Hannah Arendt, La crise de la culture, Huit exercices de pensée politique (fiche de lecture)
Publié le 16/08/2012
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D’après Hannah Arendt, une crise générale s’est abattue sur tout le monde moderne, atteignant toutes les branches de l’activité humaine. Celle-ci se manifeste de différentes façons selon les pays. En Amérique, elle se matérialise par la crise périodique de l’éducation qui est devenue un problème politique important. Cependant, on ne lui accorde pas toute l’intention qu’elle mérite, du fait de son caractère local et qu’on la considère sans lien avec les problèmes du siècle. Une crise nous oblige à revenir aux questions elles-mêmes. Bien que la crise de l’éducation puisse affecter le monde entier, il n’est pas étonnant que ce soit en Amérique qu’elle revête sa forme la plus extrême car l’éducation y joue un rôle important. En effet, l’Amérique a toujours été un pays d’immigration où la scolarisation, l’éducation et l’américanisation des enfants d’immigrants permettent de fondre les groupes ethniques en un seul peuple. L’Amérique se caractérise par son enthousiasme envers tout ce qui est nouveau. Ainsi, il paraît naturel de vouloir faire un nouveau monde avec ceux qui sont nouveaux par naissance et par nature. Or, en politique, l’éducation ne peut jouer aucun rôle. Cependant, en Amérique, l’éducation a un rôle politique car l’école américanise les enfants mais aussi leurs parents. Ainsi, en Amérique, le niveau scolaire est bas, cela résulte du fait que dans ce domaine, ce pays est le plus « avancé « et le plus moderne du monde. La crise de l’éducation en Amérique annonce la faillite des méthodes modernes d’éducation et pose le problème. De plus, la crise a été aggravée par la notion d’égalité, donc par un élément politique.
«
IVKierkegaard, Marx et Nietzsche ont concentré leur révolte sur le même point, c'est-à-dire, sur « les prétendues abstractions de la philosophie et son concept del'homme comme animal rationale ».
Ainsi, Kierkegaard, promeut les hommes concrets, Marx montre que l'humanité de l'homme consiste en sa force productrice etactive.
Nietzsche insiste sur la productivité de la vie, sur la volonté de l'homme, « la volonté-pour-la-puissance ».La tradition s'achève par des entreprises de retournement qui mettent le commencement en exergue dans un double sens.
Kierkegaard, Marx et Nietzsche, par leretournement, vont au cœur du sujet en questionnant la hiérarchie traditionnelle des facultés humaines et surtout en tentant de mettre en lumière la qualitéspécifiquement humaine.
II.
Le concept d'histoire : Antique et moderneI.
Histoire et naturePour Hannah Arendt, la compréhension d'Hérodote, concernant le but de l'histoire, était enracinée dans le concept et l'expérience grecque de la nature.
Celle-ci étaitconsidérée comme immortelle car, à jamais présente.
De ce fait, les choses de la nature n'ont pas besoin de la mémoire des hommes pour continuer à exister.
PourAristote, l'espèce humaine possède l'immortalité.
Toutefois, les individus ne sont pas immortels.
C'est donc la mortalité qui devint le cachet de l'existence humaine, dufait de la vie individuelle.
La vie individuelle se distingue de toutes les autres choses par le cours rectiligne de son mouvement qui coupe en travers les mouvementscirculaires de la vie biologique.
Ainsi, dans l'antiquité, on commença à construire le mouvement historique à l'image de la vie biologique.D' après Platon, l'espèce humaine n'est immortelle que dans la mesure où ses générations successives sont envisagées comme un tout et « croissent ensemble » avec latotalité du temps.
Donc l'humanité comme succession de générations et le temps ont le même âge.Les mortels ne participent qu'à l'immortalité par leur appartenance à une espèce immortelle, mais le philosophe lui est admis dans le voisinage de l'être à jamaisintemporel bien qu'il ne soit qu'un mortel.Le concept de l'immortalité est basé sur la connexion intime entre les concepts de nature et d'histoire.
L'histoire reçoit dans sa mémoire les mortels qui se sont illustréspar l'action et la parole et donc se sont montrés dignes de la nature .
Leur renom immortel signifie qu'ils peuvent demeurer parmi les choses qui durent à jamais.Notre concept moderne de l'histoire ne fonctionne pas moins de concert avec celui de la nature que les concepts correspondants et très différents qu'on trouve au débutde notre histoire.
La physique, comme investigation de ce qui est, n'a pas moins l'homme pour centre que la recherche historique.
La vieille querelle entre lasubjectivité de l'histoire et l'objectivité de la physique a ainsi beaucoup perdu de sa signification.L'introduction de l'impartialité viendra par Homère lorsqu'il chanta les actions des troyens mais aussi celles des achéens.
De même qu'on note l'apparition par la suited'un élément contribuant à l'objectivité historique et particulièrement avec Thucydide, il s'agit de la discussion, où les Grecs échangeaient leur « opinion ».La discussion moderne relative à l'objectivité dans les sciences historiques manque de clarté du fait que l'impartialité homérique et l'objectivité thucydidienne ne sontpas présentes à l'époque moderne.Avec l'ère chrétienne, la relation entre la vie et le monde est enseignée différemment que durant l'antiquité.
En effet, pour le christianisme, seuls les hommes sontimmortels.
Ce qui renforce la subjectivité.Toutefois, l'homme moderne apprendra à se méfier de ses sens, puis convaincu de l'incertitude de la sensation, les sciences de la nature se tournèrent vers l'expérience.L'aliénation du monde de l'homme trouve son expression la plus fondamentale dans le de omnibus dubitandum est de Descartes.La science moderne serait née lorsque l'attention se déplaça du « quoi » au « comment », et lorsque l'accent fut déplacé de l'intérêt pour les choses à l'intérêt pour lesprocessus.
Ainsi, à l'époque moderne l'histoire devint un processus fait par l'homme.
Avec le monde technologique émerge l'action.
Par l'action sur la nature, c'est-à-dire déclenchement de processus naturels par l'action humaine, il y a captation de la nature dans le monde humain.Si à l'antiquité, le dénominateur commun de la nature et de l'histoire résidait dans le concept de l'immortalité, à l'époque moderne, il réside dans le concept deprocessus qui est le résultat de l'action humaine.
Ainsi, il convient de définir l'homme comme un être capable d'action.II.
L'histoire et l'immortalité terrestreLa notion de processus historique confère au temps une importance inégalée jusqu'alors.
Dans la conception chrétienne, l'humanité a un commencement et une fin,c'est-à-dire, le monde a été créé dans le temps et il connaîtra une fin à la semblance de toutes les choses temporelles.
Notre système temporel, introduit à la fin duXVIIIème, prend pour point de repère la naissance du Christ, permettant ainsi de compter le temps en avant comme en arrière.
Cela induit une extension del'humanité vers un passé infini et un futur infini.
Cette double infinité procure à l'humanité une immortalité terrestre potentielle.
Sont ainsi éliminées toutes leshypothèses religieuses sur le temps dans l'histoire séculaire.L'impact de la notion d'histoire sur la conscience moderne a lieu tardivement.
C'est la philosophie d'Hegel qui permettra son apogée puisque le concept central de samétaphysique est l'histoire.
Pour Hegel, la vérité réside et se révèle dans le processus temporel, caractéristique même de toute la conscience historique moderne.Par « sécurisation », Hannah Arendt entend, dans un premier temps, la séparation entre la religion et la politique.
Puis, elle l'exprime comme un événement qui peutêtre daté dans le temps historique, que comme un changement d'idée.
Avec la sécularisation, car étant le fait d'hommes qui ne remettaient pas en cause la doctrinereligieuse traditionnelle, il ne s'agissait pas de nier l'existence de Dieu, mais plutôt de découvrir dans l'espace séculier une signification indépendante que Dieu lui-même ne pouvait transformer.Par conséquent, la politique s'intéressa de nouveau à l'existence des hommes.
C'est donc un espace publico-politique qui émerge, censé accorder aux actions descitoyens l'immortalité.
La sécurisation signifiait aussi que les hommes étaient redevenus des mortels.
La vie et le monde étaient devenus mortels, mettant fin àl'alternative entre une vie individuelle immortelle dans un monde mortel et une vie mortelle dans un monde immortel.C'est donc dans une période de transition où l'influence religieuse en une vie immortelle diminue face à la sécularisation et où l'indifférence à la question del'immortalité n'était pas encore apparue.III.
Histoire et politiqueL'époque moderne produisit dès son départ une nouvelle philosophie politique qu'incarne Hobbes, mais aussi des philosophes désireux de s'orienter conformémentaux exigences du domaine politique.
Il semble donc que la transformation hégélienne de la métaphysique en philosophie de l'histoire fut précédée par une tentative dese débarrasser de la métaphysique au profit d'une philosophie de la politique.
Le concept d'histoire, notamment pour Hegel, était surtout théorique et ne devait êtreutilisé directement comme principe d'action, ce que fit Marx par la combinaison avec les philosophies téléologiques du début de l'époque moderne, en identifiant lesens et la fin.
Or, l'histoire, en tant que processus, est inconnue aux acteurs mais elle est compréhensive à ceux qui viennent après.
Traditionnellement, lacontemplation (vita contemplativa) est supérieure à l'action (vita activa), mais cette hiérarchie sera renversée par Kant aussi bien que par Marx et Nietzsche.Et la dynamique interne connaitra aussi un renversement dans les travaux de Kant et de Marx.
L'action de l'homme se mouvant dans un monde de relations, où setrouvent poursuivies des fins multiples et opposées, n'accomplit presque jamais sa première intention.
Ainsi, à l'époque moderne, c'est l'histoire qui semblait donner le« sens » à la sphère politique, permettant de se réconcilier avec la réalité des affaires humaines.EpilogueHannah Arendt affirme que l'action peut-être basée sur n'importe quelle hypothèse et cette dernière deviendra réelle dans le cours d'une action menée de façoncohérente.
Donc, contrairement à ce que supposaient la métaphysique et la logique traditionnelle, l'axiome qui est à l'origine de la déduction n'a pas à êtrenécessairement d'une vérité évidente.
L'aliénation du monde propre à l'époque moderne fait que l'homme, où qu'il aille ne rencontre que lui-même.
Tous les processusse révèlent faits par l'homme.
Les concepts d'histoire et de nature ne sont plus recevables car toute objectivité et tout sens du processus unique total semble s'évaporer.Par conséquent, il ne subsiste qu'une société d'hommes qui, privés d'un monde commun, vivent pressés comme une masse.
Et au monde autrefois commun à tous, ilne reste qu'une société de masse.
III.
Qu'est-ce que l'autorité ?I.
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