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LE GENDRE DE M. POIRIER d'Émile AuGiER (résumé de l'oeuvre & analyse détaillée)

Publié le 06/11/2018

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augier

LE GENDRE DE M. POIRIER d'Émile AuGiER (en collaboration avec JuLES SANDEAu). Comédie, 1854.

Poirier, ancien petit commerçant enrichi, a payé les dettes de son gendre, Gaston de Presles. Celui-ci, issu d'une famille très ancienne, n'a aucun respect pour son beau-père et refuse même d'appuyer sa candidature au Sénat. Pire, il trompe sa femme, Antoinette, mène grande vie et entretient une maîtresse pour laquelle il doit se battre en duel. La noblesse d'Antoinette lorsqu'elle apprend ce duel fait comprendre à Gaston qu'il aime sa femme. Un heureux retournement de situation intervient: l'adversaire envoie ses excuses. Tout se termine au mieux, mais Poirier rêve toujours de son titre de pair de France.

• Cette comédie en cinq actes illustre les préoccupations réalistes d'Émile Augier (1820-18891. Hostile à l'école romantique, il traite de questions d'actualité chères au public bourgeois du Second Empire: ici, le conflit entre la vieille noblesse et la bourgeoisie enrichie. 

augier

« ÉMILE AUGIER (1820-1889).

Le Gendre de M.

Poirier 2.

Émile Augier débuta à l'Odéon en 1844, avec une pièce en vers, la Ciguë.

Mais il abandonna bientôt la comédie degenre, pour traiter des thèses morales.

C'est ainsi qu'en 1849, il fit applaudir dans Gabrielle (cinq actes en vers) unecourageuse et éloquente apologie de la famille et du mariage.

Car, le croirait-on? il fallait du courage à cette époquepour soutenir devant le public une autre thèse que celle du droit à la passion.

— Désormais, dans toutes ses pièces,la plupart écrites en prose, Émile Augier va défendre les mêmes idées.Il plaide, dans Ceinture dorée, Un Beau Mariage, etc., pour le mariage fondé sur l'estime et sur l'affection, plutôt quesur l'intérêt.Dans les Effrontés et le Fils de Giboyer, il flétrit les charlatans de la politique et de la finance.

Dans la Contagion(1866), Paul Forestier (1868), Jean de Thommeray (1872), Augier attribue au désœuvrement, à l'ambition malcomprise, à la blague, la décadence de la jeune génération.Ses deux chefs-d'œuvre sont le Gendre de M.

Poirier (1854) Maître Guérin (1864).

La première de ces pièces esttirée du roman de Jules Sandeau : Sacs et parchemins.

M.

Poirier est le M.

Jourdain du règne de Louis-Philippe.

Cene sont plus les allures et les costumes des gentilshommes qu'ambitionne un bourgeois enrichi de 1840; ce sontleurs titres de noblesse et leur influence politique.

« Je suis ambitieux, » dit piteusement M.

Poirier, qui soutient que« le commerce est la véritable école des hommes d'État », et qui a donné sa fille au marquis de Presles, pour devenirlui-même baron et pair de France.

La pièce, très spirituelle et très équitable, où aucun des deux partis n'estsystématiquement sacrifié à l'autre, est à la fois un chef-d'œuvre dramatique et un document social.

— Quant àMaître Guérin, c'est l'admirable peinture d'un homme au caractère absolu, et qui s'enrichit, et qui est très fort, maisqui perd l'estime de tous les siens, et qui, abandonné par eux, doit mourir isolé et exploité.Augier écrit dans une langue sobre et vigoureuse, parfois un peu déclamatoire, parfois trop volontairementspirituelle.

Mais il est, au XIXe siècle, notre plus robuste tempérament dramatique. Le Gendre de M.

Poirier (1854). M.

POIRIER RÉFORME SA MAISON Gaston de Presles, un gentilhomme ruiné, a épousé la fille d'un riche négociant, M.

Poirier.

Celui-ci espérait que songendre deviendrait diplomate, et l'introduirait lui-même à la cour de Louis-Philippe.

Mais Gaston de Presles,légitimiste, « émigré à l'intérieur », ne reconnaît pas le roi usurpateur.

Il est décidé à vivre de ses rentes.

M.

Poirierveut avoir avec lui une explication définitive; mais le marquis persiste dans son refus de se rallier à Louis- Philippe,et se moque des prétentions politiques de son beau-père.Alors M.

Poirier se décide à réformer sa maison.

Il veut commencer par renvoyer son cuisinier, Vatel, qui se prétenddescendant du fameux maître d'hôtel du prince de Condé, dont Mme de Sévigné a raconté la mort tragique. POIRIER, puis LE PORTIER, et VATEL, CUISINIER.POIRIER, seul.

— Ah! mais il m'ennuie, mon gendre.

Je vois bien qu'il n'y a rien à tirer de lui....

Ce garçon-là mourradans la gentilhommerie finale.

Il ne veut rien faire, il n'est bon à rien...

il me coûte les yeux de la tête....

Il estmaître chez moi....

Il faut que cela finisse (Il sonne.

Entre un domestique.) Faites monter le portier et le cuisinier.(Le domestique sort.) Nous allons voir, mon gendre!...

J'ai assez fait le gros dos et la patte de velours.

Vous nevoulez pas faire de concessions, mon bel ami? A votre aise! je n'en ferai pas plus que vous; restez marquis, jeredeviens bourgeois.

J'aurai du moins le contentement de vivre à ma guise.

(Entre le portier.)LE PORTIER.

— Monsieur m'a fait demander?POIRIER.

— Oui, François, monsieur vous a fait demander.

Vous allez mettre sur-le-champ l'écriteau sur la porte.LE PORTIER.

— L'écriteau?POIRIER.

— « A louer présentement un magnifique appartement au premier étage, avec écuries et remises.

»LE PORTIER.

— L'appartement de M.

le marquis?POIRIER.

— Vous l'avez dit, François.LE PORTIER.

— Mais M.

le marquis ne m'a pas donné d'ordres.POIRIER.

— Qui est le maître ici, imbécile? à qui est l'hôtel?LE PORTIER.

— A vous, monsieur.POIRIER.

— Faites donc ce que je vous dis, sans réflexion.LE PORTIER.

— Oui, monsieur.

(Entre Vatel.)POIRIER.

— Allez, François.

(Le portier sort.) Approchez, monsieur Vatel; vous préparez un grand dîner pour demain?VATEL.

— Oui, monsieur, et j'ose dire que le menu ne serait pas désavoué par mon illustre aïeul.

Ce sera vraiment unobjet d'art, et monsieur Poirier sera étonné.POIRIER.

— Avez-vous le menu sur vous?VATEL.

— Non, monsieur, il est à la copie; mais je le sais par cœur.POIRIER.

— Veuillez me le réciter.VATEL.

— Le potage aux ravioles à l'Italienne et le potage à l'orge à la Marie Stuart.POIRIER.

— Vous remplacerez ces deux potages inconnus par la bonne soupe grasse avec des légumes sur uneassiette.VATEL.

— Comment, monsieur?. »

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