Histoire de Gil Blas de Santillane
Publié le 09/04/2013
Extrait du document


«
EXTRAITS ----- -- ~
«J'ent rais alors dans
ma quinzième année.
Quel plaisir, à cet âge,
d'être indépendant et
maître de ses volontés ! J'eus bientôt fait
connaissance avec des
jeunes gens qui me
dégourdirent, et
m'aidèrent à manger
mes ducats.
»
Gil Blas est prisonnier d'une bande de
voleurs.
Etendu
sur un grabat, il attend
que tout
le monde dorme pour tenter de
s'évader
Je pris la lampe, et sortis du caveau en me re
commandant à tous les saints du paradis.
Ce
ne
fut pas sans peine que je démêlai les dé
tou rs de ce
nouveau labyrinthe.
J'arrivai
pourtant à la porte de l'écurie, et j'aperçus
enfin l'allée que je cherchais.
Je marche, je
m'avance vers la trappe avec une joie mêlée
de crainte : mais ,
hélas! au milieu del' allée
je rencontrai une maudite grille de fer bien
fermée,
et dont les barreaux étaient si près
l'un del' autre, qu'on y pouvait à peine pas
ser la main.
Je
me trouvai bien sot à la vue de
ce nouvel obstacle, dont
je ne m'étais point
aperçu en entrant, parce que la grille était
alors ouverte .
Je ne laissai
pas pourtant de
tâter les barreaux.
J'examinai la serrure,
je tâchais même de la forcer, lorsque tout
à coup
je me sentis appliquer vigoureuse
ment entre les épaules cinq ou six coups de
nerf de bœuf Je poussai un cri si perçant,
que le souterrain en retentit; et, regardant
aussitôt derrière moi,
je vis le vieux nègre
e n chemise, qui d'une main tenait une lan
t erne sourde,
et del' autre l'instrument de
mon supplice.
Ah! Ah! dit-il, petit drôle,
vous voulez vous
sauver! Oh! ne pense z
pas que vous puissie z me surprendre;
je vous ai bien entendu.
Vous ave z cru
trouver la grille ouverte, n'est-ce-pas ?
Apprenez, mon ami, que vous la trouvere z dé
sormais toujours fermée.
Gil Blas entre au service du docteur
Sangrado et souffre vite
de son alimenta
tion austère,
au point qu'il songe le
quitter.
C'est alors qu'il apprend que le
médecin a de grandes ambitions pour lui
Ecoute, me dit-il un jour, je ne suis point de ces
maîtres durs
et ingrats qui laissent vieillir
leurs
domestiques dans la servitude avant
que de les récompenser.
Je suis content de toi,
jet' aime; et sans attendre que tu m'aies servi
plus longtemps,}' ai pris la résolution de faire
ta
for tune dès aujourd'hui ; je veux tout à
l'heure te découvrir le
fin de l'art salutaire
que
je professe depuis tant d'années.
Les
autres médecins en font consister la
connaissance dans mille sciences péni
bles ; et moi, je prétends t'abréger un
chemin si long, et t'épargner la peine
d'étudier la physique, la pharmacie, la
botanique
et l'anatomie.
Sache, mon ami,
qu'il nef aut que saigner et faire boire de
l'eau chaude : voilà le secret de guérir
toutes les maladies du monde.
Faisant le grand seigneur à la cour
grâce aux faveurs
d'un ministre, Gil
Blas
se donne des airs.
Un ancien
compagnon, Fabrice, lui adresse ses
reproches
En bonne foi, mon ami, parle : vivons-nous
ensemble
comme autrefois ? Quand j'allais
le matin frapper à ta porte, tu venais m' ou
vrir toi-même encore
tout endormi le plus
souvent, et j'entrais dans ta chambre sans
façon.Aujourd'hui, quelle différence ! Tu as
des laquais.
On me fait attendre dans ton
antichambre, et il faut qu'on m'annonce
avant que je puisse te parler.
Après cela,
comment me reçois-tu ? avec une politesse
glacée,
et en tranchant du seigneur.
On di
rait
que mes visites commencent à te peser.
Crois-tu qu'une pareille réception soit
agréable à un homme qui t'a vu son cama
rade ? Non, Santillane, non ; elle ne me
convient nullement.
Adieu, séparons-nous à
l'amiable.
Défaisons-nous tous deux, toi
d'un censeur de tes actions, et moi d'un
nouveau riche qui se méconnaît.
« Un moment après, je servis un potage qu'on aurait pu présenter au
plus fameux directeur
de
Madrid ( ...
) si la
dame Jacinte n 'y eût épargné les épices, de peur d'irriter la goutte
du licencié.
»
NOTES DE L'ÉDITEUR comme lui.
»Sainte- Beuve, préface à Gil
Blas,
Garnier, 1850.
«Les hommes, c'est-à-dire leur société, et
spécialement la société de son temps et de
son pays : ministres, courtisans, clergé,
noblesse , magistrature, police, traitants,
médecins, auxquels il prodigue des brocards
de pure tradition moliéresque (non pas aux
chirurgiens), pédagogues, fripiers, poètes,
comédiens, bandits.
Les hommes, c'est-à
dire, à travers tous costumes, toutes classes
et tous épisodes, l'homme ondoyant et
éternel.
" Voilà l'homme ! " dit Gil Blas en
se regardant faire (liv.
XI, ch.
V), lui qui est
un certain homme , pourtant.
» Gil Blas ,
introduction d 'Auguste Dupouy, Société
Les Belles-Lettres, 1935.
«Ce n'est pas un homme de génie, ni d'un
grand talent, ni qui ait en lui rien de bien
particulier ; c'est un esprit sain et fin, facile,
actif, essentiellement éducable, ayant en
lui toutes les aptitudes.
Il ne s'agit que de
les bien appliquer; ce qu'
il finit par faire :
il devient propre à tout, et il mérite en
définitive cet éloge que lui donne son ami
Fabrice :
" Vous avez l'o til universel.
"
Mais il ne mérite cet éloge que tout à la
fin, et cela nous encourage ; nous sentons
en le lisant, que nous pouvons, sans trop
d'effort et de présomption, arriver un jour
« ...
avec les fluctuations inévitables du
goût, le public conserve sa faveur à
!'Histoire de Gif Blas de Santillane.
La
variété du récit et la généralité de
l'expérience vécue par le héros en font une
grande œuvre narrative, une somme
littéraire et morale.
Celle-ci résume en effet
le roman du Siècle
d'Or espagnol et( ...
)
exprime l'ironie propre au Siècle des
Lumières.
»Histoire de Gil Blas de
Santillane,
introduction de Roger Laufer,
Garnier-Flammarion, 1977.
1 coll.
Vio llet 2, 3, 4 éd.
Oos te rwyc h - S tee nh owe r et V ytn erl, sans no m d 'illu strat eur , Amsterda m , 172 0 - 1 725 LESAGE02.
»
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