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GESTE (chanson de)

Publié le 17/01/2019

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GESTE (chanson de). En ancien français, la geste désigne les actions (lat. gesta} d'un homme ou d'une famille, l'histoire (res gestas) d'un lignage. Les chansons de geste ont donc pour fonction de chanter les hauts faits de héros que leur nom rattache à l'histoire des pays de France, à la généalogie fondatrice de la grande féodalité et de la monarchie. Ce sont donc des figures comme celles de Charlemagne et Roland, de Guillaume et Vivien, de Raoul et Bernard, qui se distinguent des Lancelot, Gauvain, Perceval et Arthur, comme la culture autochtone se distingue de la culture celtique. La topographie même de la geste enracine la légende dans le sol ancestral : les guerres étrangères, les croisades sont menées pour assurer l'honneur et la vie d'un pays que menacent aussi des rivalités et des révoltes internes, contre lesquelles le héros doit réagir. Il s'agit donc bien d'une fonction épique remplie par ces chansons dont les sources les plus lointaines sont peut-être carolingiennes, c'est-à-dire franco-germaniques. Par comparaison, les récits romanesques, d'abord conçus pour adapter les épopées antiques comme l'Énéide et la Thébaïde, approfondissent la fonction épique dans le sens du mythe. La chanson de geste est plus schématique, plus liée à des préoccupations idéologiques : c'est une épopée politique.
 
La forme des chansons de geste peut s'expliquer aussi par cette fonction épique. Les textes se présentent en effet comme une série de laisses, ou tirades, qui ne constituent pas un découpage logique, mais s'organisent en unités phoniques d'après l'assonance. La même idée, les mêmes vers peuvent être ainsi repris d'une tirade à l'autre. Le rythme, en général fondé sur le décasyllabe, avec une césure fortement marquée, suggère une déclamation assez solennelle, ou une intonation plus proche du récitatif que du chant ; mais il est fait parfois mention d'un accompagnement musical. Les textes tels qu'ils ont été conservés dans les manuscrits comportent des structures caractéristiques de la littérature orale, avec de nombreuses formules stéréotypée, par exemple dans la description des batailles. Le style de la chanson de geste est donc adapté à une exécution apparemment plus proche de l'art dramatique que de la lecture. Mais ces effets d'oralité ont pu devenir très vite un maniérisme sans rapport direct avec les conditions de la création. Car l'art des jongleurs n'exclut pas les raffinements dans la forme et le fond, où l'on sent plus de calcul et de science que d'improvisation.

Sous des apparences populaires, renforcées par des effets comiques, les chansons de geste se prêtent donc à diverses manœuvres mobilisatrices. Joseph Bédier a montré comment elles pouvaient servir à la popularité de certains sanctuaires, notamment sur les chemins de Saint-Jacques de Compos-telle. Mais la propagande politique l'a vite emporté sur la propagande religieuse. C'est dans cette perspective que peuvent s'expliquer bien des manipulations de l'histoire par la geste. C'est une des implications de la classification proposée dans Girart de Vienne par Bertrand de Bar- sur-Aube : la geste du roi de France, avec Charlemagne comme figure centrale, lui semble la plus prestigieuse ; celle de Doon de Mayence, qui attribue des émules, sinon exactement un lignage, à Ganelon, aurait pour axe principal la révolte des vassaux ; celle de Garin de Monglane a pour héros central Guillaume d'Orange. Les chansons de geste connurent le succès tout au long du Moyen Âge (Fierabras fut imprimé dès 1478), évoluant d'ailleurs avec le goût littéraire : d'abord enrichies d'éléments romanesques (Huon de Bordeaux), on finit par les transcrire en prose et elles se fondirent avec les romans de chevalerie, dans la « Bibliothèque universelle des romans » et la littérature de colportage.


« Les jongleurs qui récitent de mémoire ont besoin de formules toutes prêtes qui reviennent avec peu de variations.Les mêmes motifs reviennent sans changement dans les différentes chansons : l'armement, le combat, la prière, ladéploration funèbre, etc.

Les procédés rhétoriques se répètent, les expressions reviennent plusieurs fois.

Il y est faitun grand usage de l'hyperbole (exagération).

Le jongleur peut ainsi improviser en partie sur un canevas, et créer unecertaine connivence avec son public. Le récit est très structuré Une chanson est composée de laisses, c'est-à-dire d'unités musicales dont tous les vers finissent sur la mêmevoyelle tonique (comme « âtre » et « âme », par exemple) et qui forment un sens complet.

Le vers le plus fréquentest le décasyllabe. Figures et thèmes épiques Charlemagne La figure centrale de bien des chansons est celle de l'empereur Charlemagne.

Il est vénérable ; il siège dans unverger toujours vert, au milieu de ses chevaliers et de ses guerriers, dans un ordonnancement parfait. La lutte entre le Bien et le Mal Le thème central des chansons est la lutte perpétuelle entre le Bien et le Mal, le Bien étant représenté par leschevaliers chrétiens, le Mal par les païens ou les Sarrasins. La rébellion On trouve aussi le thème de la rébellion contre l'autorité du roi (Ganelon dans Roland, Isembart dans Gormont et Isembart), rébellion condamnée et punie. Histoire et légende Les chansons de geste s'inspirent de faits historiques déjà anciens.

Les événements sont largement transformés,magnifiés et grossis pour devenir sujet épique et véritable légende. La Chanson de Roland (vers 1170) L'histoire En 778, Charlemagne, âgé de 32 ans, lance une expédition en Espagne.

Appelé par deux chefs arabes enrévolte contre l'émir de Cordoue, il met le siège devant Saragosse.

Après deux mois d'échec, les armées deCharlemagne se retirent et regagnent la Belgique.

Dans une bataille d'arrière-garde en Pays basque, Roland,duc de la Marche de Bretagne, trouve la mort. La légende Charlemagne, deux fois centenaire, rentre dans sa patrie après sept ans de conquêtes en Espagne.

Roland estson neveu.

Seule la trahison peut expliquer la défaite de Roncevaux. On voit ici comment la légende transforme un échec politique et militaire de Charlemagne en un épisodeglorieux, comparable aux croisades. Évolution du genre La majorité des chansons ont été composées entre la fin du xi siècle et le XIIIe siècle.

Aux XIVe et XVesiècles, leur nombre décroît et on procède à des remaniements et des mises en prose de chansonsantérieures. 1. L'inspiration épique est contaminée par d'autres influences. 2. L'influence du roman, notamment, se fait sentir : 3. importance grandissante de l'amour, qui cependant tient une place un peu marginale ;introduction du merveilleux féerique (et non plus seulement chrétien, avec la présence d'enchanteurs, denains, d'objets magiques, etc.) ; structure plus lâche dans les gestes tardives : la narration est plus coulée, les laisses de plus en plus amples.. »

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