L'aiglon de Rostand

« .-------- -- --- -- EXTRAITS - --- -- - ---.

Le chancelier Metternich jette à la face de I' Aiglon tous ses ancêtres Habsbourg METIERNICH Il prend sur la table le candélabre allumé, va vers la grande psyché, et haussant la lumière.

Regardez-vous dans cette glace! Regardez la longueur morne de votre face ! Regardez ce fardeau si lourd d'être si blond, Ces accablants cheveux ...

mais regarde z-vous donc! LE DUC, ne voulant pas aller à la glace, et s'y regardant, malgré lui, de loin.

Non! ( ...

) METIERNI CH Mais à votre insu, c'est toute une Allemagne Et c'est toute une Espagne en votre âme dormant Qui vous font si hautain, si triste , et si charmant ! LE DUC, détournant la tête, et attiré pourtant vers le miroir .

Non! non! METIERNICH Rappelez-vous vos doutes de vous-même! Vous, régner ? Allons donc ! ...

Vous seriez , doux et blême , Un de ces rois qui vont s'interrogeant tout bas, Et qu 'il faut enfenner pour qu'ils n'abdiquent pas ! LE DUC, saisissant, pour essayer de l'écarter, le candélabre que Metternich lève devant la glace.

Non! non! Acte III, scène 10 « Oh ! ce serait un crime / Que de faire monter, pays clair et sublime, I Sur ton splendide petit trône impérial I Un être de malheur, d'ombre et d'Escurial ! ,.

« Prends-moi ! prends-moi, Wagram! et rançon de jadis, I Fils qui s'offre en échange, hélas, de tant de fils.,.

Aux côtés de Flambeau ago nis an t, le duc écou te av ec h orreur la plaine de Wagram qui, croit-il, br uit toute de plaintes et de râle s LEDUC Ah ! je comprends ! ...

Le cri de cet homme qui meurt Fut, pour ce val qui sait tous les râles par cœur, Comme le premier vers d'une chanson connue; Et quand l'homme se tait, la plaine continue ! LA PLAINE, au loin.

Ah! ...

ah! ...

LEDUC Ah ! je comprends ! ...

plainte, râle, sanglot, C'est Wagram , maintenant, qui se souvient tout haut! LA PLAINE, longuement.

Ah ! ..

.

LE DUC , regardant Flambeau qui s'est raidi dans l'herbe.

Il ne bouge plus ! ( ...

) Acte V, scène 5 NOTES DE L'ÉDITEUR « Les thèmes qu'Edmond Rostand trouvait dans L 'Aiglon coïncidaient avec la qualité de sa poésie, avec ce que son âme avait de plus subtil et de plus profond; c'était, comme dans toute son œuvre, les thèmes du désir insatisfait, du rêve trop beau pour être réalisé, de l'empire dont on craint de n'être pas digne, de la foi qui soutient malgré tout l'âme en dépit de ses doutes ; rêve du romanesque déçu, mais qui sait faire jaillir de sa déception une volonté de bonheur.

( ..

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) Héros blanc et pur, épris de la chimère d'un empire qu'il sait trop lourd pour ses frêles épaules, l' Aiglon était bien de ceux dont l'âme pouvait tenter le génie de Rostand, « A trente-deux ans, Edmond Rostand connaît une extraordinaire popularité.

Sa notoriété est telle qu'il ne se passe pas de jour où la presse ne parle de lui.( ...

) Il y avait eu la légende del' Aigle.

Il a créé et l'on conçoit qu'il y ait mis beaucoup de lui-même, de ses ambitions toujours déçues en dépit du succ~s apparent, de son inquiétude devant l'idéal irréalisé : " J'aurai la conscience, à défaut de génie, je vous demande encor trois cents nuits d'insomnie."» Émile Ripert, Edmond Rostand, Hachette, 1968.

l Goldener /Sipa lco no 2 , 3, 4, 5 il!.

de Guillonne~ Pierre Lafitte et Cie , Paris , 1910 celle del' Aiglon .

L'émotion est encore plus large, plus humaine que dans Cyrano.

La pièce a plus d'ampleur, plus de noblesse.

Il y a dans cette histoire mille raisons de plaire à une France humiliée par Sedan, Fachoda, Panama.» Marc Andry, Edmond Rostand, le panache et la gloire, Pion, 1986.

ROSTAND 03. »