La guerre de Troie n'aura pas LIEU de Jean Giraudoux (résumé de l'oeuvre & analyse détaillée)
Publié le 25/10/2018
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La guerre de Troie n'aura pas LIEU. Pièce en deux actes et en prose de Jean Giraudoux (1882-1944), créée dans une mise en scène de Louis Jouvet à Paris au théâtre de l'Athénée le 21 novembre 1935, publiée dans la Revue de Paris en décembre 1935, et en volume chez Grasset la même année.
Après Elpénor (1919), où il récrivait à sa façon l'Odyssée, Giraudoux tire cette fois son sujet de l'Iliade, poème épique d'Homère qui chante les combats héroïques du siège de Troie. Le prétexte de la guerre légendaire est l'enlèvement d'Hélène, l’épouse du roi grec Ménélas, par le prince troyen Pâris, fils du roi Priam. Ulysse, envoyé en ambassade, ne peut obtenir réparation de l'outrage et les Grecs coalisés s'embarquent pour Troie qu'ils prendront et incendieront après dix ans de siège. Il s'agit ici d'une transposition analeptique puisque l'auteur cède « la paroie [...] au poète grec » (II, 14) au moment où le rideau tombe sur la déclaration de guerre. Le choix de ce sujet est évidemment inspiré par l'actualité : en 1935, deux ans après l'arrivée de Hitler au pouvoir, une seconde guerre mondiale se profile à l'horizon malgré les efforts de ceux qui luttent pour qu'elle « n'ait pas lieu ».
L’armée troyenne revient de guerre ; à sa tête, Hector, fils aîné du roi Priam ; du haut du rempart son épouse Andromaque et sa soeur Cas-sandre guettent son arrivée triomphale. Andromaque veut croire que « cette guerre était la dernière » et que la suivante, « la guerre de Troie [...] n’aura pas lieu ». alors que Cassandre, la pro-phétesse de malheur, entend déjà la marche inexorable du destin. Mais voici Hector! Après de tendres retrouvailles, les époux se concertent : comment éviter une nouvelle guerre ? Hector tente de persuader son cadet Pâris qui, réticent s’en remet à l’arbitrage de leur père, Priam. Mais le roi et les vieillards sont fous d’Hélène. Hector, soutenu par l’élément féminin, mère, épouse et sœurs, plaide en vain devant eux la cause de la paix; en dernier recours il obtient qu’on s’en remette à la décision d’Hélène. Celle-ci accepte d’aider son beau-frère même si son don de voyance la persuade que leurs efforts n’aboutiront pas (Acte I).
«
Hector puis Démokos qui montre moins de flegme et veut ameuter les Troyens; une autre
gifle, d'He cto~ cette fois, le réduit au silence.
L'en trev ue diplomatique peut avoir lieu ; les
dieu x ordonnent de laisser faire Hector et Ulysse.
Le roi d'Ithaqu e est un homme de .bonne
volonté : malgré son scepticisme, il accorde son aide à Hector et accepte de ramener Hélène en Grèce.
Quand Démokos fait mine de s'interposer, c'est Hector qui l' abat ; ma is le poète accuse Oiax dans un dernier souffle.
La foule des
Troyens se précipite sur le Grec pour le lyncher.
« Elle aura lieu», peut amèrement condure Hec tor (Acte Il).
De l'aveu de Giraudoux lui-même, La
guerre de Troie [ ...
] est une " comédie
dramatique, une tragédie bourgeoise ».
Dramatique, elle l'est bien, si l' on
considère le suspense créé par le titre
infirmant la légende, .
et la course
d 'obstacles
dont triomphe Hector pour
achopper finalement sur le plus
imprévu e t le plus dérisoire de tous : le
meurtre de Démokos perpétré de
sa
propre main.
Certains personnages y
sont bien comiques ou plutôt grotes
ques : ainsi le juriste international
Busi
ris qui, sous la menace, retourne immé diatement sa veste en interprétant
l'arrivée des Grecs
non plus comme
une
" insulte ,.
mais comme un " hom
mage » (Il, 5).
Cependant, la pièce
paraît surtout tragique ;
en effet, la
mort y rôde sans cesse, celle des
combattants de la dernière guerre, les
" éventrés », ceux "dont la massue a
ouvert en deux le crâne » (Il, 5), celle
de Démokos (Il,
14), celle d'Hector
qu'Hélène voit par avance
(1, 9).
La
fatalité y est omniprésente, et c'est la
prophétesse Cassandre qui décrit sa
marche inéluctable dans la première
scène ; le « tigre qui dort », «ouvre un
œil», «s'étire », "se pourlèche », "se
met en marche », « monte sans bruit l es
escaliers du palais », « pousse du mufle
les
portes », «le voilà!».
Deux autres
personnages connaissent, comme elle,
le destin
;.
Hélène qui n'arrive pas à
«voir la paix» (1, 10) , et Ulysse qui
confie à Hector :
" L'univers le sait,
nous allons nous battre ,.
{II, 13).
Cette affirmation qui résonne .de
façon particulièrement tragique lors
qu 'on se remémore les circonstances
de la composition de la pièce, amène à
s 'interroger : s'agit-il d'une œuvre
d'actualité
? Certes, nombreuses sont
le s allusions à la période contempo
rain e : ainsi
les « deux chefs des peu
ples en conflit
» qui " se rencontrent
seuls dans quelque innocent village,
sur la terrasse au bord
d'un lac ,.
(Il,
13), font penser à la conférence de
Locarno ; mais, en multipliant les ana
chronismes, l'auteur
donne une valeur
générale à son propos.
Si le titre et le
sujet renvoient à la guerre de Troie, le
discours aux morts (Il, 5) appartient
plutôt à la période classique grecque;
ce sont les Romains qui fermaient les
portes du temple de la Guerre en temps
de paix et le terme
d'" anciens combat
tants,.
(Il, 5) évoque le conflit de 1914-
1918.
Il ne s'agit donc pas d'une guerre
précise , mais de la guerre
dont Girau
doux veut montrer l'horreur et l'absur
dité.
Et d'abord en démystifiant les thè
mes de la propagande belliciste :
Héroïsme, Honneur et Gloire.
A Troie,
c'est le poète Démokos
dont le nom
flirte avec démagogie, qui se fait leur
chantre
en proclamant que « la rime,
c'est encore le meilleur
tambour» (II,
4).
Pour lui, « la mission de ceux qui
savent parler
et écrire » est claire : il
faut «louer la guerre, l'aduler à chaque
heure
du jour » (Il, 4).
Giraudoux lui
répond par la voix d'Hector :
« La
guerre me semble la recette la plus sor
dide et la plus hypocrite pour égaliser
les humains et...
je n'admets pas plus
la mort comme châtiment ou comme
expiation au lâche que comme
récompense aux héros.
» Sans véritable
raison, puisque Hélène
et Pâris ne
s'aiment pas, la guerre n'e.st, comme le
dit
Androm~que, qu'une « inju stice ,..
»
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