Littérature du XVI ème siècle : Mikhaïl Bakhtine , L'oeuvre de François Rabelais et la culture populaire au Moyen Age et sous la Renaissance
Publié le 23/12/2012
Extrait du document
Ce qui démarque
également le grotesque du Moyen Âge et de la Renaissance du grotesque romantique et moderniste
c'est la différence du destinataire de comique grotesque. Effectivement, le « réalisme grotesque « serait
destiné au plus large public, comme nous l'avons dit précédemment à l'ensemble du peuple , le rire
populaire se caractérise par son universalité. A l'inverse le grotesque romantique et moderniste serait
plutôt destiné à des particuliers, le rire serait plus individuel. Bakhtine appelle ce grotesque « grotesque
de chambre «. Tandis que le grotesque du Moyen Âge rapproche et s'apparente au monde de l'homme,
le grotesque romantique et moderniste, lui , s'apparente plus à un monde abstrait, plus spirituel. Le
grotesque romantique communique cette peur du monde : peur de la mort, de la vieillesse, de
l'accouchement , de tout ce qui constitue une sorte de « vie inférieure «. Si le masque dans le grotesque
du Moyen Âge à une fonction purement clownesque , il devient rapidement, dans le grotesque
romantique et moderniste, synonyme de dissimulation et de tromperie.
7- Après avoir lu cette introduction, comment pourriez vous caractériser le comique de Rabelais?
Le comique de Rabelais se définit dans le contexte de la culture populaire médiévale, il en est
indissociable. Cette culture populaire fonde un comique particulier du peuple pour le peuple, c'est un
comique qui se distingue dans son universalité et qui appartient à
«
les divers rites comiques qui s'y rattachent.
Bakhtine nous explique ces différents rites comiques propres
au carnavalesque et leur influence.
Il dit ainsi : « C'était une ambiance de carnaval qui présidait à la
représentation de mystères et de soties.
[…] Toutes ces formes de rites et spectacles organisées sur le
mode comique étaient répandues dans la totalité des pays d'Europe [...] Elles donnaient un aspect
du monde, de l'homme et des rapports humains totalement différent, délibérément non officiel, extérieur à
l'Église et à l'État » .
La deuxième à travers les œuvres comiques verbales désigne les œuvres comiques différentes,
orales ou écrites, en latin ou en langue vulgaire (langue romane) .
On relève ainsi : « Toute cette
littérature était imprégnée de la vision carnavalesque du monde […] elle- même constituait à son tour une
littérature de fête, récréative […] cette littérature demeure l'expression de la conception du monde
populaire et carnavalesque.
» Bakhtine explique que ces œuvres de littératures comique se rattachent au
carnaval , en particulier le théâtre comique de l'époque ( notamment Le Jeu de la Feuillée D'Adam de la
Halle)
La troisième à travers les différents genres du vocabulaire familier à savoir les injures, les jurons ou
encore les blasons populaires.
Bakhtine explique que du fait que le carnaval est une courte période
durant laquelle les barrières et les interdits tombent on retrouve certaines libertés du point de vue du
langage employé, la naissance d'un « contact familier » qui se reflète à travers l'emploi de grossièretés
(souvent blasphématoires).
Selon Bakhtine « tous les genres et formes de ce langage ont exercé une
puissante influence sur le style de Rabelais.
»
4- Définissez plus particulièrement les caractéristiques du carnaval.
Couramment, l'adjectif « carnavalesque » signifie
ce qui est en rapport avec le carnaval .
Ici Bakhtine en fait une définition plus exhaustive : le carnaval
n'est pas une fête folklorique quelconque, c'est l'expression de la culture populaire dans toute sa
splendeur.
L'occasion pour le peuple de renverser, temporairement, toutes les hiérarchies, et de créer
une atmosphère de liberté.
Le carnaval établit des rapports familiers qui se reflètent à travers l'emploi du langage familier (
grossièretés) , ainsi qu'à travers les relations entre acteurs et spectateurs.
Bakhtine s'exprime ainsi :
« c'est ce qui a donné naissance au style du langage carnavalesque de la place publique dont nous
trouverons d'abondants échantillons chez Rabelais.
[...] le nouveau type de rapports familiers établis au
cours du carnaval se reflète dans toute une série de phénomènes du langage.
[…] le carnaval ignore
toute distinction entre acteurs et spectateurs ».
C'est aussi et surtout une sorte d'affranchissement provisoire de la part du peuple , le renversement des
hiérarchies .
Bakhtine écrit : « Le principe comique qui préside aux rites du carnaval les affranchit
totalement de tout dogmatisme religieux ou ecclésiastique […] certaines formes carnavalesques sont une
véritable parodie du culte religieux.
Toutes ces formes sont résolument extérieures à l'Église et à la
religion.
Elles appartiennent à la sphère totalement à part de la vie quotidienne.
»
Les formes carnavalesques
appartiennent pour la plupart au domaine du jeu, aux formes du spectacle théâtral.
C'est un spectacle
pour l'ensemble du peuple.
Les bouffons et les fous en sont les personnages types.
Les spectacles sont
des épopées à caractère parodique mettant en scènes des personnages bouffons, sots et grotesques.
Le
comique touche tout le monde on y rit d'un rire joyeux et allègre mais aussi sarcastique et railleur.
Le rire
est donc universel et ambivalent.
S'il peut paraître dénigrant il ne l'est que dans une idée de renouveau ,
il rabaisse et ressuscite à la fois .
Tous rient du monde entier :le monde entier paraît comique, il est perçu
et connu sous son aspect risible, dans sa joyeuse relativité ».
Bakhtine insiste sur ce climat de fête qui est essentiel au carnaval : « Le carnaval, c'est la seconde vie du
peuple, basée sur le principe du rire.
C'est sa vie de fête.
La fête est le trait fondamental de toutes les.
»
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