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Lettres d'amour à Sophie

Publié le 12/04/2013

Extrait du document

amour

Le destin des deux amants fut bien différent. La malheureuse Sophie devint veuve, resta au couvent, revit une dernière fois Mirabeau et se suicida à l'âge de trente-six ans, le 10 septembre 1789. Quant au comte Honoré Gabriel Riqueti de Mirabeau, il parvint à faire réviser le jugement qui l' avait condamné pour rapt. Il déploya ensuite une intense activité de pamphlétaire antimonarchiste et d' écrivain politique, avant de devenir un député aux discours admirés et largement applaudis durant la Révolution. Pièce

amour

« « ••• le bien moral, utile, et même nécessaire à l'homme, indispensable à l'organisation et au maintien de la société, est obligatoire pour tout être raisonnable ...

» ,..---- ---- -- EXTRAITS Mirabeau exprime parfois des élans sublimes Oui, ma Sophie, je le crois, je le crois du fond de mon âme, nos cœurs étaient uniquement faits l'un pour l'autre ; toi seule pouvais me rendre constant, et même Mirabeau déclare amoureux ; car tu ne dois pas croire, ô mon amie, que j'eusse jamais connu l'amour devant toi.

La fièvre de mes sens n'avait pas plus de rapport aux transports que tu m'inspires, qu'il n'y a de comparaison à faire entre toi et les femmes auxquelles j'ai porté mes hommages avant d'être ton époux.

Je te l'ai dit cent fois : ta lan gue, ta langue parfumée quand elle erre sur mes lèvres, me trouble mille fois plus que je ne le fus jamais par le dernier degré du plaisir dans les bras d'une autre femme .

qu'il n'en sait rien de Dieu Mais enfin que penses-tu, me dira peut­ être Sophie ? Y a-t-il un Dieu ? n'y en a-t-il pas ? Se mêle-t-il des affaires de ce monde ? ne s'en mêle-t-il pas ? Ici, je te répondrai naïvement ce que je t'ai répondu et ce que je te répondrai bien souvent.

Je n'en sais rien ; ce sont quatre grands mots ; crois­ moi .

Je n'en sais rien, et peu m'importe, parce que je suis assuré qu'il m'est impos­ sible d'en savoir plus que j'en sais, et que ma bonne foi, mes sentiments, mes inten­ tions ne sauraient déplaire à l'être infini­ ment juste, s'il en est un.

Je ne sais ni s'il existe, ni comment il existe ; mais je sais que le bien moral, utile, et même nécessaire à l'homme, indispensable à l'organisation et au maintien de la société, est obligatoire pour tout être raisonnable, et même assez fréquemment inspiré à tout être sensible par son institution, dont il faut bien se garder de négliger les inspirations.

Je sais que s'il n'en est pas, l'homme juste et bon sera souvent le plus heureux et le moins agité ...

La fille des amours de Mirabeau et de Sophie est morte Chère amie! loin de nous les ménagements des âmes pusillanimes ...

Notre enfant n'est plus ! eh bien, je te reste : tu m'aimais en e lle ; rends-moi tout l'amour que tu lui por­ tais , et que ton affection jusqu'ici divisée se concentre en un seul objet ...

Ô mon tout ! ô mon bien! je vois tes douleurs, et tu sais si je les partage ...

Hélas! je ne puis de même mêler mes pleurs aux tiens ! ...

L'amour ne peut imposer silence à la nature, mais il peut et doit la conso ler ; il peut et doit obtenir qu'un découragement funeste ne nuise pas à ses plus chers intérêts, à ta santé, à ta vie.

Fais-moi donc le sacrifice, non pas de ta douleur, mais de ses égarements.

Verse des larmes ; répands-les dans mon cœur ; épanche tes regrets ; mais n'en aiguise pas la pointe, déjà trop acérée, par une opiniâtreté qui t'arracherait à tes devoirs , désespérerait ton ami, et lui ferait pren­ dre en hor­ reur la vie avec laquelle tu dois le ré- concilier.

Extrait d'une lettre de Mirabeau datant de l'époque de son emprisonnement à Vincennes (1778) et adressée au roi Louis XVI.

NOTES DE L'ÉDITEUR qui n'ont fouillé, qui n'ont appris les Lettres à Sophie?» pantelant en confessant humblement ses fautes.

Oh, quel tableau à défier le peintre ! quel drame impossible au théâtre ! Cet homme ne veut pas mourir étranglé par des geôliers : il se sent providentiel.

A sa maîtresse qui lui parle de suicide, il répond : vie, résurrection, liberté ! A son père, il demande en grâce d'être envoyé sous le climat meurtrier des Indes, pourvu qu'il sorte de Vincennes.

» E.

Dentu, Libraire­ éditeur, Paris, 1887.

« Cette correspondance ardente, passionnée , ressemble à celle d'Héloïse et d' Abélard : " Quels sont, dit Mario Proth, les jeunes gens avides de savoir, les amants avides de sentir, les historiens à la recherche de la vérité, les écrivains, les artistes en quête de belle éloquence et de passion vivante, les hommes d 'État même et les philosophes enamourés du progrès social « Mirabeau prend tous les accents, chante toutes les gammes.

Il a en lui les laves et les fleurs de la terre, les foudres et les rayons du ciel.

Le voyez-vous, dans un cabanon, entre quatre murailles, pleurer de rage et rire de pitié, tonner et prier, accuser les hommes et les implorer ; demander justice au nom du droit et, de guerre lasse, tomber 1 Mirabeau par F.

L onsing (v.

1790), musée des Beau x-Arts , B o rdea ux/ Giraudon 2 lith ographie d'ap rès Begnier , B.N.·/ coll.

Viollet 3 CAP-Viollet 4 B. N.

/ Giraudon S B.N.

/ ND-Viollet MIRABEA U02. »

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