Les Parents terribles de Cocteau
Publié le 05/04/2013
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Présentée en 1938, la pièce de Cocteau, Les Parents terribles, remporte un immense succès, malgré les problèmes qu'elle connaît avec le Conseil municipal de Paris, qui, qualifiant la pièce d' « incestueuse «, l'oblige à changer de théâtre. En 1948, Jean Cocteau porte à l'écran sa pièce, Les Parents terribles, avec Yvonne de Bray, Gabrielle Dorziat, Josette Day, Jean Marais et Marcel André. Cocteau considère ce film comme sa plus grande réussite cinématographique.
...
«
-------- EXTRAITS
Yvonne attend son fils,
qui n'est pas rentré de la nuit
YVONNE.
-Léa, où cet enfant a-t-il couché ?
Comment ne se dit-il pas que je deviens
folle ?
...
Comm ent ne me téléphone-t-il pas ?
Enfin, ce
n'est pas difficile de téléphoner.
..
LÉO.
-Cela dépend.
S'ilfaut mentir, les êtres
propr es, neufs, maladroits comme Mi
c hel, détestent le téléphone .
YVONNE.
-Pourquoi Mik mentirait-il ?
LÉO .
-De deux choses l'une: Ou bien il
n 'ose ni rentrer ni téléphoner.
Ou bien il se
trouve si bien ailleurs
qu'il ne pense ni à
l'un ni à l'autr e.
De toute manière , il cache
quelque chose.
YVONNE.
-Je connais Mik.
Tu ne vas pas
m 'a
ppr endr e à le connaître .
Oublier de
rentrer, il n'en est pas question.
Et, s'il n'ose
pa s prendr e le téléphone , c'est peut-être
qu'il court un danger mortel.
Peut-être qu'il
ne peut pas téléphoner.
LÉO.
-On peut toujours téléphoner.
Michel
peut et ne veut pas téléphoner.
Première rencontre entre Madeleine
et la famille de Michel
MICHEL.
- C'est maman ...
(Petit silence .)
YVONNE.
- Vous êtes ravissante, Made
moiselle.
On vous prendrait pour une petite
fille.
Quel âge avez-vous ?
MADELEINE.
- J'ai vingt-cinq.
C'est VOUS,
Madame, qui ...
(E lle vient d 'apercevoir
George s.
Sa voix s'étra ng le .
Elle se
précipite de son côté.)
Di eu ! Excusez-moi.
Qui vous a
fait entrer ? (E lle se reto urne
vers les femme s, hagarde.)
Ce monsieur.
..
MICHEL, riant et s'approc hant.
- C'est
papa , ce monsieur.
Papa , je te présente
Madelein
e.
MADELEINE, elle recule.
- Ton père ! ...
MICHEL.
- Là! Encore une.
Personne ne veut
jamais cro ire que papa est d'âge à être
papa.
Si nou s sortions ensemble on nous prendrait
pour deux copains.
LÉO.
-Présente-moi !
MICHEL.
- Je ne sais plus ce que je fais.
Madeleine
...
(Il lui prend la m ain.) Que tu
fi "d 1 'T'A • L , 1 as rot ....
Late sa main, eo .
(Léa prend la main de M adelein e.)
LÉO.
-Elle a les mains glacées.
(A Made
l e
ine.) Sommes-nous donc si terribles ?
Yvonne, horrifiée par le bonheur
de Michel et de Madeleine ,
s'est empoisonnée
MADELEINE .
- Son pouls est très faib le ...
il
est éga l, mais très faible.
LÉO.
-Je sen tpis quelque chose ...
je le
sentais.
MADELEINE, elle s'écarte du lit.
- C'est
ma faute.
Ma place n'est pas ici.
Je dois
partir.
LÉO.
-P artir ?
MADELEINE.
- Quitter Michel, Madame.
LÉO.
-Ne soyez pas stu pid e.
R estez.
Je vous
l'ordonne.
Du reste, Michel
va avoir besoin
de vous, comme Georges aura besoin de
moi.
(Si lence.)
YVONNE.
- Je t'e ntends, Léa.
LÉO.
-Qu'est-ce que tu entends ?
YVONNE.
-Je t'ai entendue.
Tu as oublié que
je pouvais t'entendre.
LÉO.
-Entendu
quoi ?
YVONNE.
-Fais
l 'innocente .
On
veut se débar
rasser de moi ...
on
veut!
Rombaldi ,
1971
« Elle est esclave, si tu
veux, d'un garçon du
même âge qu
'elle ..
.
»
NOTES DE L'ÉDITEUR
« Per sonnellement, je considère Les Par ent s
terribl es comme le c hef-d'œuvre de Jean
Cocteau au thé âtre .
Il met en évidence dans
le s cœ urs hum
ains un tourbillon d 'atomes
se mblable
à celui qui compose le délir e
invisib le du métal
le plus compact.
Et la
co nstruction dramatique est d'un bout à
l
'autre irréfutable.
Les Enfants te rribl es
é taient un livre en pente.
Les Parent s
terribles
so nt au co ntraire une pièce co
ncentrat ion d'orage sur
le p o int
d'éclater.
Le nœ
ud de l'action serre ,
é trang le le drame et fait hurler les héro
s.
Ils so nt comme ligaturés, coupés en deux ,
et la partie d
'eux-mêmes où l e sa ng ne
passe plus les maintient debout , encastrés,
p enda nt que leur âme est en
pleine
tourmente.
Entre ce père , cette mère, ce
garço n, cette maîtresse , et
la figure du
d esti n, la tante Léo, les sentim ent s font
rage.
» R oger Lannes, Jean Cocteau,
«Je n'oublie rai j amai s la répétition
gé néra le de s
Par ents terribles.
Aussitôt
l evé le rideau des Ambassadeurs (dont le
directeur, Roger Capgras, avait accue illi
« Poètes d'a ujourd 'hui », Seghers,
lourde, non d'
un poid s rigide , mai s d' une 1945.
1 T
a ll / Sip a-lc o no 2, 3 peintures de Jean Cocteau , tirés de The Visual Arr of Jean Cocteau, International Archives of A n.
New York.
1989
la pièce refusée par Jouvet), le so uffl e de
la pass io n n ous bal aya et aussi cet effl u
ve
mys térie ux qui annonce une réussite
t o ta l
e.
Toutes les répliques porta ient, no us
a tt eig naie nt au cœ ur.
Comme to ut cela :
intri gu e, perso nna ges, acteurs, n'emprunt ait
du " boul evard" que l'apparen ce!»
André Fraignea u, Cocteau par lui-même,
« Écrivains de to ujour s », Seuil, 1961.
COCTEAU 04.
»
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