La Machine infernale de Cocteau (résumé et analyse)
Publié le 16/10/2013
Extrait du document
Le recours à la symbolique des objets (le lit conjugal jouxtant le berceau), ou à celle des couleurs (la chambre de Jocaste « rouge comme une petite boucherie « ), les jeux de scènes et les indications de ton parfois très précis, ne peuvent qu' éclairer le spectateur et lui permettre la pleine compréhension de l'intrigue.
«
nale est la richesse de son invention et l'audace de certaines trouvailles.
Ainsi,
Cocteau donne au Sphinx pour compagnon Anubis, le dieu égyptien à tête de cha
cal.
Il peuple la nuit thébaine du bruit des boîtes de nuit.
Il invente le personnage
du jeune soldat, celui de
l'ivrogne et fait précéder l'arrivée d'Œdipe des plaintes
d'une matrone.
Il s'amuse à faire donner le diminutif bien irrévérencieux de
« Zizi » au devin Tirésias.
Le recours à
la symbolique des objets (le lit conjugal jouxtant le berceau), ou à
celle des couleurs (la chambre de Jocaste
« rouge comme une petite boucherie » ), les jeux de scènes et les indications de ton parfois très précis, ne peuvent qu' éclai
rer
le spectateur et lui permettre la pleine compréhension de l'intrigue.
On peut donc considérer que Cocteau a réussi son pari de rajeunir le mythe antique
et de le mettre à la portée
d'un public élargi, en l'enrichissant même de significa
tions nouvelles.
II -Une grande maîtrise dramatique
Le titre de la pièce révèle bien les intentions du dramaturge ainsi que la rigueur
d'une construction qui fait s'enchaîner quatre actes correspondant à quatre mo
ments dramatiques, voire à quatre pièces différentes.
Chaque parole, chaque geste
relève du même souci de progression de la
« machine » tragique.
Principaux ou secondaires, les personnages ont un rôle dessiné avec netteté et
fermeté.
La voix qui se fait entendre au début de chaque acte précise la situation,
évite le recours à des récits, à des monologues ou à des artifices dramatiques.
Le
dénouement préparé s'accomplit au quatrième acte en quelques pages, obéissant à
la nécessité de frapper
le spectateur par la brutalité de !'accélération tragique.
Cocteau maîtrise avec la même aisance et la même capacité d'invention atmo
sphères et climats, mouvements et rythmes, décors et costumes.
Chaque moment
dramatique prend ainsi son identité propre.
En outre, la pièce est riche
d'un grand éventail de tons et de registres: pathé
tique et comique, ironie tragique et humour, tendresse et distanciation, mélodrame
et farce, trivial et sublime
« déniaisé », langage familier ou vulgaire et langue sou
tenue, voire poésie, lyrisme et parodie.
III -Le poète de l'invisible
Dans Orphée déjà, Cocteau avait montré à quel point il se préoccupait de mon
trer les
rapports secrets de l'homme avec l'invisible, avec l'immatériel et l'in
connaissable.
Le mythe d'Œdipe lui permet à nouveau de mettre en lumière cette
thématique : aveuglement physique de Tirésias et cécité morale d'Œdipe, fantôme
de Laïus qui ne parvient pas
à se faire voir de la reine et spectre de Jocaste invisible
aux yeux de Créon, rêves ou cauchemars
d'Œdipe et de Jocaste, réincarnation de
Jocaste dans Antigone
...
Le spectateur devient le complice d'un poète qui aime à mettre en scène le mys
tère et l'énigme de la condition humaine.
Cocteau nous initie au langage des dieux
et nous fait pénétrer dans les coulisses de leur théâtre où le
Sphinx est tour à tour
une jeune fille amoureuse et la déesse Némésis, où le
« temps des hommes est de
l'éternité
pliée», où le destin si cruel d'Œdipe, l'aveugle exemplaire, appartient
« au peuple, aux poètes, aux cœurs purs »..
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