LE NAIN JAUNE (résumé & analyse)

NAIN JAUNE (le). Les vicissitudes de ce titre forment une aventure o-iginale dans la presse du xixe siècle : un même nom naît, meurt et ressuscite à divers moments historiques; à peu près toujours pour la même raison d’indépendance coupable à l’égard des pouvoirs. Il naît ou renaît un Nain jaune en 1814, en 1857, en 1863, en 1865,en 1867.

Le Nain jaune est d’abord l’un des plus vieux titres de journaux au xixe siècle. Né pendant les Cent-Jours, le premier Nain jaune tiendra jusqu’au 15 juillet 1815. Succédant au Journal des arts, des sciences et de la littérature, il se veut journal littéraire mais n'escamote point la politique; plus libéral que bonapartiste, il combat farouchement le royalisme et ses organes de presse, la Gazette de France notamment; mais il s’oppose aussi aux journaux installés, la Quotidienne, le Journal des débats, le Moniteur. Vingt-quatre pages, un style alerte et sarcastique : le directeur est Louis Cauchois-Lemaire, qui donne au journal son esprit, s’entoure de rédacteurs comme Merle et Jouy, et demande à des correspondants bénévoles de déposer leurs nouvelles dans une « bouche de fer » disposée à l’entrée de la rédaction. Le Nain jaune offre à ses abonnés des anecdotes, des « bruits », des « nouvelles de partout », « la chronique, comme voulait Cauchois-Lemaire, des salons, les bruits de la ville, la revue des théâtres et des journaux ». Le tout acide, mordant, caustique, ironique. Le journal était littérairement combatif, s'en prenant à tous les tenants du passé, attar

dés du classicisme et romantiques décoratifs. Laïque, défendant les soldats de l’armée napoléonienne vaincue, mais libéral avant tout. Son ironie? Il créa deux ordres de chevalerie, l’« ordre de l’Éteignoir » et l’« ordre de la Girouette », auxquels il affiliait plaisamment les politiques oublieux ou versatiles, les ennemis du libéralisme et de la Charte, tous ceux qui ont des quartiers « d’ignorance, d’impudence et de mauvaise foi », ceux dont la devise est toujours d’« abrutir pour gouverner». On reconnut fort bien, parmi les plus grands chevaliers de ces deux ordres — notamment du premier —, ici ou là, Chateaubriand, M,ne de Staël,