Hôtel du Nord de DABIT
Publié le 27/03/2013
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En 1928, Eugène Dabit écrit la première version de Hôtel du Nord, qui sera publiée en 1929 aux Éditions Denoël et Steele et obtiendra le premier prix Populiste. L'école populiste s'opposait au naturalisme et âu psychologisme pour s'attacher à la "peinture des gens médiocres dont la vie comporte des drames". De 1930 à 1936, dans sa période de grande productivité littéraire, Eugène Dabit assiste à des réunions d' intellectuels d'extrême gauche, auxquelles il retrouve Malraux, Barbusse et Guéhenno; c'est du reste à ce dernier qu ' il emprunte une citation pour ouvrir le roman Hôtel du Nord.
«
« -Un bon plumard ...
Pour moi, c'est
l'e sse ntiel ,
Lecouvreur souleva un
coin de matela s,
- Voyez, c'est tout
lain e.»
~------- EXTRAITS
Lors de la visite de l'hôtel, ému par la ·
v
ue depuis les toits, Lecouvreur décide
de devenir le nouveau propriétaire
Lecouvreur suivit M.
Goutay dans un grenier
qui servait de débarras.
Les deux hommes
examinèrent les com
bles et se hissèr e
nt sur
l e toit.
De
là, reliés par
une fine passerelle, on
découvrait les quais
de Jemmapes et de
Valm y.
Des camions
chargés de sables sui
vaient les berges .
Au fil
du cana l, des péniches
glissaient, lentes
et
gonflées comme du bétail.
Lecouvreur, que ces ch oses laissaient
d'ordinaire insensible, poussa un cri :
-
Ah ! quelle vue ! Ce que vous êtes bien
situés! ...
Puis il ajouta :
- Je suis un vieux Parisien, mais voyez
vous,
je ne con naissais pas ce coin-là.
On
se cro irait au bord de la mer.
Il s'était arrêté près d'une cheminée et ré
fléchissait.
Un pli barrait son front et don
nait du poids à son visage, à ses petits yeux
fureteurs.
Des fumées tournoyaient dans le
so ir; vers le faubourg du Temple de gros
nuages couvraient le ciel.
La rum eur de
Pari s montait de toutes parts comme une ex
hortation confuse.
Soudain il se
dé cida , il
fallait à tout prix acheter cet hôtel.
Dès le début du roman, Renée, qui vient
de décider
d'être la bonne de l'hôtel, est
présentée comme un personnage
influençable
R en ée avait 22 ans.
Elle n'était ni belle ni
laid
e, ses joues rebondies sentaient encore
la campagne.
Sa jeunesse avait été malheu
r euse
et soumise.
Trimault se montrait
égoïste.
Soit , elle travaillerait pour lui
plaire.
Elle
s'engageait dans
la vie sans avoir souci
du bien ni du mal.
Elle admirait les femmes
qu'elle croisait dans
la rue.
Les unes surgis
saient devant elle
par ées comme des idoles,
les autres , quelquefois
de très jeunes filles, se
glissaient au milieu des hommes avec un sou
rire provocant et elle enviait leur hardiesse .
Elle prit honte
de son teint hâlé et se poudra,
elle se mit du rouge aux lèv
res et sa bouche
se dessina comme un bea u fruit
sur lequel
elle passait sa langue.
Elle consultait avide
ment
les catalog ues des magasins; paifois,
avant d'aller chercher
Pierre, elle faisait un
petit tour au
Printemps ou aux Galeries.
Sa
rob e des dimanches lui semblait bien laid e ...
Delphine et Julie sont deux vieilles filles
de province
dont l'existence recluse
contraste avec celle des autres
locataires
Delphin e et Julie Pellevoisin vivaient à l'hô
tel comme elles auraient vécu en province.
Lentes, tatillonnes, soucieuses de l'avenir et
craintives devant les hasards , elles ne sor
taient jamais.
Leur chambre,
fermée aux
bruits du dehors, était à le ur image : décor
sans grâce, sans
air, où naissaient et mou
raient leurs songeries
de vieilles filles.
Delphine avait trente-six ans, Julie trente et
un.
Elles se ressemblaient, disait Louise,
«Co mm e deux sœurs jumelles »; mêmes traits,
mêmes chairs fades, mêmes yeux troubles.
Mais
sur la joue gauche de Delphine, une
verrue piquée d'une touffe de
poils; ses lèvres
pin cées lui
donnaient une mine revêche
alors que le visage de Julie ex
primait la douceur.
Elles por
taient les mêmes robes, lar
ges, tombantes, de nuances
sombres, avec des
«dessous »
compliqués qui leur arrondis
saient la taille, des corsages
fermés et
des gants de coton qui cachaient leurs
mains sèches.
« ••.
Louise déclarait : « On va pas tarder à voir paraître le père
Deborger.
C'est son jour de sortie, » Le vieux entrait dans la boutique,
l 'air accab lé .
»
NOTES DE L'ÉDITEUR difficil em ent.
Après sa rencontre en 1927
avec André Gide, en 1928 avec Roger
Martin du Gard ,
il écrit Hôtel du Nord .
Suivent Petit -Louis en 1930 , Villa-Oasis en
193 2,
Un mort tout neuf en 1934 et La 'Zone
verte en 1935.
Il adhère à l 'Associatio n des
écrivains et artistes révolutionnaire s sans
jamais appart enir au parti comm uni ste.
D abit meurt de la scar lati ne lors
d'un
voyage qu'il fait en URSS en 19 36 avec
Louis Guilloux
et André Gide.
Il laisse son
Journal intime ( 1928-1936), qui sera publié.
Adaptation cinématographique
Eugène Dabit, né à Mers-Les-Bains en
1898, passe toute son enfance à Montmar
tre,
à Pari s, où sa mère est "éve ntailleu se" et
son père banda giste.
Il devient a ppr enti
ferron nier d
'ar t pui s électricien du métro,
avant de
s'e ngager comme artilleur en 1916.
Au front,
il découvre J'œuvre de Charle s
Louis
Philippe et, sous cette influence ,
décide d'écrire.
De 1918 à 1926 , il se
consacre à la peinture , dont il vit très
Photo (a) Photo Harlingue· Viollet; (b , c, d, e, f) bo is de Paul Baudier , éd.
Arth èm e Faya rd et Cie ( 1934)
En 1938 , Marce l Carné tire un film du
roman
Hôt el du Nord.
Le récit est
transformé en une aventure tumultueuse et
romantique, bien servie sur
Je plan
technique
et artistique : décor d'Alexandre
Trauner , musique de Maurice Jaubert...
et
participation de Louis Jouvet, Ar letty
("Atmosphère ! Atmosp hère !" ...
)et
Bernard Blier.
Le film est un hymne au
Paris populaire , transformé par la caméra en
un lieu imaginaire.
DAB I T02.
»
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