Femme et le Pantin (la) de Pierre Louÿs (analyse détaillée)
Publié le 22/10/2018
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Femme et le Pantin (la). Roman espagnol. Roman de Pierre Louÿs,
pseudonyme de Pierre Félix Louis (1870-1925), publié à Paris en feuilleton dans le Journal du 19 mai au 8 juin 1898, et en volume au Mercure de France la même année. Louÿs, aidé de Pierre Frondaie, adapta le roman à la scène (4 actes créés à Paris au théâtre Antoine le 8 décembre 1910 et publiés dans l'Illustration théâtrale en février 1911). En 1928, un opéra en 4 actes et 6 tableaux (livret de Maurice Vicaire, musique de Ricardo Zandonaï) fut créé à l'Opéra-Comique de Paris. A son tour, le cinéma s'empara de l'œuvre 0. von Sternberg, 1935 ; J. Duvivier, 1958 ; L. Bunuel, 1977, sous le titre Cet obscur objet du désir). À cet égard, on peut rapprocher le roman d'une de ses sources : *Carmen, qui connut pareille postérité.
La Femme et le Pantin représente une rupture dans la production romanesque de Louÿs, qui, deux ans auparavant, avait connu une brusque célébrité grâce à son roman de « mœurs antiques », Aphrodite. Avec son second roman, l'écrivain abandonnait l'inspiration antique, où certains auraient voulu l'enfermer, et revenait à la réalité contemporaine. Toutefois, comme le précise le sous-titre du livre, il s'agit d'un roman exotique, pour lequel Louÿs s'est inspiré à la fois de ses séjours en Espagne et de certaines lectures. Mais, à la différence d'Aphrodite, il s'agit d'une œuvre concise et âpre, dans la ligne de certaines nouvelles classiques (Mérimée, Maupassant).
L'action se passe en Andalousie, et presque entièrement à Séville. C'est dans cette ville que, durant le carnaval, un jeune Français, André Sté-venol, rencontre une mystérieuse jeune Sévillane, qui répond à ses avances. Il apprend bientôt qu'elle s’appelle Concha Perez, la retrouve et se voit fixer un rendez-vous. André confie sa passion et sa perplexité à un de ses amis, un riche Sévillan du nom de Mateo Diaz Celui-ci se récrie : il ne connaît que trop Concha Perez, qui l'a fait souffrir horriblement autrefois. Et, pour mieux mettre en garde son hôte, il se met à lui raconter sa liaison tumultueuse avec la jeune femme : ce récit de don Mateo occupe, selon un procédé classique, la plus grande partie du livre. C’est dans un train bloqué par les neiges, dans le nord de l’Espagne, que don Mateo a aperçu pour la première fois cette « petite moricaude » ; puis, le hasard la lui a fait retrouver un jour à la manufacture de tabacs de Séville, où elle travaillait comme cigarière. Elle le séduit instantanément par son aplomb, ses réparties et son audace. Commence alors une liaison qui va être constituée par une incessante succession de fuites et de retrouvailles. Refusant de se donner à don Mateo, dont elle s’emploie par ailleurs à tirer d’importantes sommes d'argent, Concha se révèle une femme incompréhensible, à la fois câline et féroce, ingénue et retorse. Subjugué par sa beauté et sa jeunesse, Mateo lui cède et lui pardonne toujours. À Cadix, dans un café chantant, il a cependant, un jour, la preuve flagrante de sa fausseté. Mais ce n’est qu’ensuite, lorsque de nouveau Concha l’humilie et le bafoue ouvertement, qu’il se révolte, excédé de tant de trahisons et de mensonges. Contre toute attente, Concha se donne alors spontanément à lui. Cependant, elle redevient bien vite la créature impossible qu’elle était auparavant, et Mateo décide de s’enfuir. Mais le récit qu’il vient de faire à André a rallumé sa passion, et, en réponse à une lettre de Concha qu’on vient de lui apporter, il écrit à celle-ci pour lui demander pardon.
«
mieux mettre en garde son hôte, il se met à lui raconter sa liaison tumultueuse avec la jeune
femme : ce récit de don Mateo occupe, selon un procédé classique, la plus grande partie du livre.
C'est dans un train bloqué par les neiges, dans le nord de l'Espagne, que don Mateo a aperçu pour la première fois cette « petite moricaude » ; puis, le hasard la lui a fait retrouver un jour à la manu
facture de tabacs de Séville, où elle travaillait
comme cigarière.
Elle le séduit instantanément
par son aplomb, ses réparties et son audace.
Commence alors une liaison qui va être consti
tuée par une incessante succession de fuites et de retrouvailles.
Refusant de se donner à don
Mateo, dont elle s'emploie par ailleurs à tirer d'importantes sommes d'argent, Concha se révèle une femme incompréhensible, à la fois câline et féroce, ingénue et retorse.
Subjugué par sa beauté et sa jeunesse, Mateo lui cède et lui pardonne toujours.
À Cadix, dans un café chan tant, il a cependant, un jour, la preuve flagrante de sa fausseté.
Mais ce n'est qu'ensuite, lorsque de nouveau Concha l'humilie et le bafoue ouver
tement, qu'il se révolte, excédé de tant de trahi sons et de mensonges.
Contre toute attente.
Concha se donne alors spontanément à lui.
Cependant, elle redevient bien vite la créature
impossible qu'elle était auparavant, et Mateo
décide de s'enfuir.
Mais le récit qu'il vient de faire à André a rallumé sa passion, et, en réponse à une lettre de Concha qu'on vient de lui apporter, il écrit à celle-ci pour lui demander pardon.
Ce roman d'un art si classique fut
écrit avec
une rapidité extrême.
Commencé à Séville
en 1896, il fut,
après
une interruption de près de deux
ans, achevé au Caire, au printemps
1898.
Louys calculera que la rédaction
ne lui avait coûté en tout que vingt
jours de travail,
ce qui peut passer pour
un record.
Dédié à André Lebey, ami
intime de Louys,
la Femme et le Pantin
fut écrit, affirmera celui-ci, pour guérir
le premier d'une maîtresse particulière
ment insupportable.
Mais le thème de
la femme fatale attirait depuis long
temps Louys,
qui l'avait déjà traité
dans
Aphrodite.
A ses propres souvenirs
de Séville, il ajoutera des souvenirs
livresques
et musicaux.
D'abord, les
Mémoires de Casanova, où l'épisode de la
Charpillon lui a fourni divers traits
pour son roman.
Mais c'est surtout de
l'opéra de Bizet,
Carmen, que Louys
admirait vivement, que fut pris, outre
le cadre géographique, ce personnage
de la femme fatale.
Car
la Femme et le
Pantin
représente au premier chef une
nouvelle forme de cet archétype fémi
nin, qui hante toute la seconde moitié
du
x1xe siècle.
Et si ce roman est sans
doute
une des meilleurs expressions
d'un tel mythe, c'est d'abord grâce à sa
concision.
Par sa structure, il constitue
une tragédie parfaite : une exposition,
cinq actes
et un dénouement, aussi
brusque qu'imprévu.
Pas de digressions
ni de morale ; pas de descriptions
non
plus.
Seul demeure le jeu nu des pas
sions : Concha et Mateo sont deux
égoïsmes qui s'affrontent
en une lutte
sans merci,
où l'homme a très vite le
dessous.
Dès le début, Concha est toute
sensualité
et mobilité, et sait jouer à
merveille de
ses charmes.
Mais Louys
n'a pas manqué de souligner les diffé
rences sociales, économiques et cultu
relles qui la séparent de
don Mateo.
Comme dans
*Manon Lescaut, l'argent
versé à Concha est
un des leitmotive
du roman.
À tout cela s'ajoute le drame
de la différence d'âge : Mateo a qua
rante ans,
et Concha, seize.
Toute
communication véritable entre eux est
impossible,
et la longue série de brouil
les qui jalonne
le livre ne fait que répé
ter la liaison intime de l'amour avec la
souffrance et la douleur.
Mateo est
un
masochiste, qui ne peut renoncer à
l'illusion de croire qu'il parviendra à
se
faire aimer de la belle Concha.
Et tous
les caprices de celle-ci sont sadiques,
car ils ne visent qu'à l'humilier et à
le
faire souffrir.
Louys se défendra tou
jours d'avoir écrit là
un roman auto
biographique : don Mateo,
affirmera-t
il, est un pantin, parce qu'il supplie
une femme qui ne cesse de
se moquer
de lui.
De plus, pour Louys (et c'était
déjà
la thèse d'Aphrodite), tout amour.
»
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