Jane Eyre de Charlotte Brontë
Publié le 21/02/2013
Extrait du document
Charlotte Brontë fut comme son frère et ses soeurs marquée toute sa vie par son enfance dans un village perdu du Yorkshire. Charlotte s'en inspira pour peindre la nature, ainsi que de son expérience traumatisante du pensionnat (où mourut sa soeur) pour écrire Jane Eyre. L'histoire de Jane Eyre, publiée en 1847 sous le pseudonyme masculin de Currer Bell, eut un tel succès qu'elle éclipsa pour un temps celle d'un autre auteur inconnu à l'époque, Ellis Bell (Les Hauts de Hurlevent). Les éditeurs mirent plus d'un an à découvrir que deux soeurs se cachaient derrière ces auteurs « miraculeux «.
«
Jane Eyre et la
bohémienne
EXTRAITS~ ~ ~~~~~~
La dureté du pensionnat
Le jour suivant commença comme le précé
dent, il fallut nous lever et nous habiller à
la lueur de la veilleuse ; mais ce matin-là,
nous fûmes obligatoirement dispensées de
la cérémonie de la toilette, car l'eau était
gelée dans les brocs.
Le temps avait changé
la veille au soir : un vent perçant du nord
est, sifflant toute la
nuit
par les fentes des fenêtres
de notre dortoir, nous
avait fait grelotter dans
nos lits
et avait trans
formé en glace le contenu
des pots à eau.
Avant
la fin des prières et
de la lecture de la Bible,
qui durèrent une bonne
heure et demie,je crus que
j'allais mourir de froid.
L'heure du petit déjeuner
vint enfin, et le porridge
n'était pas brûlé ;
il était
mangeable, mais
peu
abondant ; comme ma
portion était maigre! J'en
aurais mangé le double.
L'heure de la récréation
du
soir était pour moi le moment le plus
agréable de la journée à Lowood.
Le mor
ceau de pain, la gorgée de café, pris à cinq
heures, avaient ranimé notre
vigueurs' ils
n'avaient pas apaisé notre faim.
La longue
contrainte de la
journées' était relâchée, il
faisait plus chaud dans la salle de classe que
le matin, car on y laissait les feux brûler un
peu plus activement afin de suppléer, dans
une certaine mesure, aux chandelles
quel' on
n'avait pas encore apportées.
Les foyers rou
geoyant dans le crépuscule,
la permission de
s'ébattre, la confusion de tant de voix, don
naient une agréable sensation de liberté.
Il est probable que si j'avais récemment
laissé une maison aimée et de bons parents,
c'est à cette heure que j'aurais regretté avec
le plus d'amertume d'en être séparée( ...
).
La démente
Mr Rochester me rejeta derrière lui ; la
folle
fit un bond et, rageusement, le saisit
à la gorge, tout en essayant de lui mordre
la
joue ; une lutte s'ensuivit.
C'était une
femme forte et corpulente, presque aussi
grande que son mari, et qui
fit preuve dans
ce combat
d'une force virile ; plus d'une
fois elle faillit l'étrangler, tout athlète qu'il
fût .
Avec un coup bien assené, il aurait pu
avoir raison d'elle, mais il voulait la maî
triser, non la frapper.
Il
finit pars' emparer
de ses bras, les lui lia derrière le dos avec
une corde
que lui tendit Grace Poole, et
l'attacha à une chaise avec ce qui restait de
corde disponible .
Tout ceci se passa dans
un paroxysme de hurlements sauvages et de
soubresauts convulsifs.
Mr Rochester se
tourna alors vers les spectateurs, les re
gardant avec un sourire
amer et désolé .
« Voilà ma femme, dit-il.
Telles
sont les seules étreintes conju
gales que
je connaîtrai jamais ;
telles
sont les caresses qui se
ront la
joie de mes heures de
loisir !
Et voici ce que j'ai dé
siré posséder, dit-il (me
posant
la main sur l'épaule) : cette
jeune fille , qui demeure si
grave, si calme au seuil de
l'enfer , qui garde sa sérénité de
vant les contorsions d'un
démon.
(.
..
) »
Traduit de l'anglais par
Charlotte Maurat.
« Je saisis cette chère
main ...
avant de la
laisser entourer mes
épaules,
car j'étais
tellement plus petite
que lui que
je lui
servais à la fois de
guide et de soutien.
Nous entrâmes dans
le bois pour regagner la maison.»
NOTES DE L'ÉDITEUR
« La façon la plus concise pour définir
l'apport important de Charlotte Brontë
à la
littérature me semble être la suivante : elle a
atteint l'expression du romantisme le plus
élevé
à travers le réalisme le plus bas.
»
G.
K.
Chesterton.
« Charlotte Brontë a un magnifique
tempérament d'écrivain, de poète, et
Jane
Eyre
est un roman d'un très grand lyrisme.
Les descriptions, modèles réalistes et
poétiques, sont innombrables, pleines
d'aisance, et toujours si variées qu'elles
donnent l'impression
d'un tour de force.
C'est d'une extrême habileté, et, dans ce
domaine encore, l'auteur est un magicien.
figure
centrale, d'autant plus attachante
qu'elle est celle de Charlotte Brontë elle
même.
Pour la première fois dans le roman
anglais,
l'amour vibre à chaque page, et
laisse le lecteur comme ébloui par l'intense,
mais pure lumière
qu'il irradie.
La passion
s'y incarne en des êtres réels ...
Ce récit
tumultueux est nourri d'observations
exactes, d'émotions, de tristesse et de
« Charlotte trouve dans sa propre vie les ma
tériaux nécessaires
à la construction de ses
romans d'amour.
Son œuvre est
essentiellement autobiographique même si
parfois légèrement déguisée ...
» A.
L.
Wells.
( ...
)
»Jane Eyre est, à des titres divers, un livre
aussi génial, quoique
d'une moindre force,
que
Les Hauts de Hurlevent d'Emily.
Il
offre
un intérêt toujours grandissant par sa désirs
vécus.
» Charlotte Maurat,
introduction de
Jane Eyre, Le Livre de
Poche, 1964.
1 Les Sœurs Brontë (d étai l) vers 1884.
Nation al P o rtra it Ga llery , Londres/ Sipa -lcono 2, 3, 4, 5 ill.
E.
Dula c / M ary Evans Library Pictu re / J.M .
Dent / Explore r CHARLOTIE BRONTË 02.
»
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