La Chute d'Albert Camus (fiche de lecture)
Publié le 11/05/2011
Extrait du document
Conscient d'avoir intrigué son interlocuteur, Clamence entreprend de lui expliquer ce qu'est « un juge-pénitent«. Pour cela, il remontera quelques années en arrière. Il était alors un avocat brillant qui s'était spécialisé dans les nobles causes. Il avoue la volupté qu'il éprouvait à faire le bien de la façon la plus désintéressée. Autres qualités qu'il se reconnaît non sans ironie : la politesse, la générosité. Il sait plaire et tous les obstacles s'effacent devant lui. Il a la vocation des sommets qui le mène au faîte d'une carrière parfaitement réussie, à: « ...ce point culminant où la vertu ne se nourrit plus que d'elle-même «. Ses succès ne lui montent pas à la tête, il ne les attribue pas à « ses seuls mérites « mais à « quelque décret supérieur«. Sa réussite sociale apparaît donc comme la récompense d'une valeur intellectuelle, personnelle et morale irréprochable.
«
«Jusqu'au soir où...
» Il se reprend, mais cette dissonance n'a pas échappé à son interlocuteur qui veut en savoirplus.
Clamence raconte alors qu'un soir d'automne, étant monté sur le Pont des Arts, il a été troublé dans son auto-satisfaction par un rire mystérieux dont il a été incapable de déterminer l'origine, ni la raison.
Rentré chez lui, ilentendit dans la rue des jeunes gens plaisanter bruyamment, comme en écho innocent à ce rire qui l'avait poursuivi.Il décida de ne pas prêter cas à cet incident, mais avoue que, pour la première fois, il ressentit comme une brèchedans son bonheur d'homme arrivé.
Puis, Clamence prend congé de son compagnon qu'il promet de revoir lelendemain.
A présent, il est appelé en consultation par le gorille du Mexico-City qui a des ennuis avec la police àcause d'un vol de tableau.
Mais on ne sait toujours pas ce qu'est un «juge-pénitent».
On ne l'apprendra, en effet,qu'à la fin.
La fêlureLe lendemain, Clamence poursuit ses confidences et montre à son interlocuteur un autre aspect de sa personnalité,l'envers du décor.
Le rire entendu sur le Pont des Arts a été le premier indice d'une fêlure intérieure qui dès lors neva cesser de s'approfondir.
Clamence reconnaît qu'il a toujours crevé de vanité : « Moi, moi, moi, voilà le refrain dema chère vie, et qui s'entendait dans tout ce que je disais.
»Bientôt, une nouvelle péripétie se produit, anodine en soi, mais porteuse d'humiliation.
Alors qu'il est absolumentdans son droit, il est agressé et malmené dans la rue par un butor lors d'un incident de la circulation.
Clamenceprend alors conscience du besoin de domination qui est au cœur de tous ses actes.
Ses conquêtes féminines n'ontpas d'autre motivation que la volonté de puissance.
Incapable d'amour, il ne cherche qu'à prouver son pouvoir et àtenir les femmes à sa merci.
Il reconnaît tout ce que ce comportement a de médiocre mais laisse entendre qu'il enest ainsi dans la plupart des couples.
Quand il repense à cette période, Clamence s'aperçoit que tous les souvenirsqu'il en a gardés sont recouverts par un sentiment de « honte ».
Il relate l'événement qui en a été la cause.
Unenuit de novembre, passant sur un pont, il aperçut une jeune femme qui se penchait par-dessus le parapet.
Puis ilentendit un bruit de chute et un cri, plusieurs fois répété :«Le silence qui suivit, dans la nuit soudain figée, me parut interminable.
Je voulus courir et je ne bougeai pas.
Jetremblais, je crois, de froid et de saisissement.
Je me disais qu'il fallait faire vite et je sentais une faiblesseirrésistible envahir mon corps.
J'ai oublié ce que j'al pensé alors : "Trop tard, trop loin..." ou quelque chose de cegenre.
J'écoutais toujours, immobile.
Puis, à petits pas, sous la pluie, je m'éloignai.
Je ne prévins personne.»La dérisionClamence emmène son compagnon sur l'île de Marken.
Il veut lui montrer le Zuyderzee.
Pendant le voyage, ilcontinue à parler de son passé.
Suite aux événements évoqués, ses rapports avec son entourage ont changé.
Ilinspire, apparemment, aux autres la même estime qu'auparavant, mais lui-même n'y croit plus.
Se sentant vulnérableet donnant prise au jugement, il a l'impression que tout le monde, en cachette, rit de lui.
Devenu méfiant, ildécouvre qu'il a des ennemis : les uns lui en veulent de les avoir obligés, les autres lui reprochent le contraire.
Il seheurte même à l'inimitié de ceux qui ne le connaissent que de loin : ceux-là sont jaloux de sa réussite et du bonheurqu'il respire.
Il lui semble finalement que l'univers entier se met à rire autour de lui.
Il constate que tous les hommesont en commun le désir d'échapper au jugement.
Chacun revendique la présomption d'innocence.
Et pourtant toussont coupables.
Clamence prend conscience de sa duplicité : chaque vertu, chaque vice aussi a son envers.
Il estalors obsédé par la mort et surtout par l'idée que l'on ne pouvait mourir sans avoir auparavant avoué tous sesmensonges:
« Autrement, et n'y eût-H qu'un seul mensonge de caché dans une vie, la mort le rendait définitif.
Personne, jamaisplus, ne connaîtrait la vérité sur ce point puisque le seul qui la connût était justement le mort, endormi sur sonsecret.
»
Un jour vient où, pour couper court, Clamence décide de se mettre du côté des rieurs.
Il se jette dans la dérisiongénérale.
Lui qui venait en aide à la veuve et à l'orphelin et avait fondé sa réputation sur la charité ne rêve que debousculer les aveugles dans la rue et d'insulter les opprimés.
Il écrit une Ode à la police et une Apothéose ducouperet.
Enfin il s'en prend ouvertement aux humanistes professionnels.
Cependant il reste prudemment dansl'ambiguïté et termine ses provocations par un rappel des droits de l'homme.
Il ne pousse pas le jeu jusqu'au bout.Sa transformation d'avocat en « juge-pénitent» sera le résultat d'une difficile évolution :
« Voyez-vous, il ne suffit pas de s'accuser pour s'innocenter, ou sinon je serais un pur agneau.
Il faut s'accuserd'une certaine manière, qu'il m'a fallu beaucoup de temps pour mettre au point, et que je n'ai pas découverte avantde m'être trouvé dans l'abandon le plus complet.
»
Les bienfaits de la débaucheLors du voyage de retour de l'île de Marken, Clamence revient sur ses rapports compliqués avec les femmes :écoeuré par l'hypocrisie des sentiments, il conçoit une véritable horreur pour l'amour.
Mais il lui est aussi impossiblede rester chaste, car quand il ne les désire pas, les femmes l'ennuient.
Il se jette alors dans la débauche.Il y trouve un grand soulagement : « ...la vraie débauche est libératrice parce qu'elle ne crée aucune obligation ».Clamence se livre à un éloge paradoxal de la débauche : « Chaque excès diminue la vitalité, donc la souffrance.
Ladébauche n'a rien de frénétique, contrairement à ce qu'on croit.
Elle n'est qu'un long sommeil.»Un jour pourtant, à bord d'un transatlantique, la vue d'un point noir sur l'océan lui rappelle le cri de la noyée de la.
»
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