Légendes du Guatemala
Publié le 04/04/2013
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Guatémaltèque, mais surtout Indien par sa mère, Miguel Angel Asturias est très tôt sensible à la culture indienne. S'étant installé à Paris en 1925, il suit à la Sorbonne l'ense ignement de Georges Reynaud sur les cultures et les religions des Amériques. Il collabore à la traduct ion du Popol Vuh , l'un des plus grands textes qui chés sur les · religions mayas. Les Légendes du Guatemala ( 1930) satisfont dès lors sa tentation de l'éc riture romanesque et son besoin de partager une culture singulière.

«
Caractère phonétique de la ville de Tulla et jeu de paume mexicain.
Mexique, xv1e siècle
EXTRAITS ~~~~~~~~
Guatemala représente la sédimentation
des cultures maya et espagnole
Le Coucou des Rêves fait voir une ville
très grande -claire pensée que nous avons
tous-, cent fois plus grande que cette ville
de petites maisons peintes au milieu de
la
Couronne de Saint-Blaise.
C'est une ville
formée de cités enterrées, superposées,
comme les étages d'un immeuble.
Étage sur
étage.
Ville sur ville.
Cahier de vieilles gra
vures, relié en pierre , aux pages de feuilles
d'or indien, de par
chemins espagnols et
de papier de la répu-
blique
! Coffre qui
enferme les figures
glacées d'une chimère
morte ,
l'or des mines
et le trésor des che
veux blancs de
la lune
sertis dans des ba
gues d'argent
! Dans
cette ville en étages,
les cités antiques se
conservent intactes.
L'affrontement
de deux conceptions
de la
vie révèle
l'inéluctabilité
de la lutte armée
Les hommes blancs
avan çaient sans clai
rons, sans tambours,
sans pas.
(.
..
)Ils avan-
çaient sur la ville
comme la tempête ,
soulevant des nuages, ignorant le danger,
dévastateurs, tout en fer, inattaquables, au
milieu des étincelles qu'ils allumaient dans
leurs mains,feux d'éphémères lucioles, tan
dis qu'une partie des tribus s'apprêtait à la
défense et que l'autre fuyait par
le lac, avec
le trésor du Pays-Fleuri , vers
le versant du
Volcan, dégagé dans le lointain .
Ce
tréso1;
elles le transportaient dans des barques que les
envahisseurs, perdus dans leur mer de
nuages adamantins, apercevaient au loin
co mme des explosions de pierreries.
Les débordements d'une nature
exubérante transforment la terre
en monstres
Deux montagnes remuaient les paupières à
un pas de la rivière.
Celle qu'on appelait Cabrakan, et qui était
capable d'arracher une forêt de ses deux
bras et
de soulever une ville sur ses épaules,
cracha une salive de feu
jusqu'à brûler la
terre.
Et elle la brûla.
Celle qu'on appelait Hurakan, montagne de
nuages , gravit le volcan pour lui peler le
cratère avec ses ongles.
Quand les dieux parlent d'amour
à leurs offrandes
CUCULCAN.
-Je suis celui qui te tient vivante
dans mes bras et vivante dans mon rêve
!
YAI.
- Mais tu te réveilleras de ton rêve
d'amour, de ce rêve où je suis ta créature,
créée par toi, ta créature de songe, avant
l'aurore, et alors un voile d'ombre couvrira
le souvenir de ta
Sueur d' Épines
Jaunes .
CUCULCAN.
-Je
ne saisis pas
bien la saveur
de ce que tu me
dis, mais cela
sent le reproche
de pierres pré
cieuses (
..
.) et
ton dos
m'est un
Orient de perles de sucre, et tes cuisses me
font monter par les rubis des guerriers à
la
chambre des constellations, sous les champs
de jade vert
de tes mains .
Traduit de l'espagnol par Francis de
Miomandre, Gallimard, 1953
Prix Nobel de
littérature en 1967 ,
Miguel Angel Asturias
est surtout connu pour
ses romans socio
politiques, dont les plus
célèbres sont
Monsieur
le Président (1946) et
Le Pape vert (1954).
Calendrier mexicain
NOTES DE L'ÉDITEUR
« Quel mélange que ce mélange de nature
torride, de botanique aberrante, de magie
indigène, de théologie de Salamanque,
où
le volcan, les moines, l'Homme-Pavot , le
Marchand de bijoux sans prix, les " bandes
d'ivrognesses
dominicales", les" maîtres
mages qui vont dans les villes enseigner la
fabrication des tissus et
la valeur du Zéro",
composent les plus délirants des songes.
Ma
lectur e
me fut un philtre , car cet
ouvrage se boit plus qu'
il ne se lit.
Il me fut
l 'agent
d'un cauchemar tropical, vécu non
sans
un singulier délice.
» Paul Valéry,
préface de
Légendes du Guatemala,
Gallimard , 1932.
« Ce qui est significatif, ce n'est pas le
titre, indigéniste, mais la substance
du récit,
qui est métisse, dans trois contes sur cinq.
(
...
) La Cité de Guatemala, la capitale, nous
est présentée, en effet, comme une
ville-synthèse, composée de vieilles villes
indiennes , auxquelles ont succédé les
villes espagnoles.
Celles-ci, splendides et
sonores comme l'or, chargées de temples,
de statues, de stèles ; celles-là, couvertes
d'arcades blanches et de patios ombreux,
d 'ég lises baroques et de ranchos cossus.
»
Léopold Sédar Senghor, Hommage à
Miguel Angel Asturias,
Bibliothèque
nationale, 197
4.
1 dessin de Alberto Corazon, Ediciones de cultura hispanica.
Madrid 2 coll.
part./ Edimédia 3 Edimédia 4 Codex Borbonico, Biblioth èque du Palai s Bourbon / Edimédia ASTU RIAS 02.
»
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