FEU CENTRAL de Benjamin Péret (résume et analyse complète)
Publié le 24/10/2018
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FEU CENTRAL. Regroupement de livres de Benjamin Péret (1899-1959), accompli par l'auteur et publié à Paris chez K. Éditeurs en 1947.
Le livre reprend la totalité des recueils Immortelle Maladie (publié en 1924 dans la collection « Littérature »), Dormir, dormir dans les pierres et Je sublime (Éditions Surréalistes. 1927 et 1936), Un point c'est tout (publié dans la revue les 4 Vents, n° 4). À tâtons enfin, qui constitue avec dix poèmes la partie inédite de Feu central.
Plus que d'une anthologie, il s'agit ici de la reconstruction, a posteriori, d'un itinéraire poétique, puisque la tâche de l'auteur est moins de sélectionner des poèmes (tous retenus) que
de leur donner un sens à travers l'architecture nouvelle du recueil. La construction de Feu central - au titre indiquant clairement que Péret y voyait le noyau de sa poésie, malgré l'absence d'une œuvre marquante, le Grand Jeu (1928), peut-être trop autonome pour s'incruster dans l'organisation du livre - marque alors une assomption du sens, depuis la maladie et la torpeur célébrées dans les premiers livres jusqu'à l'art poétique d'^ tâtons, en passant, pour relier l'écriture et la difficulté d'être, par l'amour, thème central des deux recueils lyriques Je sublime et Un point c'est tout. L'ironie brève et souvent sèche des premiers textes ainsi va s'affinant et s'affirmant : « Pour moi je demande que le ciel s'en aille avec les nuages / avant que je devienne tout à fait imbécile », disaient les derniers vers d'immortelle Maladie - l'autre nom de la poésie. On y reconnaît aisément Les relents de la « crétinisation » dada de la part du jeune surréaliste, de même que l'appel à « dormir » dans des « pierres » presque tombales joue, derrière l'humour, avec l'angoisse de la mort. Mais le « je », révolté contre tout et tous, cesse de l'être contre soi-même en se sublimant dans l'amour, célébré avec un lyrisme renouvelé, à la fois enflammé et candide, dans les mouvements centraux du livre : «J'ai tellement tes seins dans ma poitrine. » L'explosion d'images déborde dans ce cas le jeu de massacre propre à Péret pour rappeler la célébration presque liturgique de L' \"Union libre\" de Breton : « Mon avion en flammes mon château inondé de vin du Rhin / mon ghetto d'iris noirs mon oreille de cristal / [...] perdu dans une exposition de blanc encadré de momies / je t’aime. » S'il lui arrive de préserver une métaphore-cliché du discours amoureux, Péret la renouvelle à chaque fois par le ton : ainsi du « sang » de la passion,
«
« qui me fuit comme un chat qui a volé
une côtelette».
Il serait réducteur, dans
ce cas, de rabattre toute l'écriture sur
l'humour surréaliste : à travers le jeu
des images incompatibles, de la logi
que mise à mal
et de la diversité sou
daine des registres passant de la hau
teur colérique
à l'éclat de rire, le poète
vise d'abord une plénitude de l'instru
ment, capable de saisir l'intégralité de
l'existence sans rien trier
ni rejeter.
Comme Hugo contraignant la poésie
à accueillir dans
son lexique les mots
jugés
" bas » par le classicisme, Péret
impose la nourriture, le sexe naïf, la
grossièreté, avec tou
jours, une cocasse
rie fantaisiste ou méchante.
Une telle
réussite ne se comprendrait pas sans la
grande subtilité
d'un vers libre mais
savamment rythmé, où les mots gron
dent, grognent
et cognent.
Triomphe
de la poésie -mais jamais assuré, tou
jours
rageur- on comprend dans ce cas
le dernier titre,
À tâtons, l'écrivain
avançant aveuglément dans le débor
dement d'un cri ou d 'un rire, butant
sur une réalité face à laquelle l'âge n'a
rien modifié à son impatience de la
modifier : dans
une course un peu
folle ,
et bâclée, il s'agissait de « couper
la lumière
en quatre et la jeter aux
fauves»..
»
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