Jeune Parque (la). Poème de Paul Valéry (analyse détaillée)
Publié le 24/10/2018
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Jeune Parque (la). Poème de Paul Valéry (1871-1945), publié à Paris chez Gallimard en 1917.
De la publication de cet ouvrage date la véritable notoriété de Valéry : « Son obscurité me mit en lumière : ni l'une ni l'autre n'étaient des effets de ma volonté. Mais ceci n'alla pas sans m'induire, ou me séduire à me dissiper régulièrement dans le monde. »
La Jeune Parque est le monologue d'une jeune femme qui vient de s’éveiller au bord de la mer. sous un ciel étoilé. Elle est en proie à une douleur indéterminée, réelle ou onirique, qu'elle attribue à la morsure d’un serpent Le reptile est tenu à l’écart par la conscience vigile, réfractaire à ses tentations. Mais la morsure répand un feu ardent laissant croire à la mort prochaine du moi. S'ensuit une méditation sur le « goût de périr » et la force du désir amoureux. La prochaine venue du printemps ne laisse le choix qu’entre la mort et l’assouvissement d’un désir ravivé. Toute une nuit, la conscience, avide de pureté, lutte et se métamorphose. Au lever du jour, le combat intérieur se dénoue par la mort d’un « monstre de candeur » et par la renaissance d'une « vierge de sang » qui opte finalement pour l'accord avec le monde.
Le travail sur l'Album de vers anciens, publié en 1920, avait redonné le goût de la poésie à Valéry qui désirait étoffer d'une quarantaine de vers ce recueil, à ses yeux trop mince. « Pour me contraindre à travailler, j'imaginai de leur imposer les règles les plus strictes de la poétique dite classique » : vers réguliers, césurés, sans enjambements ni rimes faibles. Au prix d'un travail ardu de plus de quatre ans - destiné en partie à tenir à l'écart les angoisses de la guerre -, il obtient un ouvrage dix fois plus long (plus de cinq cents alexandrins) et « cent fois plus difficile à lire qu'il n'eût convenu ». Cette obscurité, Valéry la conçoit comme se situant à l'intersection de la difficulté de son propos et du grand nombre de contraintes qu'il s'était imposées. Le résultat est néanmoins, toujours selon lui, un texte « trop dense », dont la versification est « le véritable sujet et le véritable sens », et qui requiert du lecteur une attention extrême.
Pourtant s'il subsiste des obscurités de détail, une lecture attentive permet de suivre aisément le mouvement de la méditation, « mouvement du sang » selon Alain. « Le sujet véritable du poème est la peinture d'une suite de substitutions psychologiques et, en somme, le changement d'une conscience pendant la durée d'une nuit », écrit Valéry. Cette « fête de l'Intellect » devait s'intituler « Psyché », titre que Valéry refuse finalement d'emprunter à Pierre Louÿs qui l'avait déjà choisi pour une de ses œuvres. Le drame de « la conscience consciente » qui s'y joue est celui de cette « sombre soif de la limpidité », menacée par l'irruption de l'amour. Toute la complexité humaine est révélée dans cette dualité inextricable : la vierge « à soi-même enlacée » est « d'intelligence » avec les périls qui la menacent. Face à cette aliénation par le désir naissant, la volonté toute pure veut résister par son immense et narcissique « orgueil » à la dépossession de soi ; mais la descente au royaume des morts où le sommeil l'avait conduite s'achève dans l'allégresse d'une renaissance à contrecœur (« malgré moi-même »).
Le monologue de la jeune Parque, en cette nuit décisive où elle passe de l'enfance à l'âge adulte, constitue un véritable drame intérieur. « Ma lassitude est parfois un théâtre », s'écrie la jeune femme au début de sa longue prise de parole. Et, en effet, son déchirement prend souvent la forme d'une prise à partie (exclamations, invocations, apostrophes) de ces divers interlocuteurs que sont les divinités, la nature et surtout cette autre elle-même qu'elle ignorait : « Dieux ! Dans ma lourde plaie une secrète sœur / Brûle, qui se préfère à l'extrême attentive. » Si la jeune femme est progressivement guidée vers une alternative tragique (« Lumière !... Ou toi, la Mort ! Mais le plus prompt me prenne !... »), au dénouement il n'y a plus qu'une « victime inachevée ». « Conduite, offerte et consumée », la jeune Parque semble une héroïne racinienne menée au sacrifice, et miraculeusement épargnée par la promesse d'une vie nouvelle.
«
ni rimes faibles.
Au prix d'un travail
ardu de plus de quatre ans -destiné en
partie à tenir à
l'écart les angoisses de
la guerre
-, il obtient un ouvrage dix
fois plus long (plus de cinq cents
alexandrins)
et «cent fois plus difficile
à lire qu'il
n'eût convenu».
Cette
obscurité, Valéry la conçoit comme
se
situant à l'intersection de la difficulté
de son propos et du grand nombre de
contraintes qu'il s'était imposées.
Le
résultat est néanmoins, toujours selon
lui,
un texte« trop dense,,, dont la ver
sification est « le véritable sujet et le
véritable
sens>>, et qui requiert du lec
teur une attention extrême.
Pourtant s'il subsiste des obscurités
de détail, une lecture attentive permet
de suivre aisément le mouvement de la
méditation,
> devait s'intituler > qui s'y joue est celui de
cette
« sombre soif de la limpidité »,
menacée par l'irruption de l'amour.
Toute la complexité humaine est
révé
lée dans cette dualité inextricable : la
vierge
«à soi-même enlacée» est
« d'intelligence » avec les périls qui la
menacent.
Face à cette aliénation par
le désir naissant, la volonté toute pure
veut résister par son immense et
nar
cissique « orgueil >> à la dépossession de
soi ; mais la descente au royaume des
morts où le sommeil l'avait conduite
s'achève dans l'allégresse d'une
renais
sance à contrecœur («malgré moi
même>>).
Le monologue de la jeune Parque, en
cette nuit décisive où elle passe de l'enfance
à l'âge adulte, constitue
un
véritable drame intérieur.
«Ma lassi
tude est parfois un théâtre >>, s'écrie la
jeune femme au début de sa longue
prise de parole.
Et, en effet, son déchi
rement prend souvent la forme d'une
prise à partie (exclamations, invoca
tions, apostrophes) de ces divers
interlocuteurs que sont les divinités, la
nature et surtout cette autre elle-même
qu'elle ignorait :.
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