Le poète se fait toujours l'écho de toutes les voix qu'il entend, mais son art ré
side dans le fait de les
mettre en présence comme dans « Idylles » (I), ce qui suf
fit à comprendre celles qui parlent pour lui.
Par ailleurs il joue autant sur le silence
suspensif (IV) que sur la simplicité
du dire(« J'aime le malheur qui m'éprouve»,
V)
où l'on peut entendre sa voix la plus personnelle.
Plus spécifiquement dans ce
Livre Il
il prend les traits du Christ qui appelle Lazare avec la force de la répéti
tion et de la détermination injonctive (III) ; celui qui se dresse seul contre tous ap
paraît ainsi doué
d'une nature sacrée(« 0 Dieu vivant, mon Dieu! prêtez-moi
votre
force», VIII).
Mais l'image dominante qui clôt le Livre est celle du poète
belluaire*, personnage à la
stature épique («j'écraserai du pied ...
L'empire et
l'empereur
» ), manifestant les emblèmes de la fureur et de la vengeance
( « fouet », « suaire » )..
»
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