Jérusalem délivrée de Torquato Tasso
Publié le 21/02/2013
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Torquato Tasso - en français le Tasse - (1544-1595) est considéré comme le plus grand poète italien du xv1e siècle. Protégé du duc d'Este, il fut pris de folie après avoir achevé la Jérusalem délivrée et passa sept années en prison. Libéré sans avoir cessé d'écrire, il fut recueilli par Vincent de Gonzague, puis par le cardinal Cinzio Aldobrandini. Les écrivains romantiques érigèrent en mythe la figure de ce génie tourmenté, victime de la folie. La vie du Tasse inspira nombre d'écrivains, notamment Goethe avec son Torquato Tasso ou Baudelaire avec le poème Sur le Tasse en prison et bien d'autres, tout comme certains épisodes de la Jérusalem délivrée suscitèrent des tableaux de Van Dyck, de Tiarini ou de Tiepolo, pour n'en citer que quelques-uns, privilégiant le séjour de Renaud et d' Armide dans le lieu enchanteur qu'elle a créé à son intention.
«
EXTRAITS
Clorinde demande le baptême, à l'heure de mourir,
de la main de Tancrède, qui l'aime et qui la tue,
abusé
par l'armure qu'elle porte
et qui la rend méconnaissable
Mais voici venue désormais l'heure fatale
qui doit mettre fin à la vie de Clorinde.
Il touche son beau sein de la pointe de son fer,
qui
s'y plonge et boit avidement son sang;
et la précieuse étoffe, brodée d'or,
qui enveloppait ses seins d'une caresse légère,
est inondée
par un flot tiède.
Elle sent déjà la vie
la
quitter, et son pied faible et défaillant vacille.
( ...
)
«Ami, tu as vaincu : je te pardonne ...
pardonne
aussi, non pas à mon corps, qui ne craint rien,
mais à mon âme ; ah
! prie pour elle et donne-moi
le baptême qui puisse laver ma
faute.»
Dans ces mots languissants résonne
un
je ne sais quoi de plaintif et de suave
qui descend dans son cœur, y éteint toute haine,
remplit ses yeux de larmes et les force à pleurer.
« L'œil de Renaud
s'y porte ; il voit
sortir de l'onde I Un beau front
qu'entourait sa
chevelure blonde.
»
«H âte notre
victoire, et que ton
noble fer
I Dans le Bois
enchanté triomphe
de
l'enfer.»
Les personnages de
Renaud et d'Armide ont
donné lieu à
de
nombreux opéras,
parmi lesquels il faut
citer les
Armide de Lulli, de Gluck, de
Haydn
et de Rossini,
ainsi que le
Renaud de
Haendel.
Quant à
Tancrède et
à Clorinde,
ils ont inspiré à
Monteverdi l'un de ses
plus beaux madrigaux,
Le Combat
de Tancrède et de
Clorinde,
et à Rossini
un
Tancrède.
Des chevaliers viennent trouver Renaud dans la retraite
enchanteresse
d' Armide et l'enjoignent de partir
pour retrouver les armes
(.
..
)Il hâta son départ, et sortit
del' enchevêtrement confus du labyrinthe.
Armide cependant découvre le terrible gardien
de la porte royale étendu sans vie.
Elle soupçonne d'abord, puis se rend compte
que son amant s'apprête à partir ;
et elle le voit (ah
! cruelle vue ! ) tourner
le dos à leur douce retraite, et fuir en toute hâte.
Elle voulut
crier:« Où cruel m'abandonnes-tu ? »,
mais la douleur fit barrage à sa voix,
et ses mots éplorés revinrent
encore plus amers frapper son cœur.
Malheureuse
! voici que son plaisir lui est arraché
par une force et un savoir supérieurs à son savoir.
Elle le voit, mais c'est en vain qu'elle s'emploie
à le retenir et qu'elle recourt à tous ses artifices.
Traduit de l'italien par Jean-Michel Gardair,
Classiques Garnier,
1990
NOTES DE L'ÉDITEUR de lui-même de livre en livre.» Voltaire,
l'inconscient.
Sur ce point, le Tasse prend
un curieux accent de modernité, et
l'on peut
comprendre que dans les temps de
la
Contre-Réforme le poète ait eu beaucoup à
craindre, aussi bien des Académies que de
la Sainte Inquisition.
Quant à la masse de
ses héros conçus en des proportions
surhumaines, doués de telles profusions
érotiques, elle paraît bien ressortir, comme
on
l'a remarqué, de quelque superbe
anomalie.» Pierre Jean Jouve, Folie et
génie,
Éditions Fata Morgana, 1984.
«Le sujet de la Jérusalem est le plus grand
qu'on ait jamais choisi.
Le Tasse l'a traité
dignement.
Il
y a mis autant d'intérêt que de
grandeur.
Son ouvrage est bien conduit ;
presque tout
y est lié avec art : il amène
adroitement les aventures ; il distribue
sagement les lumières et les ombres.
Il fait
passer le lecteur des alarmes de la guerre
aux délices de l'amour, et de la peinture des
voluptés il les ramène au combat : il excite
la sensibilité par degrés;
il s'élève au-dessus
« Le Tasse » in Essai sur la Poésie épique
(1733), cité par Joseph Cottaz, L' Influence
des théories
du Tasse sur l'épopée en
France,
Paris, Imprimerie R.
Foulon, 1942.
« Ce désir obsédant des guerriers, cette
tentation perpétuelle dans le cours du
combat et la bizarre présence de femmes
militaires, cette puissante défaillance aux
prises avec l'honneur, voilà bien la
transposition chevaleresque du vieux débat
entre instincts, Éros, mort, magma de
1 Roger-Viollet 2, 3, 4, 5 gravures de Barbier !'Aîné, Bossange, Masson et Besson, Paris, 1803 / B.N.
LETASSE02.
»
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