La Belle aux boucles coupées
Publié le 31/03/2013
Extrait du document
Il n'existe aucun texte complet des
comédies de Ménandre, à l'exception du
Dyskolos. De La Belle aux boucles coupées,
seuls quatre cent cinquante vers, transmis
par des papyrus égyptiens, nous sont
connus.
Né en 342 av. J.-C. à Athènes, Ménandre
débute dans la carrière littéraire à vingt ans.
Il composera jusqu'à sa mort, en 292, plus
de cent comédies. De son vivant, son succès
reste limité, et c'est seulement après sa mort
qu'il est reconnu comme l'un des auteurs
majeurs de son temps.
«
Manuscrit original d'un texte de Ménandre,
papyrus conservé à
Genève
EXTRAITS~~~~ ~~~~
Moschion demande à son serviteur
Daos de lui rendre compte des faits
et
gestes de Glycère
MOSCHION.
-Mais toi, entre d'abord, Daos,
et observe la situation.
Ce qu'elle fait, où est
ma mère, quelles sont leurs dispositions en
m'attendant.
Inutile de préciser en détail
cette partie, tu es habile.
DAOS.
-J'y vais.
MOSCHION.
-Je t'attendrai
ici, Daos, en faisant les cent
pas devant la porte.
(Daos
entre dans la maison.) Elle
m'a montré quelque bien
veillance, quand je l'ai
abordée hier au soir.
Elle ne
s'est pas enfaie quand je me
suis élancé vers elle, elle
m'a serré dans ses bras,
m'a donné des baisers.
Il
semble bien que je ne suis
pas désagréable à voir ni à
rencontrer,
je pense, par
Athéna ! mais sympathique
aux demoiselles de petite
vertu.
J'envoie un baiser à
Adrastée,
c'est bien mainte
nant le moment.
DAOS, ressortant de la maison.
- Moschion,
elle vient de prendre un bain
et elle est as
sise.
MOSCHION.
-Chère Glykera !
DAOS.
-Ta mère arrange quelque chose, je
ne sais quoi.
Elle va et vient.
Le déjeuner est
préparé; je crois qu'elles t'attendent.
MOSCHION.
-Voilà longtemps que je le dis.
Je
ne suis pas désagréable à voir.
Est-ce que
tu leur
as dit que j'étais là ?
DAOS.
-Non, par Zeus.
Le vieux Pathécos reproche à Polémon
son attitude injuste envers Glycère
PATHÉCOS.
-Très bien.
Peut-être il se peut
que tu lui aies plu un temps.
Maintenant ce
,
n'est plus le cas.
Elle est partie, car elle a
estimé que tu
t'es mal conduit à son égard.
POLÉMON.
-Que dis-tu ? Mal conduit ?
Voilà la parole qui, de toutes, me fait le plus
souffrir.
PATHÉCOS.
-Tu reconnaîtras, je le sais cer
tainement, que ce que tu
fais maintenant est
absurde.
Où vas-tu ? Qui veux-tu enlever ?
Elle est maîtresse d'elle-même.
Il n'y a
qu'une seule ressource pour celui qui est
dans une situation fâcheuse, quand il aime:
la persuasion.
POLÉMON.
-Et celui qui l'a séduite
pendant mon absence, est-ce qu'il
n'a pas commis une injustice ?
Traduction de Georges Méautis,
Le Crépuscule d'Athènes et
Ménandre, 1954
Statue de Ménandre,
Rome, musée du
Vatican
NOTES DE L'EDITEUR « Le sujet des pièces de Ménandre consiste
presque toujours en un amour contrarié, soit
avant, soit dans
le mariage, mais ce thème
est diversifié de cent façons.
Pourtant, ce
qui a fait la grande réputation de Ménandre,
ce n'est pas seulement l'habileté et la
variété de ses intrigues, c'est surtout
l'observation fine
et perspicace de toutes les
nuances du sentiment, de tous les traits de
caractère, grâce à laquelle ses personnages
paraissent vrais
et pris sur le vif.
Ils parlent
un langage simple, aisé, naturel, mais
savoureux, dans
le ton de la conversation familière
entre gens bien élevés et
spirituels.
Ménandre peint à merveille
la
plaisante diversité des êtres humains.
Il
exprime une sagesse exquise
et modérée, à
hauteur
d'homme, celle qui avait lentement
mûri sur
la terre privilégiée de l' Attique.
Il
est certes moins comique
qu' Aristophane:
il ne déchaîne que très rarement le gros rire,
mais il divertit, amuse, enchante par le
spectacle même de la
" comédie humaine " ,
dépeinte avec vérité, délicatesse, agrément
et humour.
» R.
Flacelière, Histoire
littéraire de la Grèce,
1962.
« Ménandre a ouvert au théâtre comique
un domaine d'exploitation inépuisable.
Il a aussi mis au point une forme
admirablement adaptée au genre
qu'il a
cultivé avec prédilection :
la représentation
fidèle, réaliste, amusée
et indulgente
d'épisodes de la vie privée de
la société
cultivée de son temps.
Par là on peut saluer
en lui la souche de notre théâtre comique
occidental.
» Victor Martin, Ménandre,
souche du théâtre occidental,
1959.
1, 4 Anderson-Giraudon 2, 3 photos Clarendon Press, Oxford, 1927 MÉNANDRE02.
»
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