FLAQUES DE verre. Recueil poétique de Pierre Reverdy (résumé de l'oeuvre & analyse détaillée)
Publié le 24/10/2018
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FLAQUES DE verre. Recueil poétique de Pierre Reverdy (1889-1960), publié à Paris chez Gallimard en 1929.
Alors qu'il n'avait publié jusqu'alors que des textes inédits dans les ouvrages qu'il donnait au public, Pierre Reverdy constitue deux recueils, l'un de poèmes versifiés, Sources du vent (repris dans
Main-d'œuvre en 1949), l'autre de poèmes en prose (Flaques de verre), en 1929. Si l'on excepte Pierres blanches (1930), le poète ne publiera plus aucun ouvrage de 1930 à 1937.11 semble alors soucieux de rassembler les textes provenant de sa collaboration à de multiples revues, d'avant-garde (Dada, Sic, Littérature) ou non (Feuilles libres, la Vie des lettres et des arts, le Radeau, 19221925), ou à la collection dirigée par Jacques Maritain et Stanislas Fumet, « le Roseau d'or» (décembre 1925-juillet 1928).
Si les poèmes conservent la place qu’ils avaient dans les ensembles publiés séparément, l’ordre chronologique de publication n’est pas respecté : par exemple, des poèmes de 1925 trouvent place au début suivis de poèmes de 1919. Reverdy a tenté de donner une grande unité au recueil : chaque poème retentit d’échos thématiques dont l’origine se trouve, diffuse, dans d’autres poèmes (dilution, surgissement pesanteur humaine, légèreté du vent de l’oiseau) et que renforce parfois la tessiture (nuit/pluie). Ainsi, le poète inerte son lecteur à participer à cette instauration d’une unité : en témoignent les titres soit contradictoires (\"Chute\", \"Vers le ciel\" ; \"... S'entre-bâille\". \"Porte du vide”) soit complémentaires (“l'Ame et le corps superposés\", \"l'Ame en péril\", \"Droit au corps”). Ce souci d'unité rejaillit dans le contexte immédiat de chaque poème : en véritables cycles, le poète conjugue son angoisse, sa solitude à la quête d’une présence qui ne soit pas illusoire ou décevante (\"Compagnon\", \"Globe\". 'Tout se tient\", \"Vers le ciel\", \"Caractère seul\", \"Saison\") ou donne de son art une représentation qui ne fart aucune concession à l'illusion (triptyque de 'Trois Étoiles\" ; “ le Vieil Apprenti”, “l'Ami de l’homme ou Parasite\"). Enfin, chaque poème, qu'il dise un devenir temporel, qu’il décrive un paysage ou une scène banale (\"...S’entre-bâille\"), est clos sur la confrontation d'un être et d’un monde extérieur, inquiétant Certains textes, où la dausule répète l'inciprt, illustrent formellement cette clôture (\"On ne peut pas sortir\", “Caractère seul\").
«
poésie qui, l oin de dormir « dans les
livres
,., « plane magistralement sur la
vie"· Cette hauteur et cette verticalité
la séparent d'
une terre où l'homme
pétrifié
("Plus lourd") est prisonnier de
ses miroirs
et de ses illusions ("D'une
autre rive", "l'Air de glace").
Le poète,
solidaire
d'un monde qui attend ("Sai
son"), n'est pourtant pas prophète.
Sa
parole , puisée « aux sources du
m épris
,., n 'est pas adressée à l'His
toire : le refus de la « bêti se et du men
songe ,.
et " la place tragique des bouti ques ,.
orientent le dis cours poétique
dans la
quête d'une radicale nou
veauté.
L'œil est là ("l'Eau
du jour")
pour transfigurer, de l'intérieur, ce qui
existe et retrouver l'être derrière le
paraître,
" le vrai sens de la vie»,
"quelque forme précise entre les
lignes,.
("Mélange d'ombres").
Cette
structuration est salvatrice, quand la
ligne d 'un mur , d' une rive ou l'aube
aux
« angles raidis ,.
donn en t existence
à
un « coin où retrouver l'es prit qui s'est éteint».
Que mettre en ce « coin ,.
? Pierre
Reverdy, en 1921, s'est converti au
catholicisme (voir le Gant de crin ,
1927) : "l'Âme ardente", et d'autres
pièces, pourraien t
en porter les stigma
tes.
À l'abri de Solesmes, l'abbaye où il
s'est retiré en 1926, le poète rejette la
« lumière dure ,.
du monde , révélatrice
des souffrances
co mme des bassesses
humaines,
et s'avance dans la nu it.
Cette march e dans le silence,
l'angoisse, la terreur, nourrie d'espoir,
dicte
un e poésie de la nuit, et annon ce
l 'œuvre
à venir du René Cha r des Feuil
lets d'Hypn os (voir *Fureur et Mystère) ou
de
la Nuit talismanique.
Le poème do it
souvent au jeu des omb res de la " nu it
mêlée ,.
ses allure s cauchemardesques,
parfois ju stifiées
par la fièvre d' un
malad e attentif au surgissement des
forme s : mals cette mutabilité de
l 'apparaîtr e
du monde , qui déjoue l'imm obilité du jour, ouvre l'être et l
'écr iture aux sortilèges de l'image,
dont le poète écrit dans Nord-Sud, sa
revue ,
en 1918, qu'elle naît "du rap
procheme nt de de ux réali tés plus ou
moins
éloignées», unissant sa puis
sance émotive à sa justesse et à l'é loi
gnement de ses composantes.
Voici
quelques exemples qui illustrent cette
pratiqu e :
« les mains déliées de la
pluie ,.
ferment le monde et l'emplis
sent comme la
nuit ; la " lanterne ,.
est
« égarée •, le sujet erre dans ce monde
clos et inquiétant.
Ces Flaqu es de verr e, où se reflète le
ciel , comme
en des flaques d'eau sur la
route
("Vit ess e des mots" ), sont diffé
rentes des mi.roir s qui renvoient au
sujet ou
à l'objet sa propre image.
Point de narcissisme chez Reverdy .
Au contra ir e, telles des portes, elles inscri
vent la profondeur dans la paroi.
Ima
ges du poème, elles captent le refl et du monde en leur surface souvent ridée
par le vent au souf
fle chargé de voix
fascinante s
et effrayantes, venues d'ail leur s ("la Bonne Piste").
Le poème
porte la marque
d'un pa ssage lumi
neux -soleil, étoile, flamme , é clair -,
manifestation d' une évidence qui
émeut, et dément la labilité et la dis
harmonie d' un monde confus.
À tra
vers des phrases nomi nales qui
miment le surgisse ment des choses, se
façonne dans le temps
et l'es pace le
moi , fragile et
ému ("la Tête pleine de
beauté").
Hymne à la lumi ère, le
p oèm e célèb re ainsi
l'adh ésio n d 'une
âme
et d 'un corps au myst ère présent
e t d érobé :
"Toi, source intarissable
[ ...
].
Toi, lumière.
Toi, sinuosité de
l 'amour enseveli qui se dérobe.
,..
»
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