LE MISANTHROPE de MOLIERE (analyse)
Publié le 20/10/2018
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Il peut n’y avoir dans toute cette aventure que l'histoire d’un « atrabilaire » qui a mal placé son cœur, qui a tort d’être atrabilaire et de s'entêter à vouloir faire d’une femme à la tête légère une grave épouse. Mais on a donné raison à la bile noire et à l’entêtement. Alceste est devenu le symbole de la vertu, Célimène et les autres d’un monde injuste et corrompu. Le Misanthrope est apparu comme le drame pessimiste de la dignité humaine bafouée par la politesse hypocrite. Fénelon (Lettre à L'Académie) et J.- J. Rousseau (Lettre à d'Alembert sur les spectacles) convenaient que le généreux Alceste ne laissait pas d’être ridicule. Ils regrettaient que Molière eût ainsi fait rire de lui. Toutes ses humeurs noires, tous ses « chagrins profonds » leur semblaient légitimes, tous les tempéraments de Philinte coupables ou criminels. Musset acheva la transposition. Le Misanthrope (dans Une soirée perdue) devenait le symbole de la conscience dressée contre le mensonge social. La comédie joyeuse était une âpre satire ; le rire masquait le sarcasme amer.
Il masquerait même les souffrances personnelles de Molière. Cest sans doute une aventure amusante que celle d’Alceste avec Célimène. \"L’homme aux rubans verts\", généreux, mais exigeant et bourru, joue son rôle d’amant dans la cour de Célimène comme l’âne de la fable celui du petit chien. Et nous ne pensons guère à plaindre l’âne. Mais il aime Molière. Il avait épousé, à quarante ans, la jeune Armande Béjard qui en avait vingt. Armande était comédienne, coquette, même pour une comédienne, et plus hardiment sans doute que Célimène. Molière, à n’en pas douter, souffrit d'aimer une femme dont il dut se séparer en 1664. La pièce de 1666 n’est, peut-être, que la confidence de cette misère.
Ainsi, toute la pièce serait pénétrée de pessimisme ; ce « portrait du siècle», comme le disait de Visé, serait amer et désabusé.
N’est-ce pas plutôt une comédie ? Nous ne saurons jamais exactement ce que Molière a pensé. Mais nous connaissons fort bien l’opinion des contemporains, de ceux qui n’étaient pas encore des romantiques, qui n’étaient ni prêtres comme Fénelon, ni misanthropes comme Rousseau. Ils ont partagé l'opinion de de Visé dans une Lettre sur la comédie du « Misanthropeu publiée, avec l’assentiment évident de Molière, en tête de la première édition : « Les chagrins, les dépits, les bizaireries et les emportements d’un misanthrope » sont « des choses qui font un grand jeu », un grand jeu comique. Certes, Alceste est vertueux ; certes, il est sympathique ; mais son humeur est divertissante. La comédie nous offre ce divertissement. ourtant sincèrement, il souffre cruellement. Et cette douleur serait celle de
Acte II — Alceste aime une jeune veuve, Célimène. Elle est coquette. Scènes de jalousie. Il a bientôt à lui reprocher la conversation spirituelle, mais méchante où, poussée par de jeunes marquis, elle se moque des gens qu'ils connaissent. A ce moment on vient annoncer à Alcesle qu'il est cité devant le tribunal d'honneur des Maréchaux pour son affaire avec Oronte.
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