Les Écrits de Jacques Lacan
Publié le 22/02/2012
Extrait du document
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Lacan nomma la patiente dont il tira la théorie de l'amour en miroir : Aimée.
Puis, il baptisa la période où l'enfant est amoureux de sa propre image : le stade du miroir.
Pour l'anecdote, on notera que Lacan eut à cette époque une fille qu'il appela, en troisième prénom il est vrai, Image.
Ce premier tiers de l'enseignement de Lacan, consacré à l'imaginaire, fut suivi, après la guerre, par la découverte dusymbolique, qui a donné à l'auteur la réputation d'inventeur du structuralisme (courant de pensée des années 60 quivise à privilégier les réseaux de relations dans l'analyse des faits humains.
Le structuralisme est issu de lalinguistique qui considère la langue comme un système, c'est-à-dire un ensemble d'éléments agencés selon desrègles et toujours en interrelations.
LE STRUCTURALISME OU LE SYMBOLIQUE
Cette seconde étape dans la recherche de Lacan, tout comme la première, lui fut également dictée par son travailclinique.
Toutefois, elle marqua un tournant dans sa pensée puisque, pour orienter sa pratique de psychanalyste,Lacan a tourné le dos à la psychiatrie traditionnelle au profit d'une voie différente, celle de l'anthropologie (étude del'homme comme des groupes humains), de la linguistique (étude scientifique de la langue) et des mathématiques.
Ilse rapproche donc des sciences exactes.
Avant de pénétrer à pas timides dans les travaux de Lacan menés entre 1950 et 1965, il faut revenir un instant à lathéorie freudienne de l'inconscient.
Ce.
t insondable, pressenti par Freud, emmagasine certains souvenirs,particulièrement désagréables, parce qu'ils ont été expulsés de la conscience ou encore refoulés.
Cela signifie qu'on est incapable de s'en souvenir mais, en même temps, on ne peut pas les oublier.
Un événement refoulé ne disparaît pas et il ne laisse jamais en paix.
Ainsi, ce matériel enfoui dans l'inconscient provoque des symptômes : phobies, obsessions, troubles sexuels commel'impuissance ou la frigidité, contre lesquels la victime ne peut rien ainsi que nous l'avons vu dans les pages portantsur l'oeuvre de Freud.
Ces « désagréments » finissent par transformer la vie de la personne en une existence de plus en plus limitée, vouéetoute à obéir aux symptômes.
La théorie psychanalytique pose en principe qu'il suffit de ramener à la conscience ces souvenirs refoulés pour guérirles symptômes.
Revenons à Lacan.
Ce qu'il allait renouveler par la théorie du structuralisme était le mode de compréhension du refoulé.
Il allait, pour ce faire, produire une théorie du symbolique.
On se rappelle que l'imaginaire était l'aptitude à tomber amoureux de sa propre image, et, par projection, de l'imagede femmes idéalisées, reflets de sa propre image.
Le symbolique s'occupe non pas de la façon d'aimer des images, mais de la façon de craindre ce qui est refoulé et qui reste inconscient.
Que se passe-t-il alors avec ce matériau refoulé qui figure maintenant dans l'inconscient, sous forme à la foisinutilisable et impossible à oublier définitivement ? Eh bien, ce matériel « travaille », et travaille bien entendu à nuireà sa victime.
Il travaille, nous l'avons vu, à produire des symptômes, mais il travaille aussi à se travailler lui-même.
Les souvenirs refoulés se stockent, mais pas en vrac.
Comme dans un entrepôt bien organisé, ils prennent une forme de stockage qui est celle du mot.
L'inconscient obéit à des lois strictes qui sont celles de la linguistique, assorties de quelques autres lois propres.
La chose essentielle à saisir est que ce matériel refoulé se stocke sous forme de mots qui représentent lessouvenirs.
On ne peut pas stocker un souvenir sans lui donner un nom.
Comme pour un livre dans une bibliothèque, il lui faut un titre si l'on veut pouvoir le consulter.
Le structuralisme s'est constitué par la rencontre de Lévi-Strauss avec le linguiste Jakobson.
Lévi-Strauss avaitdémontré l'existence de lois, qu'il appelait structures, lois qui servent à régler l'échange des femmes dans lesmariages de certaines tribus d'Amérique du Sud.
Par ces lois, on savait qu'Untel n'épousait Unetelle que selon desrègles préétablies, dont les intéressés ne connaissaient pas l'existence, et pourtant ces lois étaient incontournables.Lacan, par analogie, proposa une conception structuraliste de la circulation du refoulé dans l'inconscient.
La théorie structuraliste du refoulement est la suivante, selon le slogan célèbre de l'époque, et que les anti-lacaniens combattirent avec une rage aussi désespérée qu'inutile : «L'inconscient est structuré comme un langage.» Ce qui veut dire que les souvenirs refoulés se combinent et se télescopent entre eux, produisent des symptômes et autres désagréments, de l'angoisse, de l'inhibition, des troubles sexuels, de l'éjaculation précoce, dela phobie...
selon des lois langagières.
C'est une sorte de grammaire où un mot se substitue à un autre, ou bien encore où à un mot se voit substitué unsymptôme, selon un ordre qui sera celui de la métaphore (un mot pour un autre) ou de la métonymie (une partiepour le tout).
Au lieu de se servir du terme de mot, Lacan décida d'appeler ces termes signifiants.
On parle donc d'un signifiant refoulé et non pas d'un mot refoulé.
Un signifiant représente donc le nom de quelque chose dont le souvenir est refoulé..
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