Histoire de Monsieur Cleveland, fils naturel de Cromwell, écrite par lui-même, ou le Philosophe anglais
Publié le 27/11/2018
Extrait du document
Histoire de Monsieur Cleveland, fils naturel de Cromwell, écrite par lui-même, ou le Philosophe anglais
Ce long roman d’aventures épiques imaginaires, où les ombres de Cromwell et d’Henriette d’Angleterre donnent un cadre historique à la fusion du roman philosophique et du « roman sensible », eut une genèse chaotique : deux premiers tomes écrits en Angleterre en 1730; deux autres en Hollande en 1731. Après bien des aventures, d’autres travaux, des amours et des affaires scandaleuses, Prévost ne se remet qu’en 1737, en France, dans une période plus calme, à ce roman dont le plan a proliféré et qui reflète sa plus grande crise intérieure. Il l’achève en 1739, à quarante-deux ans, avec le VIIIe tome. C’est le plus grand succès romanesque du siècle avant la Nouvelle Héloïse.
Cleveland est le grand roman du doute et de la recherche de la vérité. Alourdi parfois par les longs monologues du héros analysant sa crise, il présente, à travers des aventures romanesques invraisemblables, une revue de toutes les attitudes religieuses possibles à l’époque, du protestantisme au jansénisme, du jésuitisme à la religion naturelle. Avec des questions anxieuses : la vie et la création ont-elles un sens? Le monde n’est-il que « dérèglement et cruauté »? Pourquoi n’y a-t-il pas de consolation équivalente au désespoir? Pourquoi les secours divins promis par la religion sont-ils inefficaces? Pourquoi la Nature et la Grâce sont-elles inconciliables, alors qu’elles sont deux ordres de Dieu? Inlassables interrogations adressées au Dieu caché et au Ciel muet. Cleveland semble finalement s’accommoder d’un amalgame doux et vague d'anglicanisme, de quiétisme, d'épicurisme, avec un arrière-fond sensible de lumière maçonnique. « Cleveland est le long récit d’une conversion manquée » (Jean Sgard).
«
le
plus grand succès romanesque du siècle avant la Nou
velle Héloïse.
Cleveland est le grand roman du doute et de la recher
che de la vérité.
Alourdi parfois par les longs monolo
gues du héros analysant sa crise, il présente, à travers
des aventures romanesques invraisemblables, une revue
de toutes les attitudes religieuse s possibles à l'époque,
du protestantisme au jansénisme, du jésuitisme à la reli
gion naturelle.
Avec des questions anxieuses : la vie et
la création ont-elles un sens? Le monde n'est-il que
«dérèglement et cruauté>> ? Pourquoi n'y a-t-il pas de
consolation équiva lente au désespoir? Pourquoi les
secours divins promis par la religion sont-ils inefficaces?
Pourquoi la Nature et la Grâce sont-elles inconciliables,
alors qu'elles sont deux ordres de Dieu? Inlassables
interrogations adressées au Dieu caché et au Ciel muet.
Cleveland semble finalement s'accommoder d'un amal
game doux et vague d'anglicanisme.
de quiétisme, d'épi
curisme, avec un arrière-fond sensible de lumière
maçonnique.
•< Cleveland est le long récit d'une conver
sion manquée >> (Jean Sgard).
Synopsis -Persécuté par son père.
Crom w ell .
Cleve
land passe son enfance avec sa mère dans la caverne de
Rumney HoiE>.
Il y rencontre un autr e proscrit, lord Axmins
te r.
et s'éprend de la fille de ce dernier.
Fanny.
Quittant leur
caverne.
les proscrits se réfugient en France.
Cleveland y
retrouve son grand-père maternel.
qui veut lui faire épouser
une riche veuve.
Mm• Lallin.
Malentendu.
Axminster.
nommé gouverneur des colonies anglaises après la mor t
de Cromwell.
emmène Fa nny en Amérique.
Cleveland l'y
r e trouv e.
après une longue odyssée.
quelque part vers les
Appalaches.
et l'épouse selon les rites indiens en usage
dans la tribu des Abaquis.
qui les a recueillis et qui prennent
Cleveland pc·ur chef et légi sla teur.
Fanny met au monde
une fille.
L'e> périence de société idéale et de religion natu
relle se heurte à ses propres contradictions et à l'ins tab ili té
humaine.
Nouveau départ.
Attaqué par la tribu cruelle des
Rouintons, le groupe de Cleveland est décimé.
sa fille enle
vée pour êtm mise à mo rt.
Cleveland et Fanny s'accusent
mutuellemert.
se séparent.
Fanny, toujours secrètement
ja lou se de Mme Lalh n.
part avec un aventurier français.
Gelin; arrivée en France.
elle se retire dans un couvent.
Cleveland.
solitaire et désespéré.
rev1ent lui aussi en
France: après une tentative de suicide.
il rencontre des
ecclésiastiql.es de tous ordres qui le ramènent à une reli
gion confuse.
Pro tégé à Saint-Cloud par Henriette d'Angle
terre.
catholique.
et un noble protestant anglais exilé.
lord
Clarendon.
qui deviennent ses parents adoptifs.
il s'éprend
d'une jeune fille.
Cécile de R ...
; amour réciproque.
bien
qu'il lu i avoue ne pouvoir l'é p o us er parce qu'il est déjà
marié.
Il re trou ve Fanny, est partagé entre deux amours.
mais on découvre que Cécile est leur fille.
échappée aux
Rouintons.
1\e pouvant se libérer.
elle.
de son amour inces
tueux.
Cécile meurt.
Cleveland et Fanny repartent en Angle
terre pour ramener le corps de leur fille dans la terre natale.
Avec cette architecture centrale interfèrent.
selon la
technique hc,bituelle de Prévost.
d'innombrables épisodes
et intrigues é nnexes qu'il serait impossible de résumer ici.
Pour les contemporains, Cleveland fut d ·abord le pro
totype de l'âme sensible.
Ses «tristes réflexions>>, son
« horreur irrésistible pour la vie >>, la tentation du suicide
font de lui - son origine anglaise aidant -le premier
grand représentant du spleen dans la littérature française.
Son inquiétude philosophique n'exis te qu'à partir de son
malaise affectif.
Exemple des «vicissitudes >>, il ne vit
que d'exc ess iv es sensations de joie et de douleur.
Si
quelques désespoirs paroxystiques rappellent l'ex
pression baroque de la souffrance, son dolorisme satur
nien prélude à toutes les sombres rêveries de la seconde
moitié du siècle.
Il est seulement étrange de voir se
refléter en un personnage dont les aventures fictives se
déroulent à la fin du xvu• siècle la crise des valeurs vécue
par Prévost et son temps après la mort de Louis XIV.
Preuve de plus de l'écartèlement de l'abbé entre deux
siècles.
Il
est étrange, pour la même raison, de trouver dans
ce roman une mise en question des utopies, dont la vogue
s'est développée au xvm• siècle.
Lorsqu'il veut établir
chez les Abaquis le régime naturel idéal, Cleveland se
heurte à l'obligation d'user d'au to ri ta ri sm e, d'exploiter
la superstition et, finalement, constate à quel point peut
être fragile la confiance des hommes en un chef.
Son
demi-frère Bridge, proscrit aussi par Cromwell, trouve à
Sainte-Hélène -pure imagination de Prévost -une
colonie puritaine de réfugiés protestants où règne l'ordre
égalitaire parfait des utopies, à ceci près qu'il y naît trop
de filles.
Quand arrivent six garçons pour une centaine
de filles, les droits de l'amour et de l'individu devancent
le tirage au sort organisé par la gérontocratie ecclésiasti
que.
C'est la guerre dans l'île heureuse, la mort du pas
teur, l'exil de Bridge, obligé d'abandonner celle qu'il a
épo usé e à la face du Ciel.
Démonstration dramatique
et ironique de la vanité des utop ies face aux.
passions;
contradiction insoluble de Prévost, qui voudrait de l'or
dre dans l'amour, bien conscient que l'amour introduit
partout le désordre.
Il est remarquable que, dans tous
leurs voyages, les héros ne trouvent que dans le peuple
imaginaire des Nopandes, sur une île des Caraïbes, la
société idéale, mais aussi dérisoire, féerique, avec des
charrettes attelées de lamas blancs et un prince de douze
ans qui tombe follement amoureux d'une petite Cécile
âgée de deux ans!
Le seul grand amour réciproque est celui de Cleveland
et de cette même Cécile quinze ans plus tard, amour
interrompu de justesse au bord de l'inceste.
La mort
pathétique de Cécile, qui ne parvient pas à refouler cet
amour-erreur, présente.
en plus funèbre, la même confu
sion baroque de l'amour profane et de l'amour mystique
que le visage extatique de la sainte Thérèse du Bernin.
Mourant comme une sainte, Cécile prouve elle aussi, à
sa façon, que l'amour est une forme de sainteté : « Son
dernier soupir n'avait été que l'élancement passionné
d'une amante qui se précipite dans le sein de ce qu'elle
aime, pour y rassasier à jamais la fureur qu'elle a d'aimer
et d'être aimée>>.
Somme des idées et des fantasmes de Prévost, Cleve
land est à coup sûr l'un des plus importants romans du
xvut• siècle, par son contenu et par son influence.
BIBLIOGRAPHIE L'o u vra g e de Jean Sg ard , Prévost romancier, cité dans la
Bibliographie générale.
offre dans les chapitres IV à IX la meil
leure analyse, à ce jour.
des divers aspects de ce roman..
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- HISTOIRE DE M. CLEVELAND, FILS NATUREL DE CROMWELL, ÉCRITE PAR LUI-MÊME, OU LE PHILOSOPHE ANGLAIS L’abbé Prévost
- CLEVELAND (le Philosophe anglais, ou Histoire de M.)
- HISTOIRE DE MONSIEUR CLEVELAND. (résumé)
- Georges Washington devoir d'euro-histoire anglais
- HISTOIRE DES FILS DE LOUIS LE PIEUX de Nithard (résumé)