Les Contemplations de Hugo (résumé & analyse)
Publié le 15/12/2018
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Les Contemplations
Les Contemplations sont à l’œuvre lyrique de Hugo ce que les Misérables sont à son œuvre romanesque : le sommet parce qu’en cette somme tout se résume et se fond. Le projet même du livre le veut qui entend, de la jeunesse au moment présent, retracer une destinée « écrite là jour à jour ».
L’expression par laquelle Hugo répond lui-même à la question : « Qu’est-ce que les Contemplations? — Les Mémoires d’une âme », fixe précisément l’instance active : une âme, qui est plus qu’un cœur ou qu’une pensée, et son objet, qui est plus qu’une vie. Mais ce que le terme de « Mémoires » implique de récapitulation close efface le trait dominant du recueil : sa dynamique, que signalent les titres : « Ibo », « En marche », « Au bord de l’infini ». Recherche et construction du sens d’une existence, les Contemplations évoquent et opèrent une double progression : celle qui ouvre le moi à des expériences cumulées et de valeur croissante — la jeunesse, l’amour, les « luttes et les rêves », le deuil, l’exil, la contemplation —, et celle qui le transforme lui-même et change sa nature.
Cela distingue les Contemplations des recueils d’avant l’exil. Une relation complexe s’y élabore entre le moi personnel et le «je » poétique, entre l’objet et le sujet de ce qui, dès lors, n’est plus exactement un discours mais plutôt une activité intérieure rendue objective et communicable. Dans les Contemplations, livre doublement poétique, l’histoire de l’individu est appréhendée du point de vue du poète, et elle consiste dans sa sublimation en lui. « C’est encore l’homme, dit Hugo, ce n’est plus le moi ».

«
sommet
parce qu'en cette somme tout se résume et se
fond.
Le projet même du livre le veut qui entend, de la
jeunesse au moment présent, retracer une destinée
«écrite là jour à jour>>.
L'expression par laquelle Hugo répond lui-même à la
question : «Qu'est-ce que les Contemplations? -Les
Mémoires d'une âme>>, fixe précisément l'instance
active: une âme, qui est plus qu'un cœur ou qu'une
pensée, et son objet, qui est plus qu'une vie.
Mais ce
que le terme de « Mémoires » implique de récapitulation
close efface le trait dominant du recueil : sa dynamique,
que signalent les titres : « Ibo », « En marche>>, « Au
bord de l'infini».
Recherche et construction du sens
d'une existence, les Contemplations évoquent et opèrent
une double progression : celle qui ouvre le moi à des
expériences cumulées et de valeur croissante -la jeu
nesse, l'amour, les «luttes et les rêves », le deuil, l'exil,
la contemplation -, et celle qui le transforme lui-même
et change sa nature.
Cela distingue les Contemplations des recueils
d'avant l'exil.
Une relation complexe s'y élabore entre
le moi personnel et le «je >> poétique, entre 1' objet et le
sujet de ce qui, dès lors, n'est plus exactement un dis
cours mais plutôt une activité intérieure rendue objective
et communicable.
Dans les Contemplations, livre dou
blement poétique, l'histoire de l'individu est appréhen
dée du point de vue du poète, et elle consiste dans sa
sublimation en lui.
« C'est encore l'homme, dit Hugo, ce
n'est plus le moi ».
De là l'aspect circulaire du recueil.
Son titre désigne
un comportement spirituel dont l'objet propre n'est
atteint qu'au dernier livre; le mot de la fin est« commen
cement>>.
De là aussi l'importance de la Préface.
Elle
corrige l'inévitable erreur de la première lecture en
posant au départ, mais de manière schématique et abs
traite, ce qui n'est concrètement acquis qu'à l'arrivée :
le statut du poète, sa présence-absence au monde : « Ce
livre doit être lu comme le livre d'un mort>>.
Très logiquement, la structure du recueil dispose en
son centre ce qui est à la fois son lieu d'émission et le
terme de son parcours : la mort.
Dont celle de Léopoldine
n'est que l'image.
Car on réduirait à tort -non pour
l'individu Hugo, mais pour son livre -l'incidence de la
mort à ses dimensions intimes et philosophiques.
Sans
doute le point de vue de la mort peut-il seul donner sens
à une vie -et donc à toutes -et pleine signification à
l'apostrophe :« Insensé qui crois que je ne suis pas toi>>.
Mais, dans les Contemplations, la mort est une position
poétique qui ne résulte pas d'une simple fiction métaphy
sique et à laquelle le deuil ne fait qu'ouvrir l'accès.
L'envoi final, ''A celle qui est restée en France», offre
à une morte le livre devenu celui d'un mort.
Il a fallu,
après la ligne de points qui suit la date du 4 septembre
1843 et les « Pauca meae », que le poète «en marche>>
parvienne «au bord de 1 'infini >> par la prière et par
1' exil : par la contemplation, qui est l'activité poétique
elle-même, devenue asymptotique à ce que serait la
vision d'une âme après la mort.
En cela, les Contemplations relèvent de la même
démarche que les Châtiments.
Tous deux racontent,
miment et produisent en leur progression la position de
parole qu'ils adoptent d'emblée.
Ils procèdent à la même
anticipation : celle de la République universelle ici, et là
celle de la mort; et, supposant acquise leur condition
d'énonciation, font le récit de la manière dont ils y par
viennent.
Autrefois-Aujourd'hui: cette coupe, lorsque les Châ
timents n'étaient pas encore achevés, devait, au sein d'un
seul recueil, les distinguer d'une première partie de
« poésie pure » : Autrefois, première version des
Contemplations.
La dichotomie éloignait l'ancien poète
du nouveau et renvoyait au passé la poésie du moi per- sonne!.
Ce déplacement sur les Contemplations de ce qui
les séparait des Châtiments suffit à indiquer que Hugo a
trouvé dans l'achèvement même de ce recueil de quoi
conduire la poésie lyrique du moi au point où elle deve
nait pertinente au poète que les Châtiments avaient fait
de lui.
Placée naguère à la date de l'exil, maintenant à celle
de la mort de Léopoldine, la coupure de l'avant et du
maintenant superpose les deux fractures, les deux exils :
l'un, retranchant le poète des intérêts affectifs immé
diats, en fait un homme de souvenir quant à la vie, de
conquête contemplative quant au vrai; 1 'autre, le retran
chant de l'histoire présente, réelle et illusoire, le projette
dans la communauté sociale idéale, prov.isoirement réali
sée dans l'écriture et la lecture de son œuvre.
[Voir aussi
ÉLÉGI El..
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